Coiffé au poteau ! On attendait Fimatex, la filiale de courtage électronique de la Société générale, mais c’est finalement son vieil ennemi BNP Paribas qui, via sa filiale Cortal, rafle la mise en rachetant le courtier en ligne allemand Consors.Les difficultés du broker étaient devenues inextricables. Une baisse soudaine du volume des transactions en Bourse de ses clients, d’abord, mais surtout la déroute bancaire de sa maison mère, la Schmidtbank, ont plombé les comptes de Consors, qui a affiché une perte historique de quelque 125,5 millions d’euros lors de l’exercice 2001. Résultat, les autorités bancaires allemandes ont procédé à sa mise aux enchères.
Un timing opportun
Au bout de six mois de négociations, le groupe BNP Paribas s’est porté finalement acquéreur du broker d’outre-Rhin en une période de bas de cycle, avec une ambition déterminée : devenir le leader européen de l’épargne des particuliers avec 1,2 million de clients et quelque 14 milliards d’euros d’actifs gérés.La place de Paris a salué le “bon timing” de cette opération. Alors que les acquisitions sont actuellement durement sanctionnées par les marchés, le titre BNP Paribas n’a pas été affecté par l’annonce du rachat. La somme à débourser en cash est théoriquement de 247 millions d’euros pour racheter les 66,43 % de la participation de la Schmidtbank dans le capital de Consors. Mais le montant pourrait s’élever à 445 millions si les actionnaires minoritaires exigent le rachat de leurs titres, comme la loi allemande les y autorise. “Hypothèse peu probable”, commente Jean Clamon, membre du comité exécutif de BNP Paribas en charge des services financiers spécialisés.L’hypothèse la plus pessimiste ?” le rachat de 100 % des titres du courtier en ligne ?” porterait la valorisation de chaque compte à 857 euros. Soit l’une des plus faibles des brokers cotés en Bourse. Elle est bien inférieure à celle de l’américain Charles Schwab (2 630 euros par compte) ou à celle de son concurrent français Fimatex (1840 euros) ou encore de l’Allemand DAB (1390 euros). “Ce faible prix d’acquisition devrait se traduire par une remise à plat de l’ensemble des ratios du secteur”, pronostique Delphine Henriet, analyste chez Fortis Securities. Autrement dit, le temps risque de se gâter en Bourse pour les e-brokers dans les semaines à venir.
La vraie valeur des brokers
Tous les analystes vont en effet revoir leurs estimations à la baisse, en s’alignant sur la valorisation de Consors, payé 14 fois moins cher que si l’opération était intervenue deux ans plus tôt. Et en ne déboursant que du cash, Cortal, qui a eu la sagesse de ne pas s’introduire en Bourse lors de la bulle internet, passera entre les gouttes.“Notre but est d’être rentable en 2004, si possible en 2003 et de doubler les actifs gérés en quatre ans pour les porter à 25 milliards d’euros en 2005”, déclare Olivier Le Grand, président du directoire de Cortal. Pari ambitieux ? “Le jeu des synergies devrait jouer à plein”, pronostique Pascal Decque, analyste chez CDC Ixis.En effet, Consors et Cortal sont complémentaires. Depuis 1984, le c?”ur de métier de la banque sans guichet est l’épargne au sens large, avec comme point fort la commercialisation des sicav et des FCP des principaux établissements financiers français et étrangers. L’activité de courtage ne date que de 1993, par téléphone et Minitel, avant de connaître un nouvel essor en 1998 sur internet. Mais cette partie est toujours restée marginale.La clientèle de Cortal est principalement composée de “smart investors”, c’est-à-dire de clients prudents, qui détiennent des produits monétaires type sicav ou contrats d’assurance-vie. En revanche, Consors s’adresse aux plus actifs des boursicoteurs allemands. Sur ses 300 000 comptes, 20 000 sont détenus par des “heavy traders”, qui ont passé en moyenne 116 ordres en 2000, et quelque 450 000 par des “active traders”, qui en ont réalisé environ 18. En revanche, chez le broker d’outre-Rhin, on recense uniquement 60 000 comptes privilégiant la gestion collective (sicav et FCP).
Vers une offre globale
L’offre globale d’épargne de Cortal devrait être proposée aux clients allemands. Inversement, Cortal entend profiter du savoir-faire high-tech de Consors pour la vente en ligne d’actions. À terme, les plateformes informatiques seront communes, tant pour internet que pour le back-office.Cette alliance s’inscrit en toute logique dans la démarche de nombreux courtiers en ligne, qui cherchent à diversifier leur offre en l’élargissant aux produits d’épargne dit classiques afin d’être moins vulnérables aux aléas de la Bourse. La consolidation du secteur pourrait s’accélérer suite à cette opération.
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