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Compteurs et objets connectés défient la protection des données

Un colloque co-organisé par la Cnil a mis en exergue les risques liés aux réseaux intelligents, qui connecteront demain les appareils des consommateurs.

L’arrivée des objets connectés dans la maison, tels les compteurs intelligents, pose de nouveaux défis pour la protection des données du consommateur et leur utilisation, selon des experts réunis mercredi 3 octobre 2012 par la Cnil et la Fédération des industries électriques et électroniques. Programmer à distance sa machine à laver, l’ouverture du store de sa chambre ou savoir combien on a consommé d’électricité tel jour : les smartgrids, ou réseaux intelligents, sont des outils de gestion et de mesure sophistiqués qui se développent de plus en plus pour éviter les gaspillages et mieux mettre en adéquation offre et demande en électricité.

« Des informations vont commencer à circuler entre tous les systèmes à l’intérieur de la maison mais aussi vers l’extérieur, et c’est d’ores et déjà un enjeu très important qui pose des problématiques nouvelles de sécurité et de confidentialité des données », a résumé Benoît Watrigant, responsable Nouvelles activités pour le fabricant de matériel électrique Legrand. « Le particulier doit garder le contrôle et être maître de ces informations », a-t-il estimé, lors du colloque intitulé « Monde numérique et respect de la vie privée, quels enjeux, quelles solutions » organisé par la Commission nationale de l’informatique et des libertés, et la Fédération des industries électriques et électroniques (Fieec).

L’Internet des objets espions

« Dans tout ce secteur, on commence à introduire une personnalisation et un profilage des individus. Cette nouvelle donne impose un certain nombre de défis car ces données peuvent fragiliser de façon nouvelle » le consommateur, a renchéri Isabelle Falque-Perrotin, présidente de la Cnil. Selon elle, ce nouvel environnement numérique « change le métier » de la Cnil : « on est obligés de travailler en amont avec les industriels pour que soient intégrés dès le début les principes de protection, ce qu’on appelle la privacy by design [vie privée dès la conception, NDLR] ».

« Toute donnée qui directement ou indirectement permet d’identifier une personne est une donnée personnelle, la définition est donc large », ajoute Sophie Nerbonne, directrice adjointe des affaires juridiques de la Cnil. Ainsi, avance-t-elle, « révéler les habitudes de vie des personnes » ou « prévoir » un comportement énergétique par exemple, pourrait être une forme d’atteinte à la vie privée. « L’internet des objets peut rapidement devenir l’internet des objets espions si on ne prend pas garde. Une courbe de charge (consommation heure par heure) permet de savoir si quelqu’un est dans la maison, quel équipement est utilisé, à quelle heure, etc. », souligne Marc Jalabert, directeur de la division Grand public de Microsoft France. Il estime que les smartgrids sont « une énorme opportunité, mais qui ne marchera pas s’il n’y a pas la notion de confiance absolue pour le consommateur ».

Le droit de se déconnecter

Concernant l’exemple du compteur électrique intelligent Linky, dont l’installation à échelle nationale n’a pas encore débuté, Olivier Béatrix, directeur juridique de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) affirme que « la préoccupation majeure est qu’il respecte la loi informatique et liberté ». « Ce compteur va remonter des informations à la fois au consommateur et au gestionnaire de distribution, mais les index et les courbes de charge appartiennent en premier lieu au client, qui aura la main », a déclaré M. Beatrix, qui précise que le compteur conservera les données récoltées pendant deux mois. « Etant donné le conformisme numérique qui règne aujourd’hui, on doit avoir le droit de pouvoir se déconnecter (chez soi) et échapper à cette géolocalisation permanente de l’individu », a conclu Sophie Vulliet-Tavernier, directrice des Etudes et de l’Innovation à la Cnil.

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Katia Dolmadjian (AFP)