La campagne électorale, tout le monde le sait, ne laisse que peu de place à l’économie. Sous-entendu : c’est un sujet bien trop ennuyeux. Résultat : les Français ne comprennent pas vraiment le fonctionnement de la “machine” économique, les facteurs d’accélération et les motifs de ralentissement, pas plus qu’ils ne distinguent ce qui est imputable à la conjoncture internationale de ce qui relève de l’État. Comment, dans ces conditions, avoir la moindre idée sur les chances de reprise et sur les promesses qui nous sont faites ?Tout cela est affaire de cycles, nous dit-on. Mais encore ? Sans doute faut-il revenir au B.A.BA (dont le ministre de l’Éducation nationale, paraît-il, redécouvre les vertus). Imaginons une économie stationnaire, avec un PIB figé au niveau actuel. Le flux annuel d’investissement serait égal au besoin de renouvellement du stock de capital : par exemple, pour une durée de vie de dix ans, 10 % de ce stock. La vie économique ressemblerait alors à un boulevard tranquille.Ce qui dérange (pour notre bien !), c’est la croissance, qui implique évidemment un ajustement entre le stock de capital et le PIB : ce qui se traduit par un ajout à la simple demande de renouvellement. Comme le rapport entre PIB et le stock de capital est de 1 à 3, toute croissance de la demande finale entraîne un flux d’investissement considérablement amplifié.
L’amplificateur high-tech
C’est ce que l’on appelle l’effet d’accélération, résultat du jeu entre flux et stock. À quoi viennent s’ajouter les anticipations des firmes, chacune d’entre elles espérant accroître sa part de marché ! Jusqu’au jour où l’effet d’accélération se retourne et se traduit par une baisse de l’investissement. Simple comme bonjour, cette “mécanique” a joué pleinement dans le cas américain, un peu moins nettement en Europe, où les paris sur les nouvelles technologies étaient restés plus modérés. Il faut savoir, en effet, que les investissements high-tech, contrairement à ce que les drogués du silicium ont longtemps prétendu, ne diminuent nullement les fluctuations conjoncturelles, mais au contraire les accentuent, à la hausse comme à la baisse : s’agissant de marchés technologiquement et psychologiquement chahutés, la limite entre la décision rationnelle et l’investissement fou était devenue malaisée à discerner.Où en sommes-nous aujourd’hui ? Les nouvelles en provenance des États-Unis ?” y compris de la Silicon Valley ?” suggèrent que le creux du cycle a été dépassé. En Europe, on discerne également un léger mieux. Mais, par-delà l’événementiel et le comptage minutieux des décimales, ce qui domine, c’est l’idée que notre univers économique, que certains esprits “prométhéens” (ou planificateurs candides) croyaient pouvoir lisser, se révèle en fait de plus en plus cyclique : prix à payer pour un bouillonnement technologique sans précédent.
Le diagnostic, tout un apprentissage
Corrélativement, il faudrait que les fonctions de repérage et de régulation conjoncturelles fassent quelques progrès. Ce n’est pas exactement ce que l’on voit chez nous, vu les diagnostics défaillants et les erreurs de gestion des dernières années. Erreur de diagnostic d’abord : les experts officiels (et parfois privés…) ne prétendaient-ils pas que l’Europe ?” dont la France ?” échapperait au ralentissement américain (un pari à l’état pur…) ? Erreur de gestion ensuite : pendant les années de “vaches grasses”, on a laissé filer le déficit budgétaire, ce qui nous prive aujourdhui de toute marge de man?”uvre.On voudrait des dirigeants parés de mille vertus. Ne pourrait-on commencer par exiger que dans cet univers de plus en plus tourmenté, ils sachent mieux en déchiffrer les signes ?* économiste
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