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Comment vider une batterie de voiture sur un circuit : notre première course d’endurance en électrique

Nous avons participé à une course d’endurance en voiture électrique. Quelles sensations ? Quel type de conduite et quel rapport avec la course automobile classique ? On vous raconte tout !

C’est à un exercice très inhabituel auquel Audi nous a conviés à la fin du mois dernier. Une course d’endurance sur le mythique circuit du Castellet, là même où se déroule le Grand Prix de France de F1. Une course automobile, bien entendu, mais très différente de celle que le circuit Paul Ricard accueille régulièrement. D’une part parce qu’il s’agit d’une épreuve 100 % électrique, et d’autre part parce qu’elle mettait aux prises une quarantaine de médias français spécialistes de l’auto. C’est à ce titre que nous avons été conviés et que nous avons partagé le volant de notre bolide avec nos confrères de Numérama, Une fille au volant et Survoltés.

C’est ainsi que la marque Allemande a choisi de fêter son grand retour dans le sport auto, quelques mois seulement avant de lancer sa monoplace dans le grand bain de la F1. Pour notre part, l’objectif était forcément différent. Ayant aussi peu de chances de lancer une carrière tardive de pilote auto que d’être choisi au premier tour de la prochaine draft NBA, il nous importait essentiellement de vivre une course auto de l’intérieur, de vous la retranscrire mais aussi de s’interroger sur l’intérêt d’une épreuve 100 % électrique à l’heure où même la Formule e peine à séduire.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Voilà pour le décor. Mais que s’est-il vraiment passé au cours de ces deux jours pendant une soixantaine de tours de circuits. Récit.

La course : 3 heures, 4 pilotes, 1 batterie

Pour bien comprendre la course, ses enjeux et les spécificités de l’endurance en électrique, mieux vaut avoir un aperçu complet des règles de la course. D’abord et avant tout l’Audi e-tron Endurance Experience est une course officielle régie par le règlement traditionnel et placé sous la surveillance de la FFSA. En conséquence, toute entrave au règlement (dépassement de la vitesse maximale dans les stands, conduite inappropriée, non respect des consignes de course, etc.) donne droit à une pénalité. Course électrique oblige : toute recharge de batterie est également sanctionnée.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

La course se déroule sur deux jours. Le premier est consacré aux essais et à la superpole, le second, à la course. Il s’agit donc d’une épreuve d’endurance, en voiture électrique, sur 3 heures. L’objectif est on ne peut plus simple : effectuer un maximum de tours de circuit pendant le temps imparti. Autrement dit, il faut parvenir à trouver la vitesse idéale et les bonnes trajectoires. Celles qui permettent d’afficher une vitesse moyenne élevée sans faire exploser la consommation. La première journée d’essai a été consacrée à cette partie là essentiellement : découverte et reconnaissance du circuit, établissement d’une stratégie de course et définition de l’ordre de passage et du nombre de relais de chaque pilote.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Autre détail d’importance : les voitures s’élancent sur la configuration 3,8 km du circuit du Castellet (il existe également une version 5,8 km). Cette donnée est à mettre en relation directe avec le nombre de voitures en piste. L’Audi e-tron Endurance Experience met en concurrence 21 voitures. 11 d’entre elles sont occupées par des médias, les 10 autres sont partagées par des clients de la marque. Les modèles de chaque catégorie n’étant pas identiques, il y a donc deux classements distincts, comme lors des 24 heures du Mans par exemple.

La voiture : Audi e-tron RS GT

Pour disputer cette première course d’endurance électrique, Audi a opté pour le joyau de son catalogue : l’e-tron RS GT. Ainsi, les équipages média étaient au volant de la version GT de la bête, alors que la course client se déroulait sur des modèles Quattro. Précision d’importance : les 21 véhicules étaient uniquement équipés de série sans aucune préparation spécifique à la course. Même pour les pneumatiques, Audi a fait le choix de proposer les voitures dans ce qu’on pourrait appeler une configuration d’usine, celle qui est disponible chez les concessionnaires de la marque.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Cela n’en reste pas moins une bête de course dotée de trois moteurs et d’une garantie de pouvoir libérer 646 chevaux (en boost) et 830 Nm de couple à tout moment. Ce n’est donc pas au cours de cette course que nous allons exploiter toute la puissance du bolide, mais par chance, nous avions déjà pu nous rendre compte de ses capacités lors d’un premier test de l’Audi RS e-tron GT, suivi d’un autre essai plus axé autonomie.

Course oblige, il n’était pas question d’exploiter les capacités de recharge de la bête. Bien que notre e-tron RS GT soit basée sur une plateforme de 800 V et qu’elle dispose d’une capacité de charge rapide de 270 kW, il aurait été suicidaire d’un point de vue sportif de miser sur une recharge en course pour compenser des tours à haute vitesse. Toute la spécificité d’une course d’endurance en électrique repose sur un autre aspect : la recherche de l’efficience maximale. Concrètement, les trois heures de course doivent être effectués avec la plus grande partie possible de la batterie de 93 kWh de notre Audi.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

L’éco – pilotage : une autre façon d’approcher la course auto

Nous voilà donc partis au volant de notre e-tron RS GT, et en 3ème relayeur, pour quelques dizaines de tours de circuit avec un objectif en tête : compenser une 16ème place lors de la Superpole par un pilotage appliqué et remonter un maximum de concurrents.

Difficulté principale de l’exercice : intégrer les règles de la course d’endurance en électrique. Celles-ci sont pour le moins paradoxales lorsqu’on n’est pas expert en la matière. En effet, il est assez étrange de se retrouver sur un circuit, à bord d’un bolide de plus de 600 ch et de ne pas avoir pour objectif d’être le plus rapide sur la piste. Dans notre cas, cette conduite très sportive serait forcément contre productive car trop gourmande en énergie. C’est là tout le paradoxe d’une telle course, mais aussi ce qui peut faire son charme.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Qu’est ce que cela donne côté conduite ? Dans cette configuration de course où le principe consiste à tirer le maximum de profit des capacités de sa batterie, la recherche de la bonne trajectoire devient l’objectif primordial. Etrangement, celle-ci diffère de celle que nous aurions visé à bord d’une voiture thermique. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’en électrique chaque accélération a un coût et qu’il est plus intéressant de profiter d’une décélération dans une courbe que de prendre les freins pour attaquer plus vite en sortie de virage. Autrement dit, après avoir atteint une vitesse intéressante en ligne droite, le jeu consiste à lever son pied de l’accélérateur et à miser sur la phase de décélération pour enchainer un maximum de courbes avant de repartir à l’attaque.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

L’exemple le plus concret de cet exercice peut être illustré à l’aide d’un plan du circuit (et d’un minimum d’imagination). Dans les faits l’une des parties les plus complexes du circuit devait se négocier ainsi : arriver à 130 km/h au bout de la ligne droite du mistral et lever le pied de l’accélérateur pour passer en roue libre. Prendre la courbe de Signes de la manière la plus fluide possible avant d’aller coller la ligne extérieure du « double droit du Beausset ». Ce n’est qu’à la sortie de ce troisième virage à plus de 90 km/h qu’il était conseillé de « remettre les gaz » pour attaquer la légère bosse en Amon de l’épingle de Bendor. Autrement dit : toute cette séquence se fait uniquement au volant sans toucher la moindre pédale. Mais de son exécution dépend en grande partie la consommation d’énergie de la RS e-tron et notre capacité à enchainer les tours.

L’éco-pilotage est donc très différent de l’éco-conduite ou du pilotage traditionnel. Plus cérébral, il oblige à un niveau d’attention constant pour vérifier non seulement la vitesse, mais aussi la consommation à un instant T et le bon choix de trajectoire. Lorsqu’on ajoute à ce cocktail 20 autres voitures qui visent le même objectif, on rentre dans ce qui fait le sel de cette course. Bien entendu, en termes de ressenti et d’adrénaline, le niveau est sensiblement différent d’une course de vitesse, mais il s’agit d’un autre exercice procurant des sensations différentes, mais pas moins intenses.

Et la course dans tout ça ?

Après des essais encourageants réalisés par une température idéale et un temps ensoleillé, la course s’annonce nettement plus complexe. 10°C de moins sur le thermomètre et une pluie battante nous accueillent sur circuit du Castellet. Il va falloir adapter les enseignements de la veille, ajuster toutes ses vitesses d’entrée et de sortie de virage et faire glisser un peu plus les 2,3 tonnes de notre fidèle destrier. Enfin, il va falloir communiquer avec les autres coéquipiers sur ses ressentis en course et leur transmettre un maximum d’informations.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Dès les premiers tours, le couperet tombe : notre consommation est bien plus élevée que la veille, conditions de course obligent. Plus de 38 kWh/100 km là où nous tournions à 30 kWh/100. Il va falloir adapter sa conduite, éviter le moindre coup de frein et tout enclenchement des aides à la conduite qui serait trop gourmand en énergie. Les relais s’enchainent et si notre voiture remonte doucement au classement, sa consommation elle diminue moins vite que nous l’aurions souhaité. Or toute notre stratégie de course repose sur le fait de consommer assez peu d’énergie en début de course, privilégier la constance, pour mieux finir que nos adversaires.

Notre vitesse moyenne, un peu moins de 110 km/h, n’a pas de quoi rendre jaloux Max Verstappen. Qu’importe, elle permet de revenir à une consommation plus douce, inférieure à 35 kWh/100 km et nous permet d’entrevoir une fin de course sans panne. C’est là que la stratégie de course prend tout son sens, et qu’une course d’endurance se gagne ou se perd. Davantage que sur ses capacités derrière un volant, il faut faire preuve de rigueur et de concentration.

La fin de course approche. Nous prenons le volant pour un avant dernier relais qui nous permettra de dépasser trois concurrents en quatre tours avant de céder notre bolide avec un peu plus de 8 % de batterie et un peu plus de 12 minutes à parcourir. La crispation gagne le box de notre voiture n°11 qui sent une possibilité de bien finir cette course. Quelques tours plus tard, c’est la délivrance. Nous bouclons un 65ème tour et terminons notre marathon avec un sublime 0% de batterie à une troisième place significative de podium.

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© Laurent Gayral / Rémi Chaillaud

Êtes-vous prêt pour la course de voitures électriques ?

Au terme de cette expérience assez inédite, la question que nous nous posions avant de prendre le volant n’a pas trouvé de réponse, du moins pas une réponse définitive. Est-il possible de prendre du plaisir dans une course d’endurance en voiture électrique ? Certainement, mais à conditions de savoir où on met les pieds. La course en électrique, ses exigences en matière de consommation changent radicalement la vision que l’on peut avoir d’une course. Certains de nos confrères n’ont d’ailleurs pas été convaincus. Pour notre part, l’importance accordée à la partie stratégique et la recherche constante d’une performance puisée dans la rigueur ont réussi à compenser un manque certain d’adrénaline causé par une vitesse de course moins élevée. Le principe même d’éco-pilotage mérite qu’on s’intéresse à l’endurance en électrique même si celle-ci aura bien du mal à faire oublier le bruit et l’intensité d’un V8 sur les 24 heures du Mans.

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Dimitri Charitsis
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