C’est ce mercredi 7 octobre que commence le débat parlementaire qui a pour objet le projet de loi tant attendu sur l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent en ligne. Trois types de jeux sont concernés, le poker, les paris sportifs et les courses hippiques. Surtout, le texte organise le contrôle des sites avec un système d’agrément délivré par une autorité administrative.
Cette Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel) aura le pouvoir de lutter contre les sites illégaux (sans agréments). Le chapitre VII (article 47 à 51) du texte donne trois moyens : le blocage des transactions financières entre l’internaute joueur et un site illégal, l’interdiction de faire de la publicité et le blocage de l’accès au site illégal lui-même. Ce dernier sujet est le plus sensible et source de tous les fantasmes concernant le filtrage de la Toile.
Responsabilité des FAI
Directement concernés, les opérateurs de télécoms ont émis quelques réserves par la voix de la Fédération française des télécommunications. Ils souhaitent que la loi n’impose aux FAI qu’une obligation de moyens, et non de résultat. Argument des FAI : tout système de blocage peut d’une manière ou d’une autre être contourné. Ils ne veulent donc pas être tenus pour responsables de l’échec d’un blocage.
De la Hadopi à l’Arjel ?
Ensuite, le principe d’une autorité administrative avec des fonctions de juge lui paraît « curieux », selon un porte-parole.
« Bloquer un site, cela se fait déjà, et il faut passer par un juge, reconnaît Thibault Verbiest, avocat au cabinet Ulys. Là, la nouveauté, c’est qu’une autorité administrative, l’Arjel, aura la faculté de demander elle-même la fermeture. Elle aura le pouvoir d’un juge ». C’est une disposition qui a été votée en commission.
Ce dispositif rappelle celui qui avait été censuré par le Conseil constitutionnel dans la première loi Hadopi. « Mais la Hadopi [une autre autorité administrative, NDLR] était censée prononcer la coupure de tout un service : Internet. Là, l’Arjel demandera simplement le non-accès à un opérateur illégal, mais l’internaute aura toujours accès au reste d’Internet », continue l’avocat.
Les spécialistes et professionnels du jeu, eux, sont d’accord pour bloquer les sites illégaux, mais ont aussi leurs réserves. Dans un communiqué, le site d’information Ruedesjoueurs.com évoque une « efficacité toute relative [du filtrage], il est quasiment impossible d’empêcher ceux qui ont les compétences techniques requises de se connecter sur des sites interdits ».
Même sentiment chez Emmanuel de Rohan-Chabot, président de Zeturf.com et créateur de l’Association française des opérateurs des jeux en ligne. Contacté par 01net., il évoque aussi une autre crainte : « On va imposer une pression fiscale telle sur les sites légaux que les gains des joueurs seront forcément plus intéressants sur des sites illégaux [qui ne sont pas imposés, NDLR]. Les joueurs vont tout faire pour aller sur ces sites ».
Liste noire
Une analyse que Thibault Verbiest rejoint. Mais du coup, selon lui, c’est ce qui justifie que l’Arjel ait un maximum de pouvoirs pour réguler le secteur et qu’elle ait une vraie fonction de juridiction avec intervention des avocats des parties, possibilité de faire appel, etc.
En fait, concernant le filtrage, ses craintes sont ailleurs : l’éventualité que soit créée une liste noire préventive de sites. « C’est dangereux et arbitraire. Si on fait ça pour les jeux d’argent en ligne, qu’est-ce que l’on va faire demain pour d’autres secteurs ? » Les pouvoirs publics envisagent depuis longtemps une liste noire des sites pédopornographiques.
En fait, une liste noire des sites de jeux d’argent est bien prévue depuis 2007, dans la loi pour la prévention de la délinquance. Mais elle n’a jamais été créée, les décrets d’application n’ont jamais été publiés !
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