Placé sur liste noire par le gouvernement de Donald Trump en mai 2019, Huawei traverse la plus importante crise de son histoire. La marque chinoise est dans l’incapacité de travailler avec certaines entreprises américaines comme Google, ce qui réduit fortement le nombre d’applications compatibles avec ses smartphones Android.
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Ces derniers mois, Huawei a, en quelque sorte, perdu le contrôle de son destin. Il lui est désormais impossible de commercialiser de nouveaux appareils avec les services Google et, plus inquiétant, sa croissance en Europe, très forte ces dernières années, pourrait brutalement s’interrompre dans les prochains mois…
Depuis plusieurs semaines, 01net.com enquête sur les coulisses du marché du smartphone en France. Selon nos informations, Huawei prépare une forte contre-attaque.
La paix entre Huawei et les États-Unis est peu probable
Après avoir longtemps attendu une résolution du conflit, Huawei aurait désormais accepté l’inévitable : le gouvernement américain ne reviendra pas sur sa position. Si la marque continue d’affirmer qu’elle continuera de privilégier Android, des représentants chinois de l’entreprise affirmeraient en interne que les chances de retrouver Google ces prochaines années sont inférieures à 5%. Sur la période 2020-2021, Huawei s’apprête donc à vivre indépendamment des Américains. La marque mise sur ses nouveaux « Huawei Mobile Services » pour remplacer les « Google Mobile Services » et doit donc convaincre développeurs et consommateurs qu’elle est capable de surmonter une telle épreuve.
Huawei mise sur son AppGallery
À l’heure actuelle, beaucoup d’applications Android sont incompatibles avec les nouveaux smartphones Huawei. Puisqu’elles nécessitent des API Google pour fonctionner, des applications comme Snapchat ou Netflix ne peuvent s’exécuter sur un appareil comme le Mate 30 Pro. Si Huawei souhaite conserver le secret pour l’instant, nous sommes en mesure de vous révéler que la marque a signé un partenariat avec de grands développeurs. Parmi eux, Snapchat et Netflix, qui remplaceront prochainement les API Google de leurs applications par des interfaces de programmation Huawei lorsqu’elles seront utilisées sur des smartphones de la marque chinoise. De nombreuses autres applications débarqueront d’ailleurs prochainement sur l’AppGallery, probablement au même moment (on pense au MWC ou à la présentation des P40). Aujourd’hui, le concurrent chinois de l’App Store et du Play Store ne propose que très peu des applications utilisées par les utilisateurs européens, ce qui le rend peu utile.
Pour convaincre les développeurs de rejoindre son AppGallery, Huawei miserait sur une stratégie similaire à celle de Microsoft il y a quelques années, qui avait tenter d’accompagner les développeurs pour qu’ils portent leurs programmes sur Windows Phone… sans reproduire les mêmes erreurs, qui ont conduit à la lente agonie de l’OS de la firme de Redmond. Alors, en plus de contacter elle-même les grandes entreprises et de leur proposer de l’aide et de l’argent, Huawei jouerait énormément sur sa puissance en Chine. En échange d’une arrivée sur l’AppGallery, elle apporterait de l’aide aux développeurs qui souhaitent étendre leur business dans l’Empire du Milieu. Les développeurs ont beaucoup à y gagner, car l’AppGallery pèse en Chine. La route risque néanmoins d’être longue, d’autant plus que certaines applications, comme celles de Google, resteront quoi qu’il arrive exclues de l’AppGallery. Peut-on convaincre le grand public sans Google Maps, Gmail ou YouTube ?
Des développeurs sceptiques
Huawei a beau avoir signé avec de grands groupes, d’autres se montrent très réticents à figurer dans l’AppGallery. Nous avons discuté avec des développeurs d’applications françaises qui n’ont pas du tout envie de jouer le jeu de Huawei. « Adapter les APIs à Apple et Google nous prend déjà beaucoup de temps. Débarquer chez Huawei, c’est se rajouter du suivi supplémentaire pendant au moins plusieurs années » nous confie l’un d’entre eux. La marque chinoise ne doit donc pas crier victoire trop vite. Convaincre les développeurs d’applications Android de s’adapter à son écosystème est une tâche ardue.
Un immense plan marketing
Qu’importe : les prochains fleurons de Huawei, comme les P40 et Mate Xs ne seront pas compatibles avec les services Google… Et il va donc falloir convaincre le public, même si les applications prendront du temps à débarquer sur sa plate-forme. Nous avons ainsi appris que Huawei lancera prochainement une vaste campagne marketing pour promouvoir l’AppGallery. L’entreprise souhaiterait s’y présenter comme étant la seule alternative crédible au duopole Apple/Google. On ne sait pas encore quelles types de campagnes Huawei réalisera, mais une de nos sources nous rappelle l’incroyable puissance financière de la marque en Chine : « s’il faut débourser beaucoup d’argent, ils le feront ». Attendez-vous à beaucoup entendre parler de l’AppGallery en 2020.
L’autre enjeu de taille pour Huawei sera la distribution de ses nouveaux produits. À l’heure actuelle, il est impossible de savoir si les revendeurs et opérateurs accepteront de commercialiser les nouveaux smartphones haut de gamme de la marque. Certains s’inquiètent notamment pour leur service client, qui risque d’être bombardé de questions sur l’installation de WhatsApp ou de Google Maps sur leur nouveau mobile. Nous ne savons pas encore si Huawei pourra compter sur ses partenaires ou s’il devra compter sur son site de e-commerce récemment lancé. Sa première boutique physique ouvrira d’ailleurs dans les prochaines semaines à Paris.
Sachez néanmoins que, sur le court terme, Huawei n’est pas naïf. La marque sait que ses ventes vont baisser en 2020, même si son catalogue de produits existants compatibles Google lui permettrait de limiter les dégâts. Sur le long terme, le fabricant imagine qu’il sortira renforcée de cette histoire avec un écosystème complet.
Huawei Maps arrive
Vous le savez peut-être, Huawei s’est récemment allié à TomTom. Comme Apple il y a quelques années, la marque chinoise va lancer sa propre application de cartographie. Le futur Huawei Maps (que l’on imagine annoncé en même temps que les futurs P40) sera installé par défaut sur ses nouveaux smartphones. Reste à savoir si Huawei ne risque pas de reproduire les erreurs d’Apple, dont le logiciel n’était pas du tout au niveau à son lancement.
D’autres produits que le smartphone
Enfin, Huawei devrait lancer ces prochains mois une ribambelle de produits autres que des smartphones. Profitant de son importante notoriété en France, la marque chinoise pourrait se lancer dans différents marchés. Elle pointe d’ailleurs les incohérences des sanctions américaines qui lui interdisent de travailler avec Google… mais pas avec Microsoft. En effet, Windows étant populaire en Chine, le gouvernement américain a attribué une licence spéciale au géant de Redmond. Les PC de la marque devraient donc continuer à être proposés en France. Comme nous vous l’expliquions il y a quelques jours, le rôle de sa filiale Honor va également évoluer puisque la marque proposera des produits plus lifestyle comme des montres, des ordinateurs portables et des téléviseurs.
Vous l’avez compris, Huawei s’apprête à vivre une année mouvementée. Les grands gagnants de cette situation : les autres marques chinoises qui se réjouiraient de la place laissée vacante par leur compatriote. Mais c’est une autre histoire… que nous vous raconterons plus tard.
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