Après Orange et SFR, Free se décide à communiquer sur sa politique environnementale. Iliad, sa maison mère, a tenu ce jour une conférence de presse séduisante et huilée sur sa « stratégie climatique ». L’exercice a été l’occasion de présenter des engagements forts et des actions qui forcent le respect, non sans verser parfois dans la mauvaise foi et le greenwashing.
La neutralité carbone en 2035
Pour résumer, Iliad estime pouvoir s’approvisionner à 100% en énergies renouvelables dès cette année. Le groupe se fixe aussi et surtout pour objectif d’atteindre la neutralité carbone dès 2035 concernant ses émissions directes et en 2050 pour ses émissions indirectes, c’est-à-dire ayant lieu en-dehors de son périmètre.
La première chose qui nous est venu à l’esprit, c’est qu’Iliad allait recourir massivement à de la compensation. Cela se fait classiquement en achetant des crédits carbone. Nous n’avons même pas eu le temps de poser la question que le directeur général d’Iliad Thomas Reynaud a d’emblée écarté l’idée d’avoir recours à la compensation lors de la conférence. Un choix radical et rare dans la tech. La réduction de ses émissions devra donc être d’autant plus importante.
Des procédés innovants dans les data center
Iliad a aussi fait défiler plusieurs porte-parole représentant les diverses activités du groupe pour présenter les efforts environnementaux produits par chacun. Et l’on doit reconnaître que Free dispose de quelques solides arguments. Le plus notable concerne les innovations mises en place dans les derniers data center de sa branche cloud Scaleway.
Son président Arnaud de Bermingham a expliqué avoir réussi à développer de façon industrielle un système de refroidissement ne faisant plus du tout appel à la climatisation. Il s’agit d’un procédé adiabatique qui utilise l’air extérieur et quelques grammes d’eau pour refroidir en permanence les équipements et permet de réduire leur consommation énergétique de 40%.
Bientôt une analyse du cycle de vie des box
Concernant les box, Free fait tout son possible pour supprimer les transports aériens amenant les composants. Cela l’oblige à sécuriser ses stocks plusieurs mois à l’avance et a donc des impacts financiers. Il continue aussi à faire construire en France son matériel. L’opérateur n’est d’ailleurs pas peu fier de rappeler la longévité de sa Freebox Révolution, 10 ans au compteur et encore utilisée et recyclée dans des volumes importants aujourd’hui.
Le directeur achat et produits des box Hugues Floch a également annoncé mettre en place un AVC (Analyse du Cycle de Vie) des box. C’est une méthode d’évaluation normalisée permet de prendre en compte de multiples critères et toutes les étapes d’un produit de sa conception à sa fin de vie. Excellente initiative qui est loin d’être partagée par tous les opérateurs. La plupart se contentent de communiquer uniquement sur les performances énergétiques de leurs boîtiers. Cet AVC devrait servir à aiguiller l’éco-conception des futures box.
Comme ses concurrents, Free annonce aussi vouloir favoriser la vente de terminaux reconditionnés, lutter contre leur renouvellement anticipé et inciter à leur recyclage. Il sera possible de déposer ses vieux smartphones dans les boutiques de Free. Des mesures qui ont été imposées par le gouvernement aux opérateurs et que tous mettent actuellement en place.
La querelle des smartphones conditionnés
Là où Free se montre de mauvaise foi, c’est quand il aborde le sujet des usages numériques et de ses pratiques commerciales. Xavier Niel est venu dire tout le mal qu’il pensait du gouvernement qui ne lutterait pas contre le modèle des smartphones subventionnés qu’il est le seul à ne pas proposer. Il serait obligé de « prendre le relai » du politique « qui ne fait rien ».
Sur le fond, il a raison de dire que cela incite au renouvellement anticipé des terminaux. Mais il oublie de préciser que lorsqu’il s’est engagé dans cette bataille il y a plusieurs années, il ne se préoccupait guère de l’environnement. C’est donc une vielle querelle entre opérateurs qu’il réactualise en la justifiant par le souci de lutter contre le réchauffement climatique.
La sobriété numérique, ce n’est pas le crédo de Free
Par ailleurs, Free est le premier opérateur à avoir proposé des forfaits mobiles avec data illimitée. Et le réseau mobile ayant un impact bien plus important sur l’environnement que les réseaux fixes, cela n’est pas neutre. Mais Xavier Niel balaye ces arguments du revers de la main. « On propose de la data mobile illimitée parce que cela répond à un besoin. Ce n’est pas à nous d’imposer des limites, de censurer ou d’interdire. Free, ça veut dire liberté », a-t-il lancé avec lyrisme.
Malgré des engagements forts, le message de Free est clair : croire coûte que coûte, comme le font tous les autres opérateurs, que le numérique va sauver la planète. Quitte à faire abstraction des faits, et en particulier d’une augmentation assurée des températures dans un futur proche. Or le numérique et les télécoms devraient y prendre part de façon croissante si rien n’est fait ou pas suffisamment.
La sobriété numérique, ce n’est pas l’option défendue par Free qui ne cite d’ailleurs jamais cette expression à la mode. « Nous ne voulons pas d’une écologie punitive et décliniste », a d’ailleurs déclaré Thomas Reynaud. Le groupe Iliad va faire tout son possible pour réduire drastiquement ses propres émissions en tant qu’entreprise. Mais il compte bien continuer de courir en tête des innovations et proposer des offres commerciales alléchantes à ses abonnés pour les inciter à consommer toujours plus de données. Pas sûr que cela permette de lutter contre le réchauffement climatique.
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