Selon l’organisation à but non lucratif American Arbitration Association (AAA), 95 % des places de marché américaines estiment que les désaccords entre les entreprises vont s’amplifier. Aussi l’AAA vient de lancer, via un portail (ADR.org), le concept du Dispute Risk Management (DRM), dans le but de prévenir et résoudre ces conflits dans le secteur du commerce interentreprises.Les services de l’AAA vont du management des contentieux en ligne au partage de documents. La Commission européenne, elle, a dressé un état des lieux circonspect des places de marché dans son dernier rapport portant sur la politique de concurrence. L’abolissement des frontières induit par internet apporte nombre d’avantages, notamment en termes de transparence des prix.La Commission énumère néanmoins d’éventuels problèmes liés à la concurrence, “ sur les marchés électroniques B to B, dans la mesure où les avantages [économie de coûts, par exemple] augmenteront souvent avec le nombre d’acheteurs et de fournisseurs qui sont reliés à un même système “, stipule ce rapport.Et de citer en exemple l’affaire Volbroker, du nom d’une société commune créée par six banques (Citibank, Deutsche Bank, Goldman Sachs, JP Morgan, Royal Bank of Scotland et UBS-Warburg), offrant un service de courtage électronique de produits de change. Bruxelles a alors exigé des dispositions ” pour empêcher tout échange d’informations entre les sociétés mères et l’entreprise commune “.
Questions fiscales
À ces problèmes éventuels de concurrence s’ajoutent également les problématiques fiscales. “ Les percées technologiques ayant trait à l’e-commerce ne soulèvent pas de nouveaux enjeux, mais il est plus difficile de savoir où sont situés le cerveau central et la gestion d’une société “, précise l’Organisation de coopération et développement économiques (OCDE).En d’autres termes, il s’agit de redéfinir la notion d’établissement stable. Celle-ci est d’importance, puisque pour être soumis à l’impôt sur les bénéfices dans un pays donné, il faut y être reconnu précisément comme un établissement dit stable. Et donc déterminer, par exemple, si une place de marché créée en France dont le serveur est situé en Allemagne doit obéir aux règles fiscales établies outre-Rhin.L’OCDE a tranché en début d’année, en apportant un amendement au modèle de convention fiscale que l’organisme met à disposition de ses États membres : “ Un site web ne constitue pas un établissement stable “. Tout au moins lorsqu’il s’agit d’un simple local hébergeant un serveur. Pour être réputées ” stables “, les fonctions qui y sont exercées doivent constituer un élément essentiel de l’activité commerciale de l’entreprise.Lors de la conférence mondiale portant sur les administrations fiscales à l’ère de l’électronique, qui a réuni en juin dernier les représentants d’une centaine d’États, l’organisme a néanmoins prévenu : “ Les pays doivent continuer à se pencher sur la répartition des revenus et l’établissement des prix de transfert, car il est difficile d’attribuer des revenus à un serveur ayant un établissement stable. ” Le prix de transfert ?” les tarifs appliqués aux échanges internationaux entre des sociétés apparentées ?” est en effet sujet de controverse.
Méthodes inadaptées
François Jégard, qui a présidé l’Observatoire sur les conséquences fiscales et comptables du commerce électronique organisé par l’Ordre des experts-comptables, reprend en écho : “ Les méthodes traditionnelles sont inadaptées en ce qu’elles représentent toutes un problème d’identification de la transaction. “Si une société française vend des produits à une filiale néerlandaise, cette dernière va revendre à des entreprises dans son pays et donc dégager des résultats en Hollande. Or, les taux d’imposition ne sont pas les mêmes en France et aux Pays-Bas. Dans ce cas, quel seuil faudra-t-il fixer pour le prix de transfert pour deux sites miroirs ? Pour l’heure, la réponse est laissée à l’appréciation des directeurs financiers. “ L’administration fiscale française ne semble pas avoir établi de doctrine interne relative au commerce électronique “, regrette François Jégard.
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