Il y a un an, le web est mort. Avec les premières révélations d’Edward Snowden, le 6 juin 2013, s’est évanouie l’image d’un Internet libre qui rapproche les gens et que l’on présentait volontiers comme le nouveau progrès de l’humanité. En lieu et place, le grand public découvre, avec stupeur, un outil de surveillance planétaire où chaque personne peut être traquée, enregistrée, photographiée, filmée par le simple fait d’avoir un iPhone dans la poche.
L’impact psychologique fut immense. Quelque chose s’est cassée que les hackers et chercheurs en sécurité du monde entier cherchent maintenant désespérément à reconstruire. C’est tout l’esprit de la grande campagne intitulée « Reset the Net » qui vient de démarrer et qui fait la promotion des outils de chiffrement.
Des gouvernements en retrait
Si, indubitablement, une distance s’est désormais installée entre nous et le web, force est de constater que cette surveillance orwellienne n’a pas jeté les gens dans la rue. Au final, il n’y a eu que peu de manifestations. D’une certaine manière, c’est compréhensible : la découverte de ce Big Brother n’affecte pas directement notre vie au quotidien. La crise économique et le chômage agitent davantage les esprits. Ce qui n’est pas normal, en revanche, c’est l’attitude de nos gouvernements, français et européens. Qu’ont-ils fait depuis la mise au grand jour de cet impérialisme numérique? Rien ou presque.
Des millions de citoyens voient leurs droits les plus élémentaires bafoués – protection des données personnelles, droit à la vie privée, secret des correspondances – et les réactions officielles se limitent à quelques commentaires faussement indignés. Si la chancelière Merkel s’est finalement résolue à hausser un peu le ton suite à la découverte de l’espionnage de son portable, c’est surtout pour ne pas perdre la face. Cette inertie cache une réalité bien plus grave : la plupart des pays européens – dont la France – participent allègrement à cette surveillance à grande échelle. L’heure est à la collaboration et aux renvois d’ascenseurs. Vous ne pouvez pas espionner vos concitoyens ? Pas de problème, je vais le faire pour vous.
Chaque gouvernement, au fond, admire les capacités technologiques des agences américaines et aimerait faire pareil. C’est la grosse débandade constitutionnelle. Certains vont même jusqu’à dire que, sur le plan numérique, les états occidentaux sont devenus défaillants (« failed state »), car ils ne sont pas capables de protéger leurs concitoyens du grand siphonnage digital. Pire : ils en ont à peine la volonté.
Le business vacille
Pourtant, au milieu de ce silence assourdissant, certaines voix se sont élevées auxquelles on ne pensait pas : les patrons des géants de la high-tech. Les révélations sur PRISM et compagnie ont considérablement terni leur image. Leurs clients – particuliers ou entreprises – les voient de plus en plus comme des « collabos de la NSA ». Ce qui n’est pas bon pour le business. Depuis, ils cherchent à se présenter comme des victimes, contraints d’accepter les impératifs de la loi FISA. Ils participent également activement aux pétitions et aux actions de lobbying pour faire bouger les lignes politiques. Hacktivistes et grands patrons, main dans la main pour faire plier Big Brother ? A première vue, cette union parait contre nature, mais elle pourrait se révéler efficace. Il faut le souhaiter.
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