” Beaucoup ont estimé que la chaîne logistique propre à chacune des entreprises intervenant dans un processus de fabrication ou d’approvisionnement ferait rapidement partie d’un mécanisme pilotable de manière globale. Or, il n’en existe aucun cas concret aujourd’hui, et peut-être faudra-t-il attendre dix ans pour en voir ! “ constate Fabrice Bonneau, directeur associé de PEA Consulting. Cette ambition semblait pourtant couler de source. En effet, depuis les fournisseurs de rang “n” jusqu’au client final, la chaîne logistique doit être optimisée, afin de réduire le coût des stocks intermédiaires et de pallier les ruptures d’approvisionnement.Cette évidence avait incité les éditeurs à imaginer une gestion centralisée de cette chaîne, s’arc-boutant sur des places de marché publiques ou privées. “Cette vision s’est révélée irréaliste”, estime Emmanuel Sabourin, consultant chez i2 Technologies : “Des problèmes politiques interdisent, pour l’instant, le remplacement des solutions de chaque société par une plate-forme globale, pourtant souhaitable dans l’absolu. Et il est techniquement difficile de modéliser de façon uniforme, les contraintes d’entreprises disparates.”
Une concrétisation à long terme
“La perspective d’une optimisation globale et mutualisée n’est pas abandonnée, mais se concrétisera à plus long terme”, reconnaît Si-Mohamed Saïd, responsable marketing chargé de la chaîne logistique chez SAP. Chacun en revient à une vision plus modeste, dans le cadre d’une démarche, dite de CPFR. Encore s’agit-il d’un progrès énorme en comparaison des processus collaboratifs élémentaires actuels, comme la gestion partagée des approvisionnements au jour le jour. “Le CPFR est plus ambitieux puisqu’il vise le partage des prévisions de vente, de production, de distribution, de stockage et de livraison”, détaille Si-Mohamed Saïd.Ce serait même le seul moyen de sortir d’une impasse, selon Jean-Jacques Triboulet, responsable marketing B to B chez Oracle : “La gestion de la chaîne logistique est un marché de niches, car les outils sont complexes à mettre en ?”uvre, par rapport aux gains escomptés. Pour que ceux-ci deviennent réels, il faut revenir à des optimisations moins fines, mais avec des informations plus à jour, ce qui passe par une démarche collaborative.”Sur le terrain, le CPFR se satisfait de technologies simples. Jean-Jacques Triboulet affirme même que “de nombreuses entreprises alimentent encore leurs outils à partir de données reçues par fax ou par téléphone. Partager l’information via un navigateur Web serait déjà un grand pas en avant !” Et d’aborder un point capital : “La mise en ?”uvre de cadres d’échanges commerciaux en xML se heurte à des problèmes souvent sous-estimés d’hétérogénéité des applications.”“Malgré tout, estime Emmanuel Sabourin, il est utile et techniquement réaliste de procéder à des remontées d’informations automatiques via des flux xML.” Cette gestion communautaire que sous-tend le CPFR n’en demeure pas moins balbutiante. “Les freins ne sont pas techniques, ils sont dus aux réticences de la grande distribution”, considère Si-Mohamed Saïd. “C’est pourtant dans ce secteur que le CPFR se déploiera d’abord, car le partage d’informations entre fournisseurs et distributeurs y est essentiel”, complète Fabrice Bonneau.L’autre secteur concerné est celui du high-tech. Manugistics revendique ainsi l’un des projets les plus vastes : “Chez Cisco, les filiales, les distributeurs, les assembleurs et les vendeurs de composants dialoguent à travers une plate-forme basée sur notre technologie”, affirme Martine Gosse, directeur marketing de la société. Mais même lorsqu’il atteint les fournisseurs et clients de rangs deux ou trois, le CPFR trouve encore ses limites. “Au mieux, le partage d’informations reste limité aux couples d’acteurs”, estime Laurent Schuhmann, chargé du développement de l’activité chez i2 Technologies.Cette prudence à propos de concepts naguère montés en épingle est générale. Mais d’autres approches arrivent sur le devant de la scène. i2, Oracle ou SAP vantent ainsi les mérites de leurs modules délivrant, via une plate-forme collaborative, les informations de disponibilité des produits en stock (ATP) ou de délai de fabrication (CTP). Fabrice Bonneau est circonspect : “Bien peu d’ATP tournent car il faut les alimenter en temps réel avec des données extrêmement fiables, ce qui se révèle souvent trop complexe.”Parallèlement au CPFR, une collaboration plus globale, mais plus légère, est motivée par une nouvelle génération d’outils qui gèrent les aléas perturbant la fluidité de la chaîne logistique, mais ne tentent pas de l’optimiser. Placés sous la bannière du SCEM, ces outils interviennent aux niveaux opérationnel et exécution. “La collaboration doit alors intégrer davantage de partenaires que dans le cas du CPFR, c’est pourquoi ce concept a été peu mis en ?”uvre”, explique Jean-Michel Vergne, directeur marketing de i2. Mais, comme Oracle, cet éditeur est encore très jeune sur ce segment déjà occupé par des acteurs de niches, tel Viewlocity.
Des connexions via des interfaces simples
Ce dernier peut-il rivaliser avec i2, Oracle ou SAP, qui mettent en avant les avantages d’une offre globale ? “Nous n’avons guère besoin de dialoguer avec les outils de gestion de la chaîne logistique existants. Nous devons seulement remonter vers notre logiciel des informations sur les stocks, les commandes ou les livraisons disponibles dans les applications de production. Il s’agit de connexions via des interfaces simples”, rétorque Alain Brockmann, directeur général de Viewlocity.
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