Dix mille dollars, puis douze mille, puis dix-sept mille. Le tout en quelques jours à peine. Des pourcentages de hausse qui défient les lois de l’entendement. Les acheteurs de bitcoin de la première heure ont profité de cette envolée, parfois pour devenir milliardaires. Mais paradoxalement, elle décrédibilise le bitcoin en tant que monnaie.
1. Une volatilité hors-norme
Un rapide exemple permet de comprendre pourquoi les variations extrêmes du bitcoin le rendent parfois inutilisable. Pour cela, il suffit d’imaginer l’achat d’un iPhone X valant 0,1 bitcoin – environ 1300 euros à l’heure où nous écrivons ces lignes. En raison des limites techniques liées à une utilisation massive, les délais avant que la transaction soit effective peuvent atteindre plusieurs heures. Au moment du transfert, le débit pourrait finalement correspondre à 1200 euros – l’utilisateur serait ravi – ou à 1400 euros – Apple serait ravi.
Pour les vendeurs comme pour les acheteurs, il s’agit donc de spéculer à chaque transaction, qu’il s’agisse d’un iPhone, d’une voiture ou d’un café. Une prise de risque impensable pour des entreprises dont la rentabilité dépend de marges de l’ordre de quelques pourcents.
2. Des frais de transaction démesurés
Pour se protéger contre ces hausses et ces baisses, tous les acteurs pourraient être amenés à se couvrir, ce qui équivaut à souscrire une assurance contre la volatilité. Ce sera bientôt possible grâce à l’apparition de nouveaux outils financiers. Mais cela représente un coût supplémentaire qui sera forcément répercuté sur l’utilisateur final.
Pour cette raison, la plateforme Steam n’accepte plus le bitcoin depuis ce 6 décembre. En plus des problèmes de volatilité, l’équipe évoque une forte hausse des frais de transaction, inhérents à l’architecture du bitcoin. Pour sécuriser et valider chaque paiement, des machines doivent résoudre un calcul mathématique. Cette opération (le minage) nécessite une immense puissance de calcul et donc de gros investissements. Les mineurs sont rétribués en bitcoins, mais également en frais annexes qui dépendent de la rapidité avec laquelle ils traitent la transaction.
Depuis l’élan de folie autour du bitcoin – l’appli Coinbase est désormais la plus téléchargée sur l’App Store américain, le réseau est totalement congestionné. Face à la forte demande, les mineurs peuvent se permettre de mieux se rétribuer pour traiter les opérations. Jusqu’à 20 dollars sur Steam, soit cent fois plus que lorsque la plateforme a accepté le premier bitcoin. Une facture salée, surtout si vous vous offrez un titre vendu quelques euros.
3. Un gouffre énergétique
En accumulant des ressources informatiques les mineurs consomment de l’électricité. Beaucoup d’électricité. Début novembre, alors que le bitcoin atteignait les 7000 dollars, le minage devenait rentable jusqu’à une consommation de 24 térawatts-heure. Une quantité d’énergie qui permet d’éclairer les 186 millions d’habitants du Nigeria pendant un an.
Un mois plus tard, ce « seuil de rentabilité » monte à plus de 32 térawatt-heures, se rapprochant de la consommation annuelle de la Serbie. Au total, les transactions en bitcoin compteraient pour 0,15% de la consommation mondiale d’électricité. Une efficacité énergétique bien inférieure à celle des autres moyens de paiement.
4. Une sécurité imparfaite
L’anonymat et la sécurisation des transactions font partie des fondations du bitcoin. Sans organe centralisé pour contrôler les institutions de gestion de la crypto-monnaie, les utilisateurs doivent essentiellement se fier au bouche à oreille. Bien qu’un piratage des transactions soit peu probable, les portefeuilles virtuels ne sont pas infaillibles.
Ces dernières heures, 62 millions de dollars auraient été dérobés à la plateforme de minage NiceHash par le biais des portefeuilles de bitcoin des utilisateurs du site. En 2014, ce sont près de 750 000 bitcoins qui avaient disparu de Mt. Gox, une plateforme d’achat-vente parmi les plus utilisées à l’époque. Un butin qui serait aujourd’hui valorisé à environ 11 milliards d’euros.
5. Une généralisation difficile
Sur le devant de la scène, le bitcoin pourrait être détrôné par des concurrents, à commencer par Ethereum. D’après le dernier rapport publié par le site spécialisé CoinDesk, le bitcoin représentait moins de 50% des crypto-monnaies en circulation au mois de septembre, contre 90% au début de l’année 2017. Le chiffre a probablement évolué depuis la flambée du cours du bitcoin, mais montre toutefois que la tendance des investisseurs de longue date est à la méfiance.
Si le bitcoin est un outil techniquement pertinent pour stocker de la valeur – mais avec une immense prise de risque financière, il n’est pas outillé pour être utilisé comme moyen de paiement au quotidien et à grande échelle. Avec un maximum de sept transactions par seconde contre 24 000 pour nos bonnes vieilles cartes bancaires VISA, il ne faut pas espérer s’offrir son croissant du matin en bitcoin.
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