01 Informatique : Dans le secteur logiciel, comment conserver la masse critique vous permettant de rester sur le devant de la scène ?Chuck Phillips : Désormais, dix sociétés représentent plus de la moitié du chiffre d’affaires du logiciel et plus de 100 % des bénéfices. Pour les clients, le temps passé à évaluer les produits augmente. Aussi
tendent-ils à se concentrer sur les notions de pérennité et à graviter autour des éditeurs les plus sûrs. Cela fait partie d’un cycle. C’est tout le contraire d’il y a cinq ans : les responsables informatiques prenaient alors davantage de
risques. Le revers de la médaille est que, pour avoir acheté beaucoup de choses dont ils n’avaient pas vraiment besoin, ils se sont discrédités au sein de leurs organisations. Ils sont donc devenus bien plus conservateurs. Et, pour nous, cela
s’avère très positif, parce qu’il est clair que nous sommes là pour longtemps. Par ailleurs, il faut voir qu’une grande partie de l’innovation apportée par les petits acteurs n’a pas été trop difficile à reproduire. De sorte que les plus gros, comme
nous, ont pu les rattraper. Pourquoi acheter un produit inconnu quand on peut avoir le même chez Oracle ou SAP ? C’est la raison pour laquelle les entreprises considèrent différemment le processus de sélection. Intégrer des centaines de
produits d’origines différentes constitue une démarche sans fin. Et il n’est pas rare de voir de grandes entreprises y consacrer 30 ou 40 % de leur budget informatique. L’une des manières d’éviter ces coûts est de standardiser sur les produits
d’un nombre restreint d’acteurs. En tant qu’éditeur, si vous voulez jouer dans cette cour, il faut disposer d’un très large catalogue. Et les petits acteurs ne peuvent pas se le permettre.Sur le marché des SGBDR, quelles sont vos armes face à IBM et Microsoft ?Notre principal argument, c’est l’innovation, comme le grid aujourd’hui. Il y a des différenciateurs techniques. Par exemple, le fait de s’appuyer sur une architecture à mémoire et à disques partagés. IBM et Microsoft, de leur côté,
s’appuient sur une architecture ‘ Shared-Nothing ‘, qui ne mène nulle part en production réelle. En second lieu, l’inertie joue en notre faveur : les applications développées sur notre base sont si
nombreuses, et le nombre de professionnels formés à nos technologies si important que les clients ne souhaitent pas migrer en général. Les autres acteurs en sont à bâtir ce que nous avons déjà développé. Les formations également sont importantes, et
nous nous assurons qu’elles demeurent bien à jour sur nos produits. Alors, je dirais que nous avons un meilleur produit, et qu’IBM et Microsoft ont accusé un retard sur la base de données distribuée, qu’il leur sera difficile de rattraper. Même si
les utilisateurs souhaitent avoir le choix, le standard, c’est nous.IBM a aussitôt répondu sur le plan tarifaire à votre annonce de SGBD Standard Edition One. Allez-vous continuer cette bataille des prix ?Nous sommes très habitués aux réponses d’IBM. Ils sont obligés de réagir. Notre principal objectif, avec Standard Edition One, est d’atteindre de nouveaux marchés. Et ce n’est pas uniquement une question de tarifs. Il faut également
avoir un produit configuré spécialement, plus facile à installer et à maintenir. Standard Edition One tient sur un seul CD et s’installe en dix-sept minutes ; il comporte des fonctions d’auto-administration spécifiques pour nos partenaires
éditeurs indépendants, et nous avons beaucoup travaillé la facilité d’utilisation. Aujourd’hui, un tiers de notre chiffre d’affaires provient du solide réseau de partenaires, que nous avons depuis longtemps. C’est un secteur qui croît plus vite que
nos ventes directes.Beaucoup ont été dérangés par votre démarche concernant la proposition de rachat de Peoplesoft, qui dénonce une certaine arrogance et un problème de communication…Une fois que nous avons pu expliquer notre stratégie aux utilisateurs, ils ont tous été convaincus. Peoplesoft a dépensé beaucoup d’énergie à alarmer ses clients en leur disant que notre intention était de tuer le produit. Ce qui
n’a jamais été le cas. Mais, quoi qu’il en soit, les clients ont été alarmés. Nous les avons alors recontactés pour leur expliquer ce que nous voulions faire. Et cela s’est très bien passé. Vous savez, au final, Peoplesoft était voué à être racheté.
C’est évident si vous regardez les chiffres. Pour eux, il vaut bien mieux qu’ils soient rachetés par nous que par quelqu’un d’autre. Nous avons démontré notre capacité à acquérir des produits et à en prendre soin sur de très longues périodes. Il
suffit de se référer à l’épisode RdB. En fait, de nombreux clients de Peoplesoft nous ont fait savoir qu’ils étaient soulagés. Pour eux, le vrai risque, c’est que nous n’achetions pas la société.Pensez-vous que le marché est prêt pour le grid computing ?La question de savoir si l’on doit utiliser une grosse machine SMP ou un cluster de machines plus petites et standardisées est au c?”ur des préoccupations, poussée par la pression des prix. Tout le monde essaye de sortir de cette
logique de payer très cher d’emblée, pour favoriser un étalement des paiements. Nous sommes parvenus à un point d’inflexion. Le tout est de s’interroger sur la façon de tirer le meilleur parti de ces nouvelles architectures et de les consolider.
Nous pensons être les seuls aujourd’hui à détenir la solution.Comment assurer la stabilité de l’ensemble des composants si vous ne maîtrisez pas l’OS ?Un élément de la réponse consiste à prendre en charge une partie des couches basses, comme le clustering. Auparavant, nous utilisions les solutions des constructeurs. Désormais, il est fourni avec la base de données. Il en est de
même pour la gestion des volumes, des fichiers ou du stockage. C’est pourquoi nous voulons standardiser sur un petit nombre de systèmes d’exploitation, dont Linux en particulier. A terme, nous envisageons de proposer un système de mises à jour
automatiques pour tous nos produits de la base de données au serveur d’applications, y compris l’OS.
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