Passer au contenu

Chronique d’un développement annoncé

Mi-avril 2002, l’Autorité de régulation des télécoms (ART) a ramené les tarifs du dégroupage (location par les opérateurs concurrents de la ligne d’abonné, ou boucle locale,…

Mi-avril 2002, l’Autorité de régulation des télécoms (ART) a ramené les tarifs du dégroupage (location par les opérateurs concurrents de la ligne d’abonné, ou boucle locale, à France Telecom pour servir les clients en toute indépendance) à un niveau raisonnable. Elle a bousculé 4 idées fausses. Idée fausse 1 : les télécoms, c’est fini. La moitié des humains n’ont jamais passé un coup de fil. Le nombre d’utilisateurs de mobiles va passer de 400 millions à 1 milliard en 4 ans (5 nouveaux abonnés par seconde). Jamais aucun marché ne s’est développé si vite, si longtemps ! Quand elle choisit “d’ouvrir” la boucle locale, historique et nationale, l’ART nous le confirme : nous ne sommes qu’à mi-chemin de la croissance. L’arbre des mauvaises anticipations, la broussaille des orgies financières ne doivent pas cacher la forêt des besoins non-satisfaits. Certes, Ericsson dit avoir 20 000 employés en “surnombre” : irresponsabilité et imprévoyance vis-à-vis des salariés ! Mais cela n’empêche pas le monde d’avoir besoin, dans 5 ans, de 500 millions de mobiles et d’un milliard d’accès au net de bonne qualité.

Une concurrence nécessaire

Idée fausse 2 : la concurrence, c’est fini. Dans les chemins de fer ou l’électricité, nul ne sait si une concurrence totale est souhaitable. Alors que dans les télécoms, la concurrence a donné à l’Europe 250 millions de clients mobiles, 150 millions d’internautes réguliers, et une baisse de 70 % des tarifs téléphoniques. Sans perte chez les opérateurs historiques, à part celles engendrées par leurs erreurs. Une énorme création de richesse en résulte : plus d’un point de croissance et des centaines de milliers d’emplois ainsi créés.Idée fausse 3 : les TIC ne sont que spéculations financières et modes passagères. Le téléphone et le net sont avant tout une activité industrielle. Le marché s’est consolidé, il ne reste que deux opérateurs de services fixes notables face à France Telecom (Tele2 et Cegetel) ? C’est assez pour lancer les investissements industriels qui développeront ces marchés de demain, liés à la boucle locale. Longtemps confiée par la collectivité au seul France Telecom, elle est enfin accessible en location, pour que les concurrents fassent plus vite, plus simple, moins cher. De nouveaux industriels du réseau, comme LD Com, ou TD, font des plans de long terme. Ils font déjà oublier les paillettes spéculatives des PSI Net et autres Global Crossing. Avec sa décision, l’ART relance les industriels, pas les spéculateurs.Idée fausse 4 : l’État ne saurait plus réguler l’économie concurrentielle. Eh bien si, même en période électorale, même en fin du mandat de son président, l’Autorité respecte son contrat : ouvrir le marché au bénéfice des Français. Un peu tard pour les concurrents, toujours trop tôt pour France Telecom. Encore trop cher, disent les concurrents… Pas de commentaire de l’opérateur historique qui avouait, un mois auparavant, “faire des marges très élevées” sur l’ADSL. Donc les tarifs régulés diminueront encore, il y a du travail, mais la pompe est amorcée. En 2003, les “grands” concurrents vont entrer en force sur le marché de l’abonnement téléphonique et de l’ADSL. Des prix plus bas, des produits nouveaux, et un marché qui croît plus vite, y compris pour France Telecom. Le 16 avril, l’ART ne s’est pas contentée d’ouvrir le marché de la boucle locale. Elle a redonné du sens à la notion d’autorité indépendante. Ce faisant, elle clarifie le rôle dun État moderne face à son industrie. Intéressant, en période électorale.* Directeur général de Tele2 France

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Jean-Louis Constanza*