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Christophe Espern et Benoît Sibaud de l’April

‘ La question du logiciel libre est éminemment politique. ‘

Bonjour à toutes et à tous, nous avons le plaisir d’accueillir Christophe Espern de l’April (Association pour la promotion et la recherche en informatique libre) et Benoît Sibaud (qui remplace Frédéric Couchet) pour répondre à
toutes vos questions sur les logiciels libres.



Bonjour à tous.
Black Pearl_2 : Bonjour, ma question est la suivante : Pensez-vous qu’un jour les logiciels libres pourrons prendre le dessus sur les logiciels limités en utilisation ? Et si oui, seront-ils aussi
performants que les payants ? C’est déjà parfois le cas. Merci d’avance de votre réponse.



Il y a d’ores et déjà des domaines où le logiciel libre est majoritaire (par exemple pas d’Internet sans logiciels libres). Ce modèle se développe dans tous les domaines, en ayant commencé dans les logiciels bas niveau pour atteindre
aujourd’hui les applications utilisateur et les logiciels métiers.Pascal : Question piège : est-ce que la cohabitation logiciels libres/logiciels propriétaires est possible ou bien l’un doit systématiquement écraser l’autre ?


Actuellement, il y a coexistence entre les deux. L’important est que les utilisateurs soient informés et connaissent les restrictions imposées par les logiciels propriétaires. Libres à eux de faire leur choix ensuite, en connaissance de
cause. Cela implique notamment que la vente liée cesse…DADVSI : La multiplication des sociétés commercialisant des solutions open source, SugarCRM, Zenoss ou Groundwork open source pour ne citer que celles-là, ne menace-t-elle pas la
philosophie du libre ?



A partir du moment où ces entreprises respectent les licences libres et les communautés, elles renforcent l’écosystème du logiciel libre. L’April, parle, quant à elle, de ‘ logiciel libre ‘ car nous mettons en
valeur la philosophie du libre et les valeurs associées.winerflo : La création d’un pôle de compétitivité européen des logiciels libres est-il d’actualité ?


Un pôle de compétitivité est national. Il existe cependant des réflexions dans les institutions européennes sur la promotion du logiciel libre et la structuration de l’industrie associée.junior : L’April est réservée aux informaticiens. Les simples utilisateurs ont-ils leur place ? Vous avez combien de membres ?


Il y a actuellement plus de 600 adhérents dans l’association, personnes physiques ou personnes morales (associations, entreprises, établissements publics).


Côté personne physique, l’April compte parmi ses adhérents des personnes travaillant dans le secteur informatique bien sûr, mais aussi des juristes, des enseignants, des décideurs, etc. Côté personne morale, on trouve des associations
(groupes d’utilisateurs, associations sectorielles, etc.), un établissement public (Cité des sciences et de l’industrie) et plusieurs dizaines d’entreprises (grands groupes, éditeurs, opérateur télécom, SSLL et SSII, plus des artisans du libre). Et
nous nous félicitons de cette diversité. 😉cpm : Plus ça va, plus Microsoft est accusé de malversations, de pressions, de méthodes répréhensibles… Tout cela est-il vrai ?


Procès en cours dans divers pays, poursuites pour pratiques anticoncurrentielles, condamnation par la Commission européenne, lobbying particulièrement offensif, etc. Comme on le voit, il n’y a pas de fumée sans feu. Et je ne parle pas des
autres bras armés de Microsoft type BSA (Business Software Alliance) ou Afdel (Association française des éditeurs de logiciels).junior : Vous avez réagi sur la création possible d’une commission de déontologie sur Internet, pourquoi ?


D’une part nous sommes membre du conseil d’orientation du Forum des droits sur l’Internet (FDI) qui était mentionné dans le projet de décret ; d’autre part cette commission sera susceptible d’édicter des règles en matière de
logiciels. L’April était donc doublement concernée. Sachez d’ailleurs que ce projet est toujours d’actualité, ce qui évidemment nous inquiète et nous continuerons à intervenir.fof : N’est-ce pas jouer avec le feu que d’amener le logiciel libre dans l’arène politique (avec le site candidats.fr) ?


La question du logiciel libre est éminemment politique (au sens vie de la cité). L’April est neutre sur le plan de la politique mandataire (de partis) et travaille à l’information et la sensibilisation des responsables politiques. Le site
candidats.fr permet aux différents partis de développer leurs positions sur les sujets qui nous intéressent et qui sont de toute façon à l’ordre du jour des institutions (directive brevets
logiciels, loi DADVSI sur les droits d’auteur, référentiel général d’interopérabilité RGI, vente liée, etc.).jul : Doit-on encore simplifier les logiciels libres pour les débutants ou au contraire les laisser tels quels ?


Toute démarche visant à rendre plus ergonomiques les logiciels libres est positive. Mais qu’est-ce qu’un débutant maintenant ?zorro : En fait si je comprends bien, votre fonds de commerce concernant ‘ l’écosystème du libre ‘ est finalement la diabolisation des géants genre Microsoft ou Oracle. Croyez-vous réellement que
l’écosystème du libre permette de créer et garder des emplois en France ?



Vous comprenez mal : notre activité est citoyenne et nous n’avons pas de fonds de commerce. Nous travaillons à la recherche de l’intérêt général, à la promotion et à la défense du logiciel libre. L’écosystème autour du logiciel libre
crée effectivement de plus en plus d’emplois en France et dans le monde de manière générale.Heretik2 : Pensez vous que 01net. soit globalement plutôt utile ou néfaste pour les logiciels libres, en faisant par exemple la promotion de Windows Vista ?


La régie publicitaire de 01net. est indépendante. Quant à la ligne éditoriale, c’est aux lecteurs de juger. Nous constatons par exemple que 01 Informatique (même groupe de presse) a réalisé un
numéro collector sur le logiciel libre lors des dix ans de l’association. Autre exemple, nous sommes ici invités pour parler du logiciel libre. 01net. n’est pas un site uniquement dédié aux logiciels libres par ailleurs.Tux : D’après vous, quel candidat à l’élection présidentielle serait le plus (a priori) ‘ apte ‘ à défendre les intérêts du libre (pourquoi pas avec un retrait de la loi DADSVI) ?



Nous sommes encore en attente des réponses de plusieurs candidats (qui nous ont confirmé qu’ils allaient répondre). Une analyse sera possible lorsque toutes les réponses nous serons parvenues. candidats.fr doit permettre à chacun de
répondre à cette question.openattitudeaddictne : Pensez-vous que le logiciel libre réponde aux besoins des entreprises ? Ou ne sont-ils pas pour la plupart des logiciels ‘ faits par des développeurs pour des
développeurs ‘ ou des utilisateurs très avancés ? Ainsi soigner l’interface semble souvent être un luxe…



Le logiciel libre est développé par des professionnels dans des entreprises (ou des personnes morales de manière générale), par le secteur public, par des passionnés, etc. Il est utilisé par tous les publics (entreprises, secteur public,
grand public). Il y a déjà beaucoup de logiciels libres dans les entreprises.


La présence d’adhérents de nombreuses entreprises dans l’association montre bien qu’elles sont utilisatrices/développeuses de logiciels libres et qu’elles perçoivent comme importante l’action de l’association pour leur promotion et leur
défense.Tony : Que pensez-vous de la politique marketing de Windows Vista affirmant être l’OS révolutionnaire et de son rapport à Linux ?


Comme vous dites, c’est une politique marketing, déjà entendue plusieurs fois. Le système libre GNU/Linux (regroupant les logiciels du
projet GNU, le noyau Linux, etc.) offre une vraie liberté, ainsi que de très bonnes qualités techniques. Ce n’est pas un hasard si les migrations vers GNU/Linux se multiplient (citons par exemple le
poste de travail des députés en France). Et quand je dis ‘ une vraie liberté ‘, je pense aux quatre libertés offertes par les licences de logiciel libre et
au fait qu’il ne s’agit pas d’un système truffé de dispositifs de contrôle d’usage (informatique déloyale).jul : Peut-on vivre qu’avec du logiciel libre ? Une économie vit-elle avec seulement du logiciel libre ?


Utiliser uniquement du logiciel libre, nous le faisons et nous ne sommes pas les seuls. Nous disposons de peu d’exemples d’économie sans logiciel propriétaire (et vice-versa), l’avenir nous le dira. 😉openattitudeaddictne : Les logiciels libres comptent de très bons produits mais limités à des domaines spécifiques : système, etc. Selon vous, voyez-vous une entreprise entièrement libre d’ici à dix ans ?


Une entreprise entièrement en logiciel libre est d’ores et déjà possible aujourd’hui. Il suffit de voir les nombreuses migrations qui émaillent chaque semaine l’actualité informatique. Pour des besoins de diversité des parcs informatiques
de leurs clients ou de leurs fournisseurs, ou par exemple pour développer des logiciels libres pour des systèmes propriétaires, certaines entreprises ont encore besoin de logiciels propriétaires. Le recours systématique à des formats et protocoles
ouverts permettant une vraie interopérabilité supprime déjà un grand nombre de ces besoins. Cela implique notamment que les Administrations et le secteur public en général utilisent systématiquement des formats ouverts. Nous attendons impatiemment
la mise en ?”uvre du RGI.bobby_le_héron : Quelles sont les plus grandes menaces qui planent sur le libre aujourd’hui ?


Parmi les grandes menaces présentes ou à (re)venir : les brevets sur les logiciels, les dispositifs de contrôle d’usage, l’informatique déloyale, la vente liée/subordonnée, l’extension abusive des droits de ‘ propriété
intellectuelle ‘. D’où l’importance d’avoir une structure de défense des droits des utilisateurs. 😉junior : James Gosling (Sun Microsystems) était l’invité du précédent chat de ce site. Java en libre c’est une nouvelle que vous attendiez depuis longtemps ?


C’est une bonne nouvelle pour le logiciel libre indéniablement.junior : Une question plus personnelle : pourquoi êtes-vous impliqué dans le libre et notamment dans le monde associatif ?


J’y suis venu par la technique. J’ai pris conscience des enjeux politiques et philosophiques. Et cela vaut aussi pour Christophe Espern. Le monde associatif dans le logiciel libre en France est particulièrement développé et il était tout
naturel de s’y impliquer.Merci beaucoup Christophe et Benoît, le mot de la fin ?


L’actualité est autour des élections présidentielle et législatives via candidats.fr. Il y a par ailleurs de nombreux dossiers à promouvoir et à défendre. Tous les volontaires sont les bienvenus pour nous aider à faire avancer le logiciel
libre. Il y a par ailleurs cette semaine l’événement
Libre-en-Fête qui permet à tous de rencontrer de manière festive le logiciel libre et le partage des connaissances. Merci à tous et à bientôt.

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La rédaction