Les élus parisiens sont-ils devenus fous ? Ils croient à l’innovation technologique à l’heure où le privé et la Bourse l’abandonnent.La politique de la ville de Paris ne se fait pas à la corbeille. Si nous misons sur les technologies de l’information ?” il est vrai que les biotechnologies sont davantage à la mode actuellement ?”, c’est parce que nous croyons à leur potentiel en termes d’emploi. A long terme, Paris joue gagnant, car la demande de produits et de services reviendra. Il faut aussi préparer l’avenir de la ville, qui doit passer du pneumatique au numérique. Pour ce faire, nous recourrons aussi aux start up aujourd’hui en pépinière. C’est donc bien à l’initiative publique de les aider.De quelle manière allez-vous aider les start up ?Nous disposons du palais Brongniart [le site de la Bourse de Paris est désormais inoccupé] trente jours par an. Je rêve que des rencontres mensuelles y soient organisées avant la fin de cette année entre innovateurs, financiers et accompagnateurs. Il est indispensable de recréer un lieu d’échange entre ces acteurs de la nouvelle économie, sur le modèle des First Tuesday à l’époque. Les innovateurs de “Silicon sentier” m’ont expliqué qu’ils avaient besoin de tels échanges d’information, de se conseiller et de se concerter.La Ville de Paris vient d’ouvrir une seconde pépinière à moitié occupée. Est-il donc si difficile de trouver de jeunes pousses viables ?Non. Le premier site de la rue de Crimée est pratiquement plein. Et je prends le pari que le nouveau Cybervillage du boulevard MacDonald le sera en fin d’année. Nous proposons des bureaux très bien équipés à un prix compétitif.Paris veut “favoriser les échanges et la coopération entre les dispositifs publics et privés de la ville “. Qu’entendez-vous par là ?Si des incubateurs privés continuent de vivre, je m’en réjouis, car c’est important. Mais ce n’est pas le cas, parce que c’est une activité très risquée. Il en reste encore quelques-uns chez les industriels comme France Télécom ou l’institut Pasteur, qui aident ainsi leurs découvreurs. C’est dans ce seul cadre que des pépinières privées sont viables. Pour les autres, c’est plus difficile. Nous sommes en discussion avec Laurent Edel, de Républic Alley, pour prolonger cette activité dans leurs locaux. Notre rôle est de soutenir des actions à long terme pour que, lorsque la vague repartira, des pépinières privées se recréent.Et pour l’accueil des autres entreprises high-tech ?Nous réfléchissons à la création d’hôtels d’activité fondés sur le même modèle que les hôtels industriels que nous avons créés pour les manufacturiers. Des sociétés les occupent déjà, comme Colt dans le XIIe arrondissement, Téléhouse dans le XIe, ou Xerox, qui a quitté Saint-Ouen pour s’installer dans le XIXe. Quant aux start up que nous accompagnons depuis leurs débuts, nous ne comptons pas leur donner le biberon pendant quinze ans.Il y a Rennes-Atalante, Sophia-Antipolis, Montpellier-Méditerranée, Nancy-Brabois. Pourquoi Paris n’a-t-il pas de technopole ?Paris est en fait une technopole qui s’ignore. S’y trouvent des pôles d’enseignement, de recherche et d’entreprises de haute technologie. La ville est belle. Elle dispose d’un réseau télécoms performant, de transports et de moyens d’accès en avion ou en train. Je suis comme un cuisinier qui disposerait de tous les ingrédients, mais qui ne les aurait encore ni mélangés ni intégrés. Il faut, pour cela, que les innovateurs se rencontrent, qu’ils s’associent en réseau, et que se développent des PME performantes. Nous y travaillons avec Thierry Bruhat, qui a monté Rennes-Atalante.En tant qu’ancien ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, quel regard portez-vous sur la “nouvelle économie” ?Il existe réellement un mouvement de fond, que certains appellent la troisième révolution industrielle : celle de la numérisation et de la communication instantanée. Autour, il y a des oscillations financières, auxquelles se surajoutent des basculements boursiers. On a vu alors des projets qui n’avaient aucun sens trouver trois fois plus de financements qu’ils n’en avaient besoin. La chute était inévitable. La crise est ?” en effet ?” d’autant plus sévère que la croissance a été fulgurante. Les télécoms le prouvent.A quand la reprise ?Nous sommes à l’aube d’une nouvelle phase ascendante, qui, certes, se fait attendre. Le milieu financier est fondamentalement versatile, mais l’économie réelle est bien plus stable. Ce n’est pas l’informatique qui provoque les troubles actuels, mais les spéculateurs, qui ne peuvent plus investir dans des coups. Je suis certain qu’un jour nous reviendrons à une progression forte. Je n’ai pas d’inquiétude et j’anticipe ce retournement.
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