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Ces marques qui misent sur le bouche à oreille 2.0

Pour toucher leur cible, les marques la jouent en finesse. Elles nous font rire, nous choquent et agitent nos neurones. C’est l’internaute qui passe le mot…

Le buzz peut être défini comme un ensemble de moyens qui favorisent le développement du bouche à oreille au profit d’un produit, d’une marque ou d’un service de façon durable et efficace. La traduction littérale du terme est “ bourdonnement ”, ou même “ ramdam ” depuis mars 2010, en référence à l’information qui circule sur le mode du téléphone arabe. Si vous disposez d’un accès Internet, il est quasiment impossible de ne pas y avoir été exposé durant ces derniers mois. Pourtant la tendance n’est pas née avec le Web, loin de là. Fin août 1981, on pouvait voir sur les panneaux publicitaires de nombreuses villes françaises la photo d’une femme en bikini accompagnée du message “ Le 2 septembre, j’enlève le haut ”. Aucune mention de l’annonceur à l’origine de cette campagne, ni de précisions sur le message ou l’éventuel produit dont il est fait la promotion. Le 2 septembre en question, une nouvelle vague d’affiches présentait bel et bien le mannequin sans le haut avec cette fois-ci la promesse d’enlever le bas deux jours plus tard.

L’internaute mène la campagne

Et le 4 septembre, en plus de dévoiler les parties intimes du modèle, les nouvelles affiches ont révélé le nom de l’annonceur, Avenir, avec le slogan “ L’afficheur qui tient ses promesses ”. Cette campagne d’affichage inédite et de grande ampleur a rempli tous les objectifs que rêve d’atteindre un annonceur : créer une attente, alimenter les conversations et s’offrir une couverture médiatique nationale. Aujourd’hui enseignée et décryptée dans toutes les écoles de pub, la campagne d’Avenir a définitivement fait entrer le buzz dans la boîte à outils de base des communicants. Un outil dont s’est naturellement emparé le Web ces dernières années. S’il est toujours question de bouche à oreille, celui-ci a pris une ampleur considérable depuis que les consommateurs n’envisagent plus leur quotidien sans accès à Internet et à la multitude de canaux de communication auxquels il donne accès. Avec le Web, le buzz s’est offert une nouvelle définition, notamment celle du pape du marketing online, Seth Godin : “ Le buzz consiste à formuler les messages dans une logique épidémique, en incitant le client/consommateur à faire du marketing à la place des marques. ” Pour Godin, il s’agit de délivrer des idées “ virus ” pour transformer les récepteurs du message en évangélistes, en suivant les règles de ce qu’il appelle le “ permission marketing ”. Cette approche de la communication consiste à demander l’autorisation des personnes ciblées, le but étant d’inciter celles-ci à accepter les messages en les faisant même parfois participer à son élaboration.La campagne menée par Tipp-Ex sur YouTube illustre parfaitement cette tendance. Tournée caméra à l’épaule, la vidéo montre un campeur qui, surpris par un ours, se saisit de son fusil. Le chasseur refuse de tirer et propose à l’internaute de modifier lui-même l’histoire en imaginant différentes fins possibles. L’agence en charge de la campagne a tourné 42 suites en fonction des 42 propositions ayant le plus de chances d’être formulées. Grâce à des outils clés en main pour encourager le spectateur à diffuser le message à ses amis, la vidéo a été visionnée plus d’un million de fois en 36 heures. Et pour ceux qui doutent de l’efficacité de ce type de campagnes orchestrées via les réseaux sociaux, notez que Tipp-Ex a annoncé par la suite avoir enregistré une augmentation de 30 % des ventes du produit dont il est question ici (voir encadré). Le Français Georges Chétochine ? autre théoricien du buzz décédé en 2010 ? expliquait à ce titre que “ les valeurs se répandent et s’expriment dans les communautés. L’objectif étant qu’un élément d’une communauté puisse en polluer les membres. ” Un taux de pollution 2.0 qui se mesure au nombre de messages postés sur le mur Facebook de vos amis.

Subtilité et gros budget

La clé d’une campagne de buzz réussie réside aussi et surtout dans la qualité du contenu promotionnel créé par les agences, et donc de la créativité dont elles font preuve. Un constat que confirme Jon S. Maloy, chef de projet chez Vanksen, une agence spécialisée dans le bouche à oreille 2.0 : “ Si le financement d’une campagne de buzz reste un facteur important dans la “ médiatisation ” de cette dernière, son succès, lui, repose essentiellement sur une stratégie de moyen cohérente alliée à une créativité exacerbée. ” Citons comme exemple la campagne à gros budget orchestrée par le créateur de Lost, J. J. Abrams, pour préparer la sortie en salle de son film Super 8, cet été. Une campagne très subtile lancée bien en amont, mi-2010, et qui permettait aux internautes les plus motivés de trouver des informations sur le film en avant-première, celles-ci étant disséminées aux quatre coins du Web. Développeurs, scénaristes, experts en marketing viral, la campagne de buzz de Super 8 a mis en œuvre des moyens considérables encore jamais vus dans l’industrie du cinéma (lire notre encadré). Une stratégie intelligente à mille lieues du dernier désastre en date : un clip musical animé où l’on peut voir une chatte chantant “ Quand mon minou est tout doux, il fait miaou-miaou. Quand mon minou pique partout, il fait bouh-bouh… ”, la suite étant du même calibre une minute durant. Les internautes ne s’y sont pas trompés, et tous ou presque ont fustigé le manque de finesse des paroles, le trop plein de stéréotypes et l’image désastreuse que donnait des adolescentes la marque Veet, experte en produits d’épilation. Le mauvais accueil de la Toile a poussé l’annonceur à retirer sa campagne 48 heures après son lancement. Sans doute trompés par la simplicité apparente de ces campagnes (dans ce cas de figure, la référence à René la taupe est évidente), les artisans de ce flop n’ont pas mesuré la surenchère de créativité et d’ingéniosité dont le succès dépend désormais. Jon S. Maloy, de Vanksen, explique d’ailleurs que “ la pertinence du discours et son affinité avec la cible sont essentiels dans le démarrage d’un buzz. ” Les mauvais départs sont donc sévèrement sanctionnés par l’opinion, c’est pourquoi “ il est important de se reposer sur un relais de bloggeurs comme rampe de lancement d’une campagne ”, ajoute-t-il, ce qui permet aussi à l’agence de voir très vite si la sauce prend… ou pas. Mais le buzz, par excès de surenchères, ne va-t-il pas atteindre rapidement ses limites ? “ Le social media, le Web 2.0 et le marketing viral arrivent à peine à maturité ! ” se réjouit-on chez Vanksen. On n’a pas fini de buzzer.

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Christofer Ciminelli