Alors que le pré carré verrouillé de l’App Store est de plus en plus menacé dans son modèle actuel, une poignée de développeurs ont lancé un projet appelé Open Web Advocacy. Il veut fournir aux législateurs et aux instances de réglementations des détails techniques, qui serviront à la compréhension des enjeux actuels et permettront la préservation d’un Web ouvert.
Un article technique, intitulé Bringing Competition to Walled Gardens, visera d’ailleurs à résumer les positions de l’OWA et à donner des arguments techniques compréhensibles aussi bien aux régulateurs britanniques, où est né ce projet, qu’ailleurs dans le monde. Ses fondateurs font même appel aux bonnes volontés des net-citoyens pour les aider à contacter les législateurs concernés… Les grands changements ont toujours besoin d’une mobilisation de masse.
Des navigateurs à deux vitesses
Selon eux, le risque est de perdre une liberté essentielle qui a soutenu le développement du Web jusqu’à présent. C’est « l’intégralité du futur de la création d’application qui est en jeu », expliquent-ils sur leur site Web, ainsi que la distribution de ces applis. Le Web est en fait un espace où une appli peut être « universelle, gratuite et ouverte, écrite une fois et déployée partout ».
Or, sans changement, continuent-ils, des « écosystèmes propriétaires et des gatekeepers » (comme sont parfois appelés des géants comme Apple et Google, ndlr) pourront « garder sous leur contrôle et réduire l’innovation pour les applis mobiles pour les nombreuses années à venir ».
Pour s’attaquer à ce problème, les développeurs de l’Open Web Advocacy (OWA) commencent par demander deux choses à Apple. La première que les navigateurs tiers sur iOS puissent accéder aux mêmes fonctionnalités avancées que Safari, par exemple l’intégration d’Apple Pay, ou la possibilité pour ces browsers d’ajouter une Web App à l’interface d’iOS. La seconde est l’autorisation, par Apple, d’autres moteurs que WebKit sur iOS.
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Safari, et des « clones » techniques
En effet, pour l’instant, tous les navigateurs disponibles sur l’OS mobile d’Apple reposent sur la même base technique, contrôlée par Apple. Ouvrir cette porte permettrait à Firefox, à Chrome et autres navigateurs qui reposent sur Chromium, d’utiliser leur propre moteur de rendu, ouvrant ainsi la porte à une concurrence technique, et à plus de souplesse.
Cette question du contrôle étroit du navigateur d’iOS se pose de nouveau avec beaucoup d’acuité. En effet, dans le cadre de la défense de son App Store, Apple indique régulièrement que les Web Apps sont des alternatives pertinentes aux applications natives.
Or, de nombreux développeurs regrettent qu’Apple tarde à intégrer des innovations technologiques du Web dans son navigateur, bloquant ainsi certaines fonctionnalités et empêchant certains usages. On pense notamment à l’absence de support pour la technologie Web NFC, parmi de nombreuses autres.
Le besoin vital d’un Web ouvert et libre
Il y a donc un véritable enjeu à l’ouverture d’iOS à d’autres navigateurs ou à l’amélioration plus rapide de WebKit.
En mai 2021, Alex Russell, développeur historique de Chrome et alors en charge du projet Fugu de Google, s’inquiétait déjà des écosystèmes trop étroitement contrôlés, notamment celui de l’App Store, d’Apple. Il pointait également du doigt la main mise sur WebKit et les navigateurs disponibles sur iOS. Il regrettait vivement qu’Apple freine l’innovation, et ralentisse le Web. Pour lui, « un progrès retardé est un progrès perdu ».
Evidemment, on pourrait juger ce discours biaisé, puisque formulé à l’époque par un salarié de Google. Néanmoins, cette position n’est guère éloignée de la constatation faite par Mark Mayo en 2017. Alors senior vice-président en charge de Firefox au sein de la Fondation Mozilla, il nous faisait part de son regret de n’avoir pas saisi les changements qu’apporteraient les smartphones avec leurs App Store. Il se reprochait alors d’avoir d’une certaine manière trahit le Web libre.
Cinq ans plus tard, le Web est toujours malmené par les espaces clos que sont les applications natives distribuées par les App Store. Les développeurs à l’origine de l’Open Web Advocacy sont là pour le rappeler, et pour tenter à leur tour de changer les choses, avec notre aide…
Source : The Register
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