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CES 2013 : Project Shield et Steam Box, prémices d’un changement du jeu vidéo ?

Entre Nvidia et Valve, l’industrie du jeu vidéo a fait parler d’elle lors du CES 2013. Même si c’est à la marge, et loin de l’E3, une tendance pourrait en naître, qui éclaire un certain futur du jeu vidéo.

L’arrivée en force des smartphones et dans une moindre mesure du cloud gaming fait dire à beaucoup d’observateurs du monde du jeu vidéo que ce dernier est à un tournant. Un tournant où les consoles ne sont plus en position hégémonique et pourraient même, à termes, disparaître. Pour d’autre, c’est une sorte de terre de nouvelles opportunités, où de nouvelles expériences peuvent être tentées, de nouveaux croisements établis. C’est le cas de la console de salon Ouya, qui fonctionne sous Android et possède les caractéristiques techniques d’une tablette, à commencer par le processeur Tegra 3, de Nvidia.

Pas une console

Et justement, Nvidia a fait parler de lui lors du CES. D’une part, en présentant la nouvelle génération de son processeur ARM, le Tegra 4, avec ses quatre cœurs ARM Cortex-A15, doté d’une partie graphique équipée de 72 cœurs, donnée pour être six fois plus performantes que le Tegra 3.
Mais aussi, et d’autre part, en intégrant ce processeur dans son projet Shield. « Le Shield n’est pas une console de jeu portable », nous désarçonne d’emblée Stéphane Quentin de Nvidia France. C’est un « gaming device » dans sa version anglophone et une « tablette spécialisée », consent-il à traduire.

Une question de sémantique et d’économie

Pas une console contrairement à ce que pourrait laisser croire l’espèce de manette Xbox, un peu alourdie, que Nvidia  a greffé à l’écran. De fait, on retrouve l’ergonomie générale du gamepad de Microsoft, tant dans le design général que dans la répartition des boutons, sticks, boutons de tranche et gâchettes.

Par ailleurs, la « console » de Nvidia semble bénéficier d’une bonne finition d’après les premiers retours qu’on a pu noter.

Mais pour en revenir à l’appellation de « tablette spécialisée » et non de console, cette différence sémantique à des conséquences énormes et directes. Les consoles traditionnelles sont destinées à faire vendre des jeux. Des jeux qui rapporteront de l’argent à leur fabricant grâce à des licences.

Or, le Shield fonctionne sous Android (Jelly Bean). C’est « le pari d’un modèle contrôlé pour le matériel, mais ouvert », indique Stéphane Quentin. Ouvert, comme dans sans licence à payer pour le développement sur  le système d’exploitation. Autrement dit, Nvidia ne se fera pas d’argent en vous vendant des jeux, seulement sur son périphérique. Du coup, le Shield risque de paraître un peu cher. Sans qu’aucun prix officiel ne soit communiqué pour l’instant et que Nvidia ne souhaite communiquer sur ce point, il suffit de jeter un œil du côté les tablettes haut de gamme équipées d’une puce Tegra pour se faire une idée floue mais chiffrée : le Shield pourrait être vendu entre 300 et 400 euros.

Un changement de modèle

Clairement, Nvidia croit ici en la mutation du jeu sur Android. On pourrait même dire qu’il croit qu’Android va faire muter le jeu. L’écran tactile multipoint de 5 pouces en 720p permet de jouer à tous les jeux présents sur le Google Play Store, tous les jeux « casual », tous ces titres addictifs, qui, avouons-le, ne requièrent pas la puissance d’un Tegra 4 et l’adjonction d’une manette à l’écran tactile.

La mutation du jeu, Nvidia espère en profiter autant qu’il espère l’initier avec son nouveau processeur. Des jeux encore plus beaux, encore plus réalistes, qui prennent toute leur saveur avec des contrôles dédiés. Des jeux pour « core gamers », ou joueurs plus exigeants, sous Android. On pense notamment à Dead Trigger 2, qui arrive prochainement et est visuellement splendide.

Android mais aussi le PC

En bonne hybride, à mi chemin entre tablette et console portable, le Project Shield propose une connectique assez complète. Outre la sortie casque assez classique, on trouve un port USB (mini, a priori), une sortie HDMI (idem), et un emplacement pour une carte microSD. On ne sait en effet pas si Nvidia entend proposer un espace de stockage interne.

Elle embarque en revanche un module Wi-Fi pour se connecter à Internet. Une prochaine génération, équipée d’un Tegra 5, qui inclurait un modem 3G/4G LTE pourrait y adjoindre un autre type de connexion. Mais le Wi-Fi suffit pour que le Shield abatte son dernier atout. A la manière du Wii U Gamepad, qui permet de jouer télévision éteinte sur son écran, la (non-)console de Nvidia utilisera sa connexion sans fil pour streamer et jouer à un jeu en cours d’exécution sur un PC (via Steam dans un premier temps). Ainsi, pour peu que le PC soit équipé d’une carte Nvidia équipée d’une puce Kepler (GTX 650 au moins) et du logiciel GeForce Experience, il sera possible de jouer à portée de Wi-Fi aux jeux de son PC sur une plate-forme mobile… Une fois encore, une question de licence, de plate-forme « ouverte ».

Steam Box, le PC de gamers arrive dans le salon

Une approche qui éclaire d’un jour intéressant l’autre événement du CES concernant le jeu : la Steam Box. Confirmée mais invisible jusqu’à présent, la « console » de Valve, à qui on doit Half Life, Left 4 Dead ou encore Team Fortress, a soudain pris davantage des airs de réalité.
Valve et le fabricant de mini-PC Xi3 ont annoncé que le premier avait investi dans le second dans le cadre d’une « nouvelle étape dans le développement des ordinateurs de jeu ». Mieux, un prototype de la Steam Box, nom de code Piston, qui utilise actuellement le châssis d’un des mini PC préexistants, est visible sur les stands de Valve et de Xi3.
Pour l’instant, aucune information sur la configuration n’a été communiquée, on sait seulement que l’objectif de ce PConsole est de tirer le meilleur parti possible des grands écrans des téléviseurs HD et qu’il pourrait être animé par une distribution Linux – ce qui pourrait être logique vu l’intérêt de Valve pour l’OS libre ces derniers temps. De plus, le mode Big Picture, disponible sur PC depuis quelques semaines, ne marquait que les prémices de cette arrivée en force de nos jeux PC sur nos téléviseurs avec une interface dédiée.

Une nouvelle voie ?

Dans ce cas, une fois encore, derrière la volonté de Valve d’assurer la pérennité de Steam et un nouveau débouché à son modèle économique, c’est une porte sans licence qui est ouverte aux développeurs. Valve a une longue histoire avec les développeurs indépendants, toujours très présents sur Steam. Alors, au-delà de la question des enjeux technologiques, du cloud gaming, de la dématérialisation, etc., cette tendance de la  suppression du ticket d’entrée pour accéder à une plate-forme pourrait être une tendance, une tendance qu’Android renforce toujours plus, une tendance que le jeu sur PC sous-tend. Ce n’est pas ça qui nous apportera l’Episode 3 d’Half Life 2, mais en tant que joueur, cela laisse entr’apercevoir une redistribution des cartes et du potentiel créatif des développeurs.

On dessine alors les contours d’un univers qui se reconstitue, se crée, un espace rêvé, avec une place centrale pour les utilisateurs-consommateurs, via l’acte d’achat à petit prix ou la mise de fond de départ, avec des services comme Kickstarter…

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Pierre Fontaine