Le langage internet est quasiment devenu la langue officielle dans les couloirs du siège turinois du groupe Fiat. Sous l’impulsion de Paolo Fresco, ex-numéro 2 de General Electric (l’un des modèles américains en matière d’adoption de l’économie en réseau), le premier groupe industriel et automobile transalpin ne se lasse pas de diversifier ses activités dans les services, et plus particulièrement ceux associés à internet. Son bras armé est la division Business Solutions, une entité lancée en novembre dernier et qui génère déjà la bagatelle d’1,8 milliard d’euros (11,8 milliards de francs) de chiffre d’affaires, dont 80 % par le biais de sociétés internes au groupe. L’objectif est de porter le revenu du fer de lance internet de Fiat à 3 milliards d’euros sous trois ans.
Attirer l’attention sur la nouvelle stratégie de Fiat
L’affaire prend aujourd’hui de l’ampleur grâce à une société commune créée récemment avec IBM. Officialisé le lundi 21 mai, ce partenariat a pour vocation de vendre les applications, développées au sein de Fiat pour la conception et la fabrication d’automobiles, à d’autres entreprises. Avec un rayon d’action limité, dans un premier temps, au territoire italien, les deux partenaires visent un chiffre d’affaires de 700 millions d’euros, qui augmentera d’autant le volume d’activité déjà généré par Business Solutions. Sous réserve de l’approbation des autorités européennes de la concurrence, l’opération devrait véritablement voir le jour en juillet prochain. Pour Carlo Gatto, administrateur délégué de Business Solutions, cette co-entreprise signe le véritable point de départ pour la division, car elle devrait déboucher sur un accroissement réel du portefeuille de clientèle. Autre objectif, davantage lié à une opération de communication : attirer l’attention sur la transformation de la société et sa volonté de s’ouvrir à l’économie en réseau.À l’image d’autres groupes automobiles, Fiat souhaite diversifier ses sources de revenus et compenser la baisse des marges sur son métier traditionnel. C’est, d’ailleurs, la mission qui a été confiée à Paolo Fresco lorsqu’il a pris en main la conduite opérationnelle du groupe, voilà deux ans et demi. Initiée en novembre dernier grâce à des accords de partenariats avec KPMG Consulting, Cap Gemini Ernst & Young et Oracle, Business Solutions couvre un vaste champ. Ses domaines d’intervention vont de l’externalisation de la gestion des ressources humaines à celle de l’administration, en passant par des pres- tations de consultation au sein des entreprises clientes, la gestion du parc immobilier d’entreprises ou encore les services d’intérêt public.Surtout, dans le domaine de l’approvisionnement, Fiat a créé sa propre plateforme d’achat ?” en e-procurement ?” Fast Buyers. Une entité évi- demment placée sous la coupe de Business Solutions. D’ici à la fin de l’année, elle devrait englober les achats de matériaux auxiliaires et de matières premières ainsi que les services, pour un volume total estimé à environ 2 milliards d’euros.
Devenir un fournisseur d’applications à part entière
L’objectif des pères fondateurs de la division immatérielle de Fiat est simple : répondre systématiquement par l’affirmative aux diverses exigences des clients de Business Solutions, qu’ils soient issus du groupe ou de l’extérieur. “Actuellement, les dix-huit sociétés regroupées au sein de cette nouvelle division gèrent environ 240 000 fiches de paie et administrent pas moins de 70 000 ordinateurs “, indique Carlo Gatto avec une grosse pointe d’orgueil. Il ajoute même : “Nous comptabilisons à ce jour 600 000 journées de formation et nous servons environ 2 000 sociétés.” En fait, Fiat souhaite devenir un prestataire de services et un fournisseur d’applications à part entière. Ni plus, ni moins. “Notre prochain objectif est de nous positionner au premier rang sur ce marché, déclare Carlo Gatto, car nous estimons que ce secteur est en pleine expansion. “La philosophie des dirigeants de Business Solutions repose sur trois piliers fondamentaux : l’utilisation des nouvelles technologies dans le domaine des activités traditionnelles, le développement des activités de vente en ligne et le développement du groupe sur des marchés émergents comme la Pologne, l’Inde ou le Brésil, aux côtés de son activité traditionnelle qu’est l’automobile.
À terme, le groupe pourrait se retirer de l’automobile
L’entretien ou le renforcement des liens avec des partenaires de ce secteur fait également partie des possibilités. Ce pourrait être le cas avec l’Américain General Motors (GM), qui détient déjà 20 % du capital de Fiat Auto, et qui développe lui aussi des compétences logicielles. Par ailleurs, GM est partie prenante de Covisint, plateforme d’achat qui vient d’accueillir PSA.Les efforts déployés par Fiat pour se diversifier dans le secteur des services participent en fait d’un plan beaucoup plus large qu’il n’y paraît. Il pourrait même conduire la maison mère à se désengager complètement, à terme, de l’automobile. En effet, lors de la prise de participation de GM, le groupe américain avait négocié une option pour prendre la totalité du capital. Une option qui, pour l’heure, ne devrait pas se concrétiser, si l’on en croit les déclarations récentes de Gianni Agnelli, président honoraire du groupe italien. En attendant cet éventuel tournant historique, le groupe turinois va poursuivre son expansion dans les services. Ces derniers devront apporter entre 30 et 40 % du chiffre d’affaires d’ici à 2005.
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