L’affaire était entendue : Schlumberger serait le seul et unique candidat au rachat de Bull CP8, la division cartes à puce du constructeur national. Tous les ténors du secteur étaient pourtant sur les rangs : Gemplus, Oberthur Card Systems, mais aussi l’Allemand Giesecke & Devrient, numéro quatre mondial. “Nous étions très intéressés, mais nous n’avons pas pu formuler d’offre officielle, car Bull et J. P. Morgan ont d’emblée accordé l’exclusivité à Schlumberger “, rapporte ainsi un porte-parole de Giesecke & Devrient.Pour emporter la mise, Schlumberger a profité de la puissance financière de sa maison mère. En face, les Français Gemplus et Oberthur n’hésitent d’ailleurs pas à railler les 2,3 milliards de francs mis sur la table. Un montant important, qui démontre le dynamisme d’un marché encore jeune, où les acteurs courent après la taille critique à coups de fusions-acquisitions (la conclusion de la transaction reste toutefois suspendue à l’accord des autorités de plusieurs pays européens).Schlumberger qui s’était laissé distancer par Gemplus, complète son portefeuille de produits en mettant la main sur le savoir-faire de Bull dans la carte à puce bancaire. Cette acquisition doit d’abord lui permettre de pénétrer le monde clos des cartes bancaires. En effet, comme le souligne Andrew Philips, analyste chez DataQuest, “Schlumberger réalise encore la majorité de ses ventes dans les cartes à puce pour téléphones mobiles “. Sur le papier, Bull CP8 dispose d’une bonne expérience de développement de logiciels bancaires. Ses systèmes d’exploitation, qu’il revendait à ses concurrents, équipent les cartes bancaires françaises et le porte-monnaie électronique Proton, déployé à quarante millions d’unités dans vingt et un pays. Mais, dans la pratique, cet héritage bancaire s’effritait. Surtout à l’international, où les banques de plus d’une dizaine de pays ont adopté le standard international EMV. Par contraste, le masque pour la carte bancaire B0′ développé par Bull CP8 reste une affaire franco-française.Schlumberger se trouve désormais en pole position face à son rival de toujours Gemplus, pour accompagner une migration qui fera appel à un masque hybride B0’/EMV, sur lequel les équipes de R&D de Bull CP8 travaillaient déjà activement. En effet, avec 37,6 millions de cartes distribuées en 1999, dont 31,3 millions utilisables à l’international, la France reste le principal marché pour les cartes bancaires à puce. Elle offre donc une formidable vitrine pour convaincre de son savoir-faire les banques étrangères.Parallèlement, Bull CP8, qui équipe les cartes Sesam Vitale, fait entrer Schlumberger sur le marché de la santé. Schlumberger avait déjà remporté l’appel d’offres pour la Carte professionnel santé (CPS). Son déploiement est d’ailleurs l’un des rares projets à interfacer à grande échelle une carte à puce avec une infrastructure à clés publiques. Domaine qui constituait, par ailleurs, l’une des grandes lacunes de l’offre de Bull CP8.
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