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Bouygues Telecom face à une alternative pour sortir de l’impasse

Un mariage de raison avec Free ou la continuation en solo avec gestion serrée des coûts: telle est l’alternative pour l’opérateur, isolé dans le mobile et le fixe.

Tous les regards seront tournés vers Bouygues Telecom, demain jeudi 15 mai 2014, jour de publication de ses résultats au premier trimestre 2014, alors que les syndicats redoutent une vague de suppression d’emplois.

Des rumeurs, non-confirmées, font état de 1500 à 2000 emplois possiblement supprimés chez l’opérateur. Un comité central d’établissement est programmé le même jour au siège de l’entreprise à Issy-les-Moulineaux avec pour ordre du jour, des “informations générales“.

L’échec de la reprise de SFR, qui aurait fait de Bouygues, le numéro 2 incontesté du marché français, a fait ressortir l’impasse stratégique dans laquelle se trouve la filiale télécoms.

L’opérateur ne s’est pas remis de la guerre des prix sur les mobiles

Isolée, dépourvue d’un réseau fixe national propice aux offres de dégroupage ADSL, la filiale télécoms du groupe de BTP est talonnée par Free en nombre d’abonnés mobiles (11 millions contre 8 millions début 2014).

Et, si l’opérateur engrange avec succès des abonnés sur B&You, ceux-ci lui rapportent beaucoup moins en raison des prix bas pratiqués. Même la 4G, censée faire remonter les prix, est incluse dans le forfait sans engagement à 19,99 euros/mois, alors qu’il dispose du réseau 4G à la couverture géographique la plus étendue en métropole.

Bouygues Telecom reste l’opérateur qui souffre le plus de la guerre des prix sur les forfaits entamée par Free en 2012. Il a vu son chiffre d’affaires baisser en 2013 (- 11 %) et son résultat net (11 millions d’euros) réduit à la portion congrue.

Sa récente offensive sur l’ADSL à prix cassés, destinée à contrer Free, aurait eu des résultats mitigés. « Bouygues Telecom a fait un vrai pari sur le fixe, estimant qu’il gagnerait en volume ce qu’il est perdrait en valeur. S’il y a bien eu afflux de clients, ceux-ci n’ont pas compensé l’effet baisse de prix » estime Virginie Lazès, directrice associée de la banque d’affaires Bryan, Garnier & Co.

Free : un mariage de raison mais à quel prix ?

Le scénario le plus “logique” voudrait que Bouygues Telecom et Iliad s’allient. Les deux sociétés se sont approchées de près pour envisager l’hypothèse, avortée, d’une cession du réseau mobile de Bouygues à Free.

« L’un dispose d’un réseau mobile 4G disposant de la meilleure couverture, l’autre a bâti son réseau fixe propice au dégroupage ADSL et à l’évolution vers le très haut débit. Stratégiquement, un rapprochement ferait sens » soutient Virginie Lazès.

Le groupe de BTP préférerait une alliance entre égaux avec Iliad mais cela reste du domaine du voeu pieu, compte tenu des différences de valorisation entre les deux sociétés.

«  Bouygues fera tout pour faire monter les enchères. Sa filiale reste une belle société forte de 11 millions de clients mobiles et de 2 millions de client fixes. Il peut viser une valorisation élévée, sans pourtant atteindre 10 milliards d’euros » soutenait récemment François Chaulet, directeur associé de Montségur Finance.

Pour Xavier Niel, à condition qu’il y mette le prix, une fusion avec Bouygues serait tout bénéfice. Il reviendrait au centre du jeu en récupérant 11 millions d’abonnés et un réseau mobile 4G. Sur le plan concurrentiel, Bouygues et Iliad réunis seraient de taille à affronter les deux mastodontes que sont Orange et l’ensemble Numericable et SFR.

Reste l’épineuse question du risque social pour les salariés de Bouygues. Pour certains analystes, tel Tangi Le Liboux, du courtier Aurel BCG, les rumeurs actuelles de baisse des effectifs peuvent aussi « être une façon d’habiller la mariée en vue d’un rachat par le quatrième opérateur français, Free Mobile ».

Devenir opérateur low cost et développer sa clientèle mobile

« La meilleure façon de négocier ultérieurement avec Free en position de force, c’est de montrer qu’il peut continuer tout seul sur le marché. Le groupe Bouygues a les moyens de financer le repositionnement de sa filiale télécoms » explique Virginie Lazès de Bryan Garnier & Co.

Il se dit que le groupe de BTP regarderait de près le rachat de Virgin Mobile, premier opérateur virtuel de France, que son actionnaire principal angalis veut céder. Son 1,7 million d’abonnés viendrait grossir le parc de clients dans un secteur où il est nécessaire d’amortir ses coûts fixes d’infrastructures sur le plus grand nombre.

« Dans un marché à quatre opérateurs, nous savons que nous devons continuer à diminuer nos coûts et à innover fortement » avait déclaré Martin Bouygues quelques jours après l’échec de sa reprise de SFR, en avril 2014. Son accord de mutualisation d’antennes-radio avec SFR participe directement à cette logique.

Le succès croissant de B&You, qui comptait au 31 décembre 2013, plus de 2 millions d’abonnés, dessinerait-il les contours du futur Bouygues Telecom ? Des offres simplifiées et moins nombreuses, qui plus est vendues par le web, impliquent pour l’opérateur qu’il mettent en pratique une manière plus efficiente de fonctionner.

Alourdi par ses coûts de structure (siège social, centre d’appels,….), Bouygues Telecom, pour se transformer en opérateur low cost, devra alléger ses effectifs de manière drastique. D’où, les rumeurs actuelles de plan social.

D’autres scénarios (rachat par un opérateur étranger, alliance avec Orange) pourraient aussi resurgir dans un contexte de marché hexagonal, marqué par les rebondissements et les imprévus…

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Frédéric Bergé