Huit internautes sur dix préparent leurs achats sur le Web, qu’ils se concluent en ligne ou en magasin, révèle le dernier baromètre des comportements d’achats des internautes, publié en juin dernier par la Fevad (Fédération du e-commerce et de la vente à distance), à partir d’un sondage auprès de 3 270 personnes. Qu’y cherchent-ils ? Les deux tiers consultent les fiches des produits et presque autant prennent connaissance des avis rédigés par les consommateurs. Cette version numérique du bouche-à-oreille rencontre un tel succès que tous les sites marchands proposent aux consommateurs de laisser leurs commentaires, et les y incitent même. Un moyen efficace pour inspirer confiance au cyberacheteur qui y trouve son compte : la consultation des avis lui permet de vérifier la qualité de fabrication d’une chaîne hi-fi, l’intérêt d’un jeu vidéo ou encore la taille d’un vêtement.
Une dérive préoccupante
Une chance pour le consommateur ? Pas forcément. Le secrétaire d’Etat à la Consommation, Frédéric Lefebvre, a lancé un pavé dans la mare, lors de sa visite du centre de surveillance du commerce électronique de la DGCCRF, à Morlaix, le 21 janvier. Entre autres mesures, il a demandé une enquête sur les faux avis de consommateurs, “ une dérive préoccupante ”, selon lui. Des entreprises rédigent, ou font rédiger par des sociétés spécialistes de ces pratiques, de faux commentaires pour vanter leurs produits et services auprès des consommateurs. On soigne soi-même sa notoriété, à un détail près : “ se présenter faussement comme un consommateur ” est illégal, c’est l’une des pratiques commerciales trompeuses que répertorie l’article 121.1 du Code de la consommation. Mais quelle est l’étendue de ce phénomène pour que le Gouvernement s’en empare ? Impossible d’avoir une estimation. Il est vrai qu’un consommateur a peu de raisons de porter plainte. Une entreprise concurrente, elle, en a déjà plus, surtout quand le faux avis fonctionne dans les deux sens : encenser ses produits, dénigrer la concurrence. “ Nous n’avons eu aucune plainte, indique Marie Taillard, responsable de la communication de la DGCCRF, mais un faisceau d’indices nous indique que le phénomène est susceptible de prendre de l’ampleur ”. La Fevad attend les conclusions de l’enquête de la DGCCRF avant de tirer les siennes. Et précise que, toujours selon son dernier baromètre, désormais deux internautes sur trois donnent leur avis sur le Web : “ Dans la masse, certains sont peut-être faux. ”
Le secteur du tourisme est le plus concerné
Erwan Seznec, journaliste spécialiste du sujet depuis plusieurs années pour le magazine UFC-Que choisir, explique : “ On trouve beaucoup de messages douteux, mais tout dépend des sites. Plus les sites sont généralistes, moins ils sont exposés aux faux avis de consommateurs. ” Le secteur le plus concerné serait celui de l’hôtellerie. “ Il y a tout et n’importe quoi ”, confirme Erwan Seznec. Ce n’est pas un hasard, le tourisme étant la première catégorie d’achats en ligne. La DGCCRF a d’ailleurs pour mission d’enquêter sur le fonctionnement des services en ligne de réservations hôtelières. Les produits high-tech n’arrivent qu’en troisième position, derrière les services (dont la billetterie, les tirages photos et les abonnements). Le phénomène concerne aussi les forums et les blogs, sous différentes formes (lire l’encadré). Comme le champ d’action de la Répression des fraudes se restreint aux sites commerciaux, ils sont a priori exclus de l’enquête en cours.Restent deux questions cruciales : comment déterminer qu’un avis est un faux et comment vérifier l’identité de son auteur ? La DGCCRF n’a pas souhaité répondre. Un détail révélateur permet toutefois de séparer le bon grain de l’ivraie : le faux avis pèche souvent par excès. Trop enthousiaste, trop élogieux, trop assassin, il inspire naturellement la méfiance. Quant à découvrir qui se cache derrière, la seule piste sérieuse est de vérifier les adresses IP à partir desquelles les avis sont postés, ce qui suppose la collaboration des sites. Et comme, en plus, il existe des moyens de déguiser son adresse IP, ce n’est pas gagné. Le rapport de la DGCCRF est attendu pour la fin du premier semestre.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.