Mercredi 19 juin, 17 heures, Vincent Bolloré salue les neuf sages du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) qui l’attendent au 17e étage de la Tour Mirabeau. Candidat très motivé à la télévision numérique terrestre (TNT), le célèbre financier breton est venu présenter ses projets cathodiques au président du CSA, Dominique Baudis. D’emblée, il rappelle que son groupe diversifié est venu “dans le secteur de la communication par croyance et non par intérêt”. Précision utile d’un homme à l’origine de spectaculaires raids financiers sur Bouygues et Pathé en 1998…Contrairement aux PDG de TF1 et de M6, Patrick Le Lay et Nicolas de Tavernost, qui ont réaffirmé lors de leurs auditions leur opposition au projet, Bolloré se dit convaincu que la nouvelle offre télévisuelle promise par le numérique terrestre (33 chaînes dont 15 gratuites) est nécessaire “aux vingt millions de Français qui ne disposent que des 5 chaînes généralistes hertziennes.” Très vite, il cède la parole à Philippe Labro, “un ami” dont il a fait son conseiller média et le président de sa future chaîne généraliste Direct 8, candidate à une fréquence. L’ancien patron de RTL se livre à un vibrant plaidoyer pour une télévision “live”, ouverte à la promotion de jeunes talents, “ces visages inconnus”, qui constitueront l’équipe de la chaîne candidate. Une chose est sûre, la future chaîne pourra compter sur des synergies avec les actifs médias de l’industriel.Si Vincent Bolloré est retenu pour diffuser Direct 8, il utilisera en effet les ressources techniques d’Euromedia, société de production dont il détient 20 % du capital, ainsi que l’expertise en production audiovisuelle de la SFP, qu’il a acquise en compagnie d’Euromedia en octobre 2001. De même, le cinéma Mac Mahon, lui aussi propriété du groupe, servira de studio de télévision aux équipes de Direct 8. De cette façon, la chaîne pourra “tourner” avec un budget de 30 millions d’euros par an et espérer un retour sur investissement au bout de sept ans. Autre actif de Vincent Bolloré, la filiale IER, spécialisée dans les composants électroniques, pourrait, elle, produire des décodeurs pour la TNT, “des décodeurs simples et distribués gratuitement, ou [des produits] plus évolués et payants, permettant d’exploiter l’interactivité.”
Le choix de la diversification
Pour nourrir ses grandes ambitions audiovisuelles, Vincent Bolloré ne joue pas que la carte de la TNT. À l’heure où la plupart des télés web rendent l’âme, faute de modèle économique viable (Canal Web, Progress Image, etc.), l’homme d’affaires breton fait son marché. Ainsi, s’est-il invité, en avril 2001, au capital de Streampower, un prestataire de diffusion audiovisuel par internet (lire ci-contre). Objectif : relancer la jeune pousse en élargissant son offre à des activités plus rentables. Streampower, qui se cantonnait jusque-là à la diffusion d’assemblées générales en streaming, devient ainsi producteur délégué aux nouveaux médias pour le compte de l’omniprésente société de production Endemol, à l’origine notamment de Loft Story et de Star Academy. Un contrat qui, fort du succès de l’opération menée pour la deuxième saison du Loft, vient d’être reconduit, afin de préparer le dispositif de Star Academy 2, qui sera diffusé sur TF1. Parallèlement, Dominique Delport, PDG de Sreampower, termine le tour de table d’une nouvelle filiale de Bolloré Media, spécialisée cette fois dans la diffusion et la production de contenu en streaming. Une nouvelle diversification pour l’homme d’affaires breton. Mais pas la dernière, car il s’attaque également au paysage radiophonique. Toujours conseillé par Philippe Labro, il a présenté fin avril au CSA un dossier pour l’attribution des futures fréquences AM (ondes moyennes), afin de diffuser un programme radio en numérique. Parallèlement, ses lieutenants peaufinent l’inauguration de la Maison du cinéma de Vaucresson, censé attirer les jeunes talents du septième art. Un vivier pour Vincent Bolloré, qui a récemment racheté 7 % de Gaumont, et dont l’appétit pour les médias, quels qu’ils soient, semble décidément insatiable…
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