Pas facile de lancer une nouvelle banque, même si, comme la Société Générale, on la rehausse du qualificatif “post-internet”, tout en la baptisant Nabab. Mais attention aux apparences : derrière ces appellations un brin exotiques se cache un objectif audacieux : atteindre un seuil de rentabilité opérationnelle à la fin 2002, grâce à “une clientèle haut de gamme de particuliers”, relativement jeune (à partir de 30 ans), “financièrement avisée”, mais également “nomade, créative et exigeante”. En résumé, un public trop jeune et trop ” pauvre ” pour intéresser les grandes banques patrimoniales,et trop prometteur pour que Nabab le laisse filer à la concurrence… Un public qu’apparemment la Société Générale ne réussit pas à capter aujourd’hui dans son réseau traditionnel.Car les rôles semblent clairement définis. Les deux enseignes assurent que ” Nabab ne s’adossera pas au fonds de commerce de la Société Générale. Elle se contentera d’acquérir une clientèle propre “. Avec un capital de départ limité à 6 millions d’euros (soit 39,4 millions de francs) à peine.
Une banque dans la banque
Pour séduire sa population cible, Nabab s’appuie exclusivement sur une gamme de produits d’épargne ” sophistiqués “, à savoir des fonds de placement sélectionnés sur le marché (et pas seulement auprès de la Société Générale), des produits structurés à capital garanti ou protégé, de l’assurance-vie et un service d’aide et de conseil aux détenteurs de stock-options. Pas de prêts, ni de comptes courants, ni même de cartes de débit ou de crédit. Uniquement des produits de placement sécurisés au maximum, pour garantir la sérénité du client. ” Nous adoptons clairement la position d’une deuxième banque pour nos nababs “, reconnaît Laurent Joly, directeur général adjoint.Et si cette nouvelle population recherche absolument une première banque, il suffira de l’aiguiller vers la Société Générale. De même, si ces jeunes prometteurs souhaitent que leur patrimoine fasse l’objet d’une gestion sous mandat discrétionnaire, il leur sera conseillé de ne pas s’attarder chez Nabab. La banque informe et propose, le client dispose. Un processus qui se déroule soit dans un espace conseil privé, soit par téléphone ou, surtout, par l’intermédiaire du web. Car Nabab affirme vouloir ” s’adapter au rythme de vie de ses clients ” et, pour ce faire, privilégie un système de distribution multicanal. “ La place d’internet n’est pas du tout secondaire dans notre approche du client, estime Laurent Joly. C’est l’outil de travail de nos nababs. Un canal de distribution [dès la fin du mois, NDLR] et d’information incontournable, mais ils ont aussi envie de contact humain.” C’est peut-être cela, la banque post-internet. ” Nous ne sommes pas une e-banque “, lâche d’ailleurs Laurent Joly. Sans doute. Mais le choix de la cible ne relève pas du hasard : il y a des clients à prendre et beaucoup d’argent à récolter dans la galaxie web…
Une concurrence très féroce
La concurrence se fait féroce dans le petit monde de la banque en ligne (ING Direct, Banque Directe, Ebanking, Bipop, etc.) avec, en filigrane, la question du caractère soutenable des modèles économiques en lice : une banque 100 % internet, comme Zebank, est-elle viable ? Faut- il au contraire s’adosser à une banque ” en dur ” ?Après la propagation de diverses rumeurs sur l’état catastrophique du recrutement de Zebank, Olivier de Montety, président du directoire, a fini par réagir en indiquant que “ le rythme de recrutement actuel nous conduirait à 21 000 clients à la fin de l’année. Mais l’objectif reste d’atteindre 60 000 clients à cette même échéance grâce à un accroissement du taux de recrutement. ” Un objectif qui a déjà nécessité l’injection de 9,9 millions d’euros de capital supplémentaire dans l’entreprise, injection réalisée en avril par les deux actionnaires de Zebank, le groupe Arnault et Dexia. Selon Olivier de Montety, cette opération ne signifie pas qu’il y ait péril en la demeure. ” Au 31 décembre, nous avions consommé un tiers des fonds propres “, indique-t-il, sans toutefois préciser l’impact du premier trimestre.
Consultation à distance en augmentation
Pas question, en tout cas, de modifier le modèle de Zebank et donc de s’appuyer sur un réseau physique permanent destiné à conseiller le client ou à gérer des opérations financières. ” Nous irons à la rencontre du public, tous les mois jusqu’à la fin de l’année dans le cadre d’actions commerciales comme le train de l’internet. Mais constituer un réseau physique serait une négation de notre modèle économique. ” Si le plan d’affaires actuel se confirme, Zebank atteindra le point d’équilibre avec près de 250 000 clients entre 2003 et 2004. Pour l’heure, ces déclarations relèvent évidemment de la profession de foi.À l’inverse de celles émanant de la Société Générale, très fière d’annoncer que le taux d’utilisation des canaux de gestion bancaire à distance (serveurs vocaux, plateformes de téléconseillers, Minitel, internet, messages d’alerte sur téléphones portables, télévision interactive et WAP) ne cesse d’augmenter.À la fin du mois d’avril, le site Societegenerale.fr ne recensait pas moins de 332 025 utilisateurs effectifs et près de 5,5 millions de connexions depuis le 1er janvier 2001. Quant au Crédit du Nord, autre filiale de la Société Générale, il avouait 52 713 utilisateurs effectifs et un million de connexions depuis la même date.
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