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Avec son casque de réalité mixte, Apple va devoir convaincre (et ce n’est pas gagné)

Malgré des « démos Fight Club » et des années de développement, le casque de réalité mixte d’Apple peinerait à convaincre en interne et manquerait d’arguments pour séduire ou au moins initier la conversion du grand public à cette technologie. Et ce n’est pas une bonne nouvelle pour le futur.

L’Apple Park a des faux airs de prairie vallonnée, recouverte d’herbes folles, d’arbres, fruitiers pour certains – il n’est pas dit s’il s’agit de pommiers – et, bien sûr, le vaisseau-mère, seigneur des anneaux, y trône en majesté. Niché dans la verdure, au bout de sentiers goudronnés serpentins, le Steve Jobs Theater est à l’abri des regards, discret. Ce qui est paradoxal, puisque que c’est là que les keynotes d’Apple sont généralement organisées, là aussi que les réunions internes importantes sont tenues. C’était le cas, la semaine dernière, à en croire Mark Gurman. Une centaine de hauts gradés de la société californienne, baptisé le « Top 100 », y aurait été réuni pour voir le futur : le casque de réalité mixte.

Convaincre… en interne

Des démonstrations auraient été organisées pour faire un point sur ce produit charnière, et pour convaincre. Ce n’est toutefois pas la première fois que ce casque est présenté à cette population triée sur le volet. Ces hauts responsables auraient eu droit à une présentation annuelle des progrès du produit depuis 2018. Des réunions surnommées « Fight Club demos », selon le journaliste de Bloomberg, en référence au livre et film, dont chacun connaît la première règle, « ne pas parler du Fight Club ».
Toutefois, cette nouvelle démonstration revêt une autre ampleur : c’est sans doute la dernière, celle qui donne le signal qu’Apple entre dans la dernière ligne droite avant le lancement du produit au mois de juin prochain, à l’occasion de la WWDC.

Car, repoussé et repoussé encore, le casque de réalité mixte d’Apple devrait enfin abandonner son statut d’arlésienne de la tech. Et tout n’est pas rose, car tous les salariés d’Apple ne paraissent pas totalement séduits. Certains s’inquiètent tout d’abord du positionnement tarifaire. Si les rumeurs et indiscrétions disent vrai, le Reality Pro, si c’est bien son nom, pourrait coûter environ 3 000 dollars. Un prix exorbitant dans un contexte de tension économique. Un prix démesuré au regard de ce que pratique la concurrence également.

Siri, à la hauteur ?

Par ailleurs, selon le New York Times, certains des salariés attachés au projet l’ont tout simplement quitté, car ils doutaient très fortement du potentiel de l’appareil. À l’inverse, mais pas forcément plus encourageant, d’autres salariés ont été licenciés à cause du manque de progrès réalisés sur certains aspects du casque. Notamment un des points essentiels, Siri.
Dans ce nouveau produit, l’assistant vocal d’Apple devrait prendre une place prépondérante dans l’interaction avec les interfaces et applications intégrées. Or, on sait tous qu’il a parfois des moments lunaires, où il n’est clairement pas à la hauteur de la tâche.
Pour prendre un autre produit où il joue un rôle central, le HomePod, on imagine assez bien les ratés qu’on pourrait rencontrer avec un casque de réalité mixte contrôlé par Siri. Entre les commandes incomprises, les longueurs dans la réaction ou tout simplement les limites fonctionnelles, il est clair que l’assistant d’Apple a intérêt à muscler son jeu pour être un bon compagnon de route dans un produit nouveau et coûteux.

« Mais pour quoi faire ? »

Mais les doutes chez les salariés du géant californien vont plus loin encore. Certains dirigeants de la société ont émis des doutes sur le potentiel d’un tel produit. Or, le casque de réalité mixte d’Apple est attendu par beaucoup d’analystes comme le messie. Pour beaucoup, c’est son arrivée qui pourrait enfin faire décoller la réalité virtuelle grand public. Or, en règle générale, Apple arrive sur un marché constitué, mais qui manque d’un petit quelque chose – de la touche Apple ? En l’occurrence, on peut autant s’interroger sur la maturité technologique– elle serait ici synonyme d’un coût minime pour une expérience de bonne qualité – que sur les usages potentiels avérés pour le grand public. Autrement dit, y a-t-il une killer app pour justifier ce prix, pour valider l’achat ? Apple aurait travaillé à faire de son casque l’arme parfaite pour les visioconférences ou la consultation de contenus spécifiques, et éventuellement le travail bureautique mixte, où le bureau s’étend dans la virtualité. Mais sera-ce suffisant ? Les sources internes de Bloomberg et du New York Times s’interrogent et doutent. Il va falloir qu’Apple arrive à convaincre ses utilisateurs de sauter le pas de la réalité mixte.

C’est son destin ?

Et la tâche ne sera pas simple. Car, les experts du marché, comme les dirigeants d’Apple, semblent convaincus d’une chose : le casque de réalité mixte n’est qu’une étape dans une quête au long cours. Celle qui va préparer l’avènement de l’après-smartphone, que certains imaginent prendre la forme de lunettes de réalité augmentée. Dans cette optique, aussi bons que seront ce Reality Pro et ses successeurs (Reality One et autres, qui devraient être bien plus puissants et sortir dans les deux prochaines années), ils ne seraient finalement que la matérialisation d’un processus de R&D à ciel ouvert. En définitive, comme dans un grand tournoi de poker, pour profiter un jour de lunettes de réalité augmentée vraiment utiles, il va falloir payer pour voir.

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Source : The New York Times


Pierre FONTAINE
Votre opinion
  1. C’est un pari perdu d’avance… cela n’intéresse personne.

    Porter un casque est un énorme inconvénient! Quand cela sera des lunettes de moins de 80gr, on en reparlera…

  2. Pour ma part je suis ce casque avec intérêt mais on ne sait quasiment rien de lui. Le casque ne m’intéresse pas en tant que tel, c’est son usage qui m’intéresse et si je ne sais pas ce qu’il fait je ne peut pas me projeter dans un usage. Donc wait and see.

    1. Si tu ne sais pas toi-même à quoi il pourrait te servir, c’est que tu n’en as nullement besoin. Il ne répond pas à un besoin et à un tarif élevé, avec un gros inconvénient, ne pourra pas en créer un.
      Il restera dans la catégorie gadget hors de prix.

  3. “Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides”
    Henry Ford

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