La Commission européenne tire la sonnette d’alarme. Elle s’est inquiétée du retard pris dans la numérisation des films européens, dont un million d’heures dormiraient toujours dans les archives. Actuellement, seul 1,5% du patrimoine cinématographique européen serait accessible au public, que ce soit de manière gratuite ou payante.
Il y a donc le risque qu’une partie du cinéma échappe définitivement aux générations futures. Selon Mme Neelie Kroes, vice-présidente de la Commission européenne, « il est ridicule que notre patrimoine cinématographique ne soit pas visible au XXIe siècle. La culture est au cœur de l’Europe, et le cinéma est au cœur de la culture. Je suis déterminée à mettre cet héritage cinématographique en ligne, et je ferai en 2013 une proposition pour aider les États membres et les milieux concernés à unir leurs forces dans ce but. »
Une transition technologique mal préparée
Le problème lié au patrimoine cinématographique n’est pas nouveau et, comme l’explique une étude réalisée fin 2011, il est provoqué par le passage au numérique de l’industrie du cinéma. En effet, dans quelques années, toute la chaîne de fabrication et de distribution sera totalement numérique, de la prise de vue à la projection. Les technologies analogiques vont progressivement disparaître.
Il deviendra donc de plus en plus difficile de visionner les vieux films, voire même de les numériser car, dans une industrie 100 % numérique, les technologies et les compétences liées à la numérisation sont également vouées à disparaître. Les quelques « îlots analogiques » qui subsisteront ne pourront pas assurer un accès de masse et durable aux vieux films. La seule solution, c’est donc de les numériser le plus vite possible.
Le hic, c’est que l’industrie du cinéma européenne n’est pas capable de réaliser cette tâche. Aux Etats-Unis, les studios se sont lancés depuis quelques années dans une numérisation massive de leurs catalogues, avec l’aide de mécènes et de fondations privées. Mais en Europe, « le manque de fonds publics et privés et la complexité des procédures d’autorisation des droits » font obstacles, comme le souligne la Commission. Pour elle, seuls le Royaume-Uni et la Suède fournissent des efforts notables. La recommandation de la Commission adoptée en 2006 sur « la numérisation et l’accessibilité en ligne du matériel culturel » est donc, globalement, restée lettre morte. Rien n’a vraiment bougé.
En France, seul le CNC est réellement actif
Même en France, berceau de l’exception culturelle, il est difficile d’intéresser le secteur privé à ce problème. Du coup, c’est le CNC qui met la main à la pâte (et au portefeuille), en débloquant en mai dernier un budget de 100 millions d’euros pour numériser 10 000 vieux films français. Ce qui correspond à environ 10 % de la totalité des Archives françaises du film. C’est bien, mais pas suffisant.
De son côté, la Commission européenne envisage des mesures législatives pour 2014 sur le droit d’auteur, pour faciliter le processus de numérisation et de conservation. Elle mise également sur des négociations multipartites pour favoriser la création de vastes catalogues en ligne. Mais en Europe, les discussions durent toujours très longtemps…
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