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Aux États-Unis, la guerre est déclarée entre cinémas et studios… qui commencent à préférer la VOD

Après les excellents résultats de son film « Trolls : World Tour » en vidéo à la demande, Universal a décidé de sortir ses films en simultané dans les cinémas et sur Internet. Mais le géant des salles obscures AMC menace de les boycotter.

Le confinement général va-t-il faire basculer le monde du cinéma vers un modèle fondé sur le streaming ? Aux États-Unis, la guerre entre les salles de cinéma et les studios vient en tout cas d’être déclarée. Comme le rapporte le New York Times, Universal Pictures s’est vanté des résultats de son dernier film Trolls : World Tour sorti en vidéo à la demande (VOD). Le studio affirme que le succès du film en streaming sera un tournant pour leur modèle commercial. Au regard des performances en ligne du dessin-animé, Universal envisage désormais de sortir en même temps ses films en streaming et en salles. 

https://twitter.com/destinationcine/status/1255414377970388993

Un boycott des films d’Universal dans les cinémas

Pour l’entreprise AMC Theaters, le plus grand réseau de cinémas du monde, cette affirmation est une déclaration de guerre. Adam Aron, son directeur général, a rétorqué dans la foulée à Universal qu’il ne réserverait plus de films signés par le studio. La menace de boycott est lourde de conséquences. La maison Universal produit les films ultra populaires tels que Jurassic World, Fast and Furious et Moi, moche et méchant.

« Avec cette décision de diffuser simultanément en ligne et dans les salles de cinéma, Universal rompt le modèle d’affaires et les relations entre nos deux entreprises », écrit Adam Aron dans une lettre adressée à Donna Langley, présidente du studio. « Il suppose que nous accepterons calmement une vision remodelée de la façon dont les studios et les cinémas devraient interagir, sans aucune préoccupation de la part d’Universal quant à la façon dont ses actes nous affectent. » Adam Aron a insisté en déclarant que le plan d’Universal était « catégoriquement inacceptable » et qu’AMC boycotterait également tout autre studio qui « envisage un changement global du statu quo ».

Depuis des décennies, la chronologie des médias, c’est-dire le parcours d’une oeuvre cinématographique, aux États-Unis est la même. Première étape : les films sortent d’abord dans les salles, pour une durée de minimum 90 jours avec dérogation ou 4 mois. Puis, ils arrivent dans à la maison par VOD. Dans le même temps, les oeuvres deviennent disponibles en DVD ou Blu-ray. En France, les délais sont similaires mais l’encadrement législatif penche clairement en faveur des salles de cinéma.

Des assauts multipliés jusqu’alors repoussés

Les grands réseaux de cinémas américains dont AMC, Regal ou encore Cinemark, ont jusqu’à présent résisté aux assauts des plates-formes visant à raccourcir la période d’exclusivité. Si les salles obscures perdent l’exclusivité, il est à craindre que les spectateurs hésitent (encore plus) à acheter des places puisqu’il n’y aura qu’à attendre quelques semaines (ou jours) pour le regarder sur leur téléviseur ou leur écran iPad.

Derrière la réforme du modèle commercial, l’enjeu économique est de taille. Aux États-Unis, les studios conservent environ 80 % des revenus de la VOD. Sur le prix d’une place de cinéma, les studios ne reçoivent qu’environ 50 % du ticket.

5 millions de streamers 

Si les tensions sont latentes entre studios, salles et plates-formes VOD, la publication des très bons chiffres du dessin-animé Trolls : World Tour a mis le feu aux poudres. Programmé initialement en salle le 10 avril aux États-Unis, le studio l’a mis finalement en mis en vente à la location en ligne à un tarif de 20 dollars ! Environ cinq millions de personnes ont jusqu’à présent loué Trolls : World Tour. Des résultats qui ont « dépassé » toutes leurs attentes. 

En réaction, Universal a déclaré qu’elle était « déçue ». « Nous nous attendons à ce que les futurs films soient diffusés directement dans les salles de cinéma, ainsi que sur VOD, dès lors que ce point de distribution est logique », explique le studio dans un communiqué. « Nous avons hâte d’avoir d’autres conversations privées avec nos partenaires exploitants. »

Alors que plus de la moitié de l’humanité est confinée, les plates-formes gagnent du terrain aussi dans le paysage des récompenses cinématographiques. Pour la première fois, l’Académie des Oscars, comme les Golden Globes avant elle, ont annoncé que pour leurs prochaines éditions en 2021, les films exclusivement sortis en ligne pourront concourir. 

Source : The New York Times 

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Marion SIMON-RAINAUD