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Pourquoi l’Europe veut tuer les voitures hybrides rechargeables

Face à des émissions 3,5 fois plus élevées que ce qu’elles annonçaient sur le papier, les voitures hybrides rechargeables sont dans le viseur de l’Europe. Pour les faire tomber de leur piédestal, l’UE compte les mettre à nu, en commençant par montrer leur vrai visage, avec une norme antipollution qui impliquera une nouvelle méthode de calcul de leurs émissions.

Sur le papier, l’hybride rechargeable est une solution maline, pour ne pas réveiller le moteur thermique, lors de trajets courts et urbains. Les PHEV, comme ils sont plus généralement appelés par les marques, sont une transition progressive vers le 100 % électrique, à l’heure où les batteries lithium-ion ne sont pas assez performantes pour effectuer de longs trajets d’une traite.

Malheureusement, dans la réalité des faits, la motorisation à la croisée des chemins de l’industrie automobile a plutôt été adoptée pour échapper au malus écologique, sur des modèles équipés de grosse cylindrée, et d’une morphologie leur faisant dépasser les deux tonnes, comme les SUV. Les sociétés en ont été friandes, pour remplacer leur flotte tout en profitant des avantages pas toujours mérités.

Les normes de calcul des émissions de CO2 des PHEV montrent toute l’hypocrisie derrière les modèles. Leurs consommations sont en moyenne 3,5 fois plus élevées dans la réalité comparée à la théorie. Si ce n’est plus, car pour limiter les consommations, faut-il encore jouer le jeu et recharger la batterie, tout en empruntant autre chose que des autoroutes et des voies rapides. Autrement, ces hybrides équipés de plusieurs dizaines, voire centaines de kilos de batterie, ne fonctionnent qu’à l’aide de leur moteur thermique.

Toyota 2012 Prius Phev
La Toyota Prius de 2012, première hybride rechargeable © Toyota

Un malus écologique pour les PHEV (hybrides rechargeables)

Avec la migration des aides des PHEV vers les électriques, l’industrie de l’hybride rechargeable a régressé. ll y a deux ans déjà, sa part de marché reculait de 9,4 à 7,7 %. Entre 2024 et 2023, les ventes ont chuté de 12 %. En 2025, il n’est même plus question de la fin des aides, mais plutôt de l’arrivée d’un malus, puisque l’Union européenne cherche à revoir la méthode de calcul des émissions des PHEV, et ainsi les faire dépasser du côté des voitures concernées par le malus.

Depuis le 1er janvier 2025, nous sommes effectivement passés sous la nouvelle norme Euro 6e-bis, qui qui vise à rendre les tests d’homologation plus représentatifs de l’utilisation réelle des véhicules, et ce, particulièrement pour les hybrides rechargeables. Les tests d’homologation passent de 800 km à 2 200 km de distance au total, et le spectre des températures est élargi, allant désormais de 0°C à 35°C en conditions normales, et jusqu’à 38°C en conditions extrêmes.

Conséquence, les émissions des PHEV pourraient au moins doubler, et pour certains d’entre eux, dépasser les plafonds d’émissions de CO2, ce qui rime avec l’ajout d’un malus écologique. Les modèles concernés ne sont, pour l’heure, que ceux qui sortiront après ce 1er janvier 2025, mais les modèles plus anciens n’ont qu’une seule année de sursis, avant que leurs nouveaux exemplaires neufs ne soient concernés.

Porsche Panamera 2024 Presentation
En parallèle à ses Macan électrique et Taycan, Porsche propose toujours des hybrides rechargeables, comme la nouvelle Panamera et ses 96 km d’autonomie en 100 % électrique © 01net

La difficulté ne fera qu’augmenter pour les constructeurs qui se risqueraient à commercialiser des hybrides rechargeables, puisqu’en 2027, la norme évoluera encore (norme Euro 6e-bis-FCM), avec la mise en place de tests sur une distance de 4 260 km. À ce moment-là, en supposant que le plafond de limite des émissions de CO2 soit celui attendu (118 g/km de CO2), alors la plupart des PHEV d’aujourd’hui verront leur prix impacté par un malus écologique.

Nous pouvons deviner d’ici que les constructeurs chercheront à davantage proposer des PHEV équipés de grosses batteries et de plus petits moteurs thermiques, tout comme chercheront-ils à limiter le poids des autos, et donc regarder ailleurs que sur le segment des SUV. Car en France, la restriction des émissions se cumulera à celle de la masse : depuis le 1er janvier, avec un abattement de 200 kg, les hybrides rechargeables peuvent aussi être soumises au malus au poids 2025.

Un horizon qui s’obscurcit par la réglementation CAFE et la fin du thermique

Au-delà des émissions, et du respect des normes antipollution, les constructeurs sont aussi à l’épreuve d’une nouvelle réglementation, baptisée CAFE (Corporate Average Fuel Economy). Celle-ci impose de nouveaux objectifs de consommation de carburant moyenne pour leur flotte de véhicule, et donc d’atteindre des niveaux spécifiques pour l’ensemble de leurs véhicules vendus. Sans surprise, cela impactera grandement les constructeurs qui ne proposent pas que de l’électrique.

Tesla l’a d’ailleurs remarqué, avec une augmentation de ses ventes en crédits carbone, auprès de groupes comme Stellantis. Celui qui décidait de s’émanciper de l’achat de ces crédits carbone en 2021 doit s’y pencher de nouveau aujourd’hui, tout comme Toyota et Ford. Volkswagen aurait recours, de son côté, à des constructeurs chinois, tout comme Renault avec Geely. Des contrats très chers, mais toujours plus économiques que les lourdes amendes que prépare l’Europe. Volkswagen, par exemple, pourrait encourir 1,5 milliard d’euros de pénalités rien qu’en 2025.

Une situation qui a poussé la Commission européenne à réfléchir, et faire preuve d’un peu plus de flexibilité, et de « pragmatisme », comme le mentionnait sa présidente, Ursula von der Leyen. Ces amendes n’auraient pour effet que de fragiliser l’industrie, à l’heure où les concurrents chinois n’ont pas toutes ces barrières, mise à part celle des frais douaniers pour exporter vers l’Europe leurs modèles électriques.

Xpeng Voiture Prolongateur Autonomie
Chez les constructeurs chinois, les voitures électriques à prolongateur d’autonomie ont surpassé les hybrides rechageables © Xpeng

Ursula von der Leyen a aussi récemment lancé un dialogue stratégique sur l’avenir de l’industrie automobile et du « Green Deal » alors que l’arrêt total du thermique en 2035 fait naître de plus en plus de contestation chez les constructeurs. Parmi eux, Mercedes, dont le lobbyiste Eckart von Klaeden estime que l’avenir de l’industrie doit être déterminé « par le marché ». Pour cela, il militait pour l’autorisation après 2035 de « produits respectueux du climat », tels que « les hybrides rechargeables et les prolongateurs d’autonomie ».

En parallèle aux PHEV, l’industrie automobile parle effectivement de plus en plus de prolongateurs d’autonomie. Le concept, plutôt que d’utiliser le moteur thermique d’une hybride pour alimenter les roues, ce dernier vient alimenter un générateur, pour recharger la batterie du moteur électrique. Le principe est né du constat que l’autonomie en électrique des hybrides rechargeables dépasse facilement les 100 kilomètres, et que le thermique pourrait devenir secondaire, plutôt que l’inverse.

Malheureusement, la technologie a fait l’objet d’une plus grande attention en Chine qu’en Europe, alors que des constructeurs comme Xpeng, Nio ou encore Zeekr et BYD s’en sont très vite emparés. D’une autonomie de 430 kilomètres en cycle CLTC, celle-ci passerait à 1 430 kilomètres, avec un prolongateur d’autonomie, installé sur son grand SUV G9 et sa berline P7, dans un premier temps. Cerise sur le gâteau, le moteur thermique ne produirait qu’un décibel de bruit de fonctionnement, de quoi garantir l’un des grands agréments de l’électrique : son confort d’utilisation.

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