” Oui à la rationalisation des activités internet, mais sans que cela implique une dégradation du produit d’information “, proclame Laurent-Éric Lelay, président d’Eurosport Entreprises et patron des sites web de la chaîne sportive. Trahis par les marchés financiers et abandonnés par les annonceurs, les grands groupes média veulent rentabiliser au plus vite leurs investissements internet.Une urgence qui s’est traduite par la fusion, cette semaine, de la chaîne sportive de TF1.fr avec le site Eurosport. fr. Au-delà des évidentes synergies d’audience, cet accord est, pour Eurosport, un premier signe de réussite de sa politique d’intégration multimédia. Pour Laurent-Eric Lelay, fils du président du groupe TF1, propriétaire d’Eurosport, “l’époque des business unit internet est définitivement révolue. Leur structure de coût est excessive “.En conséquence, les chaînes de télévision doivent regrouper leurs activités audiovisuelle et web sous une même direction. Mais Laurent-Eric Lelay d’ajouter : “ Les restructurations doivent aboutir à une valorisation en interne des compétences marketing et technologiques développées dans ces filiales. “Aux États-Unis, toutes les grandes chaînes ont procédé à une telle réorganisation. Dernière en date, celle de CBS Network, qui a regroupé ses sites CBS.com et CBSnews.com sous la direction de ses activités télé. Une tendance soulignée en février 2001 par Forrester Research, qui encourage tous les médias à valoriser leur activités en ligne sur ce modèle. Mais pour être créatrice de valeur, la reprise en main des filiales internet par la maison mère suppose une nouvelle organisation sur le plan éditorial.Pour Eurosport, le Paris Dakar 2001 a été l’occasion de faire une première démonstration grandeur nature de sa capacité à combiner l’image et le texte, à la télévision et sur internet. Pour rendre possible ce chassé-croisé numérique, les rédactions du groupe s’appuient sur un système informatique baptisé Netsport. Un investissement de quelque 1,83 million d’euros (12 millions de francs) qui fournit une base de production éditoriale commune aux sept sites web et à la chaîne d’information en continu Eurosport News.Pour Stefano Bernabino, responsable éditorial des sites du groupe, c’est la concrétisation opérationnelle de ce qu’on appelle la convergence : “ La production de l’information ?” pour l’antenne, les news et internet ?” est intégrée “, explique-t-il. De fait, les cinquante journalistes de la rédaction en ligne ont désormais la responsabilité de l’édition de leur page web. Ils la pilotent entièrement, supprimant le process d’édition des médias traditionnels.Le texte saisi est visualisable dans sa mise en page définitive avant sa publication. C’est le journaliste-rédacteur qui choisit l’ensemble des éléments d’illustration (sons, visuels, etc.). Il peut également quitter le clavier pour se saisir d’un micro et faire des commentaires en direct. Chaque article est saisi dans des grilles, avant d’être découpé en ” tranches “, qui vont du plus petit au plus grand format, pour être redistribué soit sur des terminaux mobiles, soit sur des écrans de la taille d’un ordinateur.Car l’intégration des contenus s’effectue en aval, selon le mode de diffusion. Ainsi, les textes défilant sur l’antenne d’Eurosport News sont produits par la rédaction internet, tout comme l’information disponible sur les téléphones portables et assistants numériques.” Avec notre plateforme multimédia, nous poursuivons un double objectif de qualité et de rentabilité. À coût constant, on enrichit les pages internet et les programmes de la chaîne par une mise en commun de leur contenu. D’autre part, la multiplication des médias permet d’amortir plus facilement la structure de fabrication sportive. En unifiant cette structure, on arrive à un coût d’exploitation marginal très faible “, explique Laurent-Eric Lelay.Pourtant le rêve de convergence n’est pas sans limite. Les programmes de la chaîne Eurosport, qui couvre en direct les événements sportifs, n’ont pas été encore intégrés à la plateforme multimédia. “ Le fait est qu’à terme, nous pourrions les diffuser en web TV. Mais cela n’a aucun sens économique. La télévision par internet coûte encore trop cher. En revanche, le cadre du “news” est adapté à des produits audiovisuels que l’on peut associer à l’écrit “, précise encore le président d’Eurosport Entreprises. À cet égard, le cadrage des prises de vue a changé pour une meilleure diffusion sur le web : pour ses interviews, Eurosport News ne réalise plus que des gros plans.Autre rêve impossible : le brassage des équipes de rédaction télé et internet. Il semble que l’on ne ” pourra jamais les intégrer complètement “, explique-t-on, en substance, chez Eurosport. Les spécificités humaines, surtout lorsqu’il s’agit de groupes, ont la vie dure. Dans un premier temps, toutes les rédactions internet ?” une équipe de cinq à dix journalistes par site national, Eurosport diffusant en six langues sur le net ?” sont hébergées sur un plateau unique, au troisième étage du siège, à Issy-les-Moulineaux, en région parisienne. Seul le site allemand ?” la première déclinaison locale d’Eurosport.com à avoir été lancée, en août 2000 ?” a été délocalisé outre-Rhin.
La bande annonce pour naviguer
Pour l’heure, le groupe d’information sportive veut promouvoir sa plateforme multimédia auprès du grand public grâce à une campagne de bandes annonces diffusées à l’antenne à l’occasion d’événements sportifs. ” Une chaîne de sport est soumise à une programmation qui évolue en permanence en fonction de l’événement sportif. Pour que le public s’y retrouve, les bandes annonces ont un rôle fondamental de guide. Désormais, elles sont aussi utilisées comme outil de navigation multimédia entre le web et la télévision “, explique Maria-Leena Clarke, chargée de la communication des activités internet.Cette activité de production est réalisée en interne par une équipe dédiée de quinze personnes. Après l’intégration de la production et de la diffusion, l’offre multimédia d’Eurosport doit créer des synergies en termes de fréquentation. ” Ce n’est que dans le cadre d’un système d’information multisupport qu’internet peut dégager, pour une marque, des ressources financières supplémentaires “, explique Laurent-Eric Lelay.En la matière, toutes les idées sont bonnes à prendre. Le web permet au téléspectateur d’une course cycliste de suggérer au commentateur des questions à poser aux athlètes. Idem pour les retransmissions en différé d’événements dont la chaîne ne possédait pas les droits de diffusion en direct. Pour la Coupe du monde de ski, le réseau des réseaux a permis aux passionnés de consulter, durant les heures de bureau, les résultats et les commentaires heure par heure.Une mesure de séduction ?” ou de “ teasing ” ?” qui favorise l’augmentation de l’audience. Pour Eurosport, l’intégration du web et de la télévision vise donc à optimiser la gestion de la complémentarité des deux vecteurs de communication.Le groupe Eurosport, avec 242,5 millions d’euros de chiffre d’affaires, est réputé rentable. Fondue dans l’ensemble, la division internet sera désormais intégrée aux bénéfices de l’ensemble… ou à ses pertes.
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