Tandis que Madelin fait campagne en envoyant des SMS (on lui conseille de lire Le guide des abréviations SMS/texto de Robert Laffont, où il apprendra à bien gérer sa limite de 120 signes. Exemple : “Put1, j V m fR viré du 1er tour”) ; tandis que Mamère et Chevènement se prononcent tous les deux contre la brevetabilité des logiciels, et que Jospin ” chatte ” sur Wanadoo en battant le record du nombre de connexions jusqu’alors détenu par Loana, cyber-Chirac, lui, offre des entretiens au Nouvel Hebdo et fête internet dans une boîte de nuit à Aubervilliers. En 1995, il avait basé toute sa campagne sous la bannière d’un magnifique slogan : la fracture sociale. Cet écart entre les riches et les pauvres faisait mal à la France, mais Docteur Chirac, un de nos meilleurs chirurgiens-plasticiens, avait diagnostiqué le mal et comptait s’atteler à réparer tout ça. Résultat : élu. Sept ans plus tard, exit le social (il faut croire que c’est réparé) et bienvenue à la fracture numérique. Qu’est-ce que c’est ? Juste l’ultramoderne sollicitude du président-candidat envers cette majorité de Français virtuellement à la traîne, dans la mesure où ils considèrent qu’un ordinateur domestique est toujours trop cher pour eux. En fait, il y a pas mal de chances que la fracture numérique recoupe assez exactement la fracture sociale de 1995, mais, dit en ces termes, cela paraît beaucoup plus chic et neuf. Car Chirac, qu’on se le tienne pour dit, est moderne. Qu’elles sont loin ces désastreuses images où on le voyait tapoter une souris d’un air dubitatif. Aujourd’hui, le président va au cul des ordinateurs comme il va au cul des vaches, et peut vous causer “mégabits” et “haut débit” comme un webmaster. On a appris qu’il surfait sur le réseau, où il suit le championnat de sumo et fréquente les sites australiens consacrés aux arts premiers. Une conception assez ludique d’internet, donc. Chirac échange-t-il des mails avec George Bush ? Réserve-t-il ses billets d’avion par internet, même si le web n’est pas un outil conseillé pour le paiement en liquide ? Allons, ça va, ne taquinez pas le Président. N’oubliez quand même pas quil a 69 ans révolus.* Journaliste et essayiste
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