Passer au contenu

Atterrissage délicat pour la messagerie unifiée

Promise à un bel avenir, la messagerie unifiée rencontre encore peu de succès auprès des entreprises. Difficile et onéreuse à mettre en ?”uvre, elle réduit néanmoins considérablement certains coûts de communication.

Bombardé de messages électroniques, d’appels téléphoniques et de télécopies, l’employé moderne a bien du mal à faire le tri et à assurer la cohérence des informations entre ses multiples périphériques de communication.À force, cette multiplication des canaux est même devenue une gêne. 42% des cadres interrogés par le cabinet d’études Pelorus estiment en effet être dérangés toutes les 10 minutes par des messages, téléphoniques notamment, qui ne sont pourtant pas prioritaires sur les tâches qu’ils sont en train d’accomplir.Mais difficile de le savoir avant d’avoir pris l’appel ! Souvent en déplacement, le salarié mobile rencontre également des difficultés à être informé dès qu’un appel urgent arrive au bureau.

Un seul point d’entrée pour une meilleure cohérence et une gestion des informations

La messagerie unifiée devait précisément apporter une réponse à tous ces problèmes en offrant un seul point d’entrée pour tous les modes de communication : quel que soit le périphérique utilisé, l’utilisateur doit pouvoir lire ou écouter ses différents messages.Pour l’employé mobile, cela signifie la possibilité de recevoir une alerte SMS (Short Message Service) sur son téléphone portable à chaque fois qu’un appel important arrive sur son téléphone fixe au bureau, ou encore de consulter sa boîte vocale et sa boîte aux lettres à partir de son mobile. Des technologies dites de text to speech permettent en effet de convertir des messages écrits en messages audio et de dicter des informations à son téléphone portable, qui seront ensuite converties en télécopie ou en courrier électronique.L’employé “fixe”, quant à lui, est en mesure de rediriger ses appels téléphoniques sur sa boîte aux lettres en profitant, au passage, du fonctionnement asynchrone. Il peut ainsi ne prendre que les appels réellement urgents et traiter les autres ultérieurement, une fois son travail accompli. Dans les 2 cas, la messagerie unifiée signifie un seul carnet d’adresses et un unique agenda automatiquement synchronisés sur tous les périphériques, de façon à éviter les incohérences et autres mises à jour récurrentes.À ces arguments en faveur de la messagerie unifiée, il faut encore ajouter l’aspect temporel. Une enquête menée par le Wall Street Journal a en effet démontré qu’un employé recevait en moyenne 200 messages par jour. Et d’en conclure qu’aujourd’hui, une partie considérable de la plage horaire de chaque salarié est consacrée à la gestion de sa communication, ce qui équivaut à autant de temps perdu pour traiter les véritables tâches à valeur ajoutée qui contribuent à la rentabilité d’une entreprise.Enfin, un seul annuaire et un seul logiciel qui se chargerait de tout ne peuvent que simplifier le travail de l’administrateur. À bien peser le pour et le contre, la messagerie unifiée ne présente donc que des avantages en termes de réactivité pour l’entreprise et de rentabilité de chaque employé. Le cabinet d’études Frost et Sullivan lui prédit d’ailleurs un bel avenir, puisque ce marché devrait atteindre 39,3 Md€ en 2006 (35 Md$), alors qu’il ne représentait que 20,3 M€ en 1999 (18,1 M$).Comment expliquer, alors, que très peu d’entreprises aient sauté le pas ? Simplement parce que tous ces avantages pèsent moins lourd que l’investissement colossal nécessaire pour réaliser l’unification de la téléphonie et de la messagerie électronique, principal point d’achoppement de ces infrastructures.

Compatibilité difficile et coûteuse de systèmes hétérogènes

“Il serait plus juste de dire que les messageries qui dominent le marché aujourd’hui, à savoir Lotus Domino et Microsoft Exchange, sont plus “unifiables” qu’elles ne sont unifiées “, souligne Lionel Bruno, consultant associé de Mediasoft, SSII spécialisée dans la mise en ?”uvre de messageries.De fait, s’il existe actuellement des solutions de messagerie unifiée, aucune ne gère réellement l’ensemble des canaux de communication. Pour Alcatel, Lucent et AVT, les leaders du marché, messagerie unifiée signifie mise en commun de la téléphonie et de la télécopie.Tous 3 ont passé des accords avec Microsoft et Lotus pour mettre en ?”uvre dans leurs offres des fonctions de messagerie électronique, qui savait très bien prendre en compte la télécopie de son côté. Résultat, il n’existe pas une solution unique de messagerie unifiée, mais 2 écoles qui s’affrontent, avec d’un côté les spécialistes des télécoms, comme les fabricants de PABX (autocommutateurs), et de l’autre les éditeurs de messagerie électronique.D’après Emmanuel Obadia, directeur marketing de Lotus, “il est fort peu probable que les uns prennent le pas sur les autres. Le plus intelligent consisterait à ce que chacun reste sur son c?”ur de métier et noue des partenariats forts avec la partie adverse.” Cela étant, il reconnaît toutefois que “le développement de la voix sur IP peut être un facteur de convergence entre ces 2 catégories d’éditeurs “. Reste à savoir qui des éditeurs de messagerie et des fabricants de PABX prendra le pas sur l’autre.Pour l’heure, les 2 camps ont choisi de cohabiter en donnant naissance à 2 infrastructures de messagerie unifiée différentes. Dans la première, le PABX de l’entreprise est interfacé avec le système de messagerie. Autonomes, les 2 systèmes peuvent néanmoins être interrogés à partir d’une interface unique. Dans la seconde, plus ambitieuse, PABX et messagerie électronique partagent le même annuaire et la même base de données pour le stockage des messages.L’autocommutateur perd son rôle de messagerie vocale et n’est plus utilisé que comme une interface d’émission et de réception des appels. Il joue en quelque sorte le rôle de passerelle entre le réseau téléphonique et le réseau de données en passant tous les appels à la messagerie. Dans tous les cas, pour l’entreprise, cela signifie investir dans un nouvel autocommutateur.Solution matérielle, les PABX ancienne génération offrent en effet peu d’hypothèses en matière d’évolution comparés à une solution logicielle, plus facilement modulable. Et en admettant que l’autocommutateur puisse être combinée avec la solution de messagerie, les coûts en développement sont suffisamment rédhibitoires pour que toute entreprise soit en droit de se poser la question : “Pourquoi irai-je dépenser des millions pour mettre en ?”uvre les canaux de communication alors que je peux faire la même chose avec ma passerelle à 3 000 ? (20 000 F) ?”Surtout lorsque le retour sur investissement repose sur les valeurs peu quantifiables que sont la réactivité et la compétitivité. Résultat, le marché de la messagerie unifiée a plus de chances de se développer à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’entreprise.Le cabinet d’analyse Zona Research considère en effet que 60 % des sociétés opteront pour la location de leur système. Plus économique, cette solution favoriserait non seulement l’élimination des coûts de mise en ?”uvre, mais également la réduction des frais de gestion : là où Lucent estime le coût de gestion mensuel d’une boîte aux lettres de messagerie unifiée à 76 e en entreprise (500 F), Critrial Path la loue entre 4 et 43 ? par mois (entre 25 à 280 F). Il n’est d’ailleurs pas le seul ; @into, Outrade et Aspeserve, entre autres, l’ont suivi sur cette voie.

Un marché qui se développe surtout dans les centres d’appels

Si la messagerie unifiée ne rencontre donc pas un grand succès dans l’entreprise, elle est en revanche très utilisée par les centres d’appels. Il est vrai que pour ces derniers, le problème de la compatibilité à un existant lourd ne se pose pas et que le retour sur investissement reste plus facile à calculer. Partant de zéro, ils optent en effet pour un système qui s’appuie uniquement sur du logiciel, voire sur IP, comme ce fut le cas pour le site boursier Capitol (groupe VIEL&Cie).Dans les centres d’appels, il serait toutefois plus juste de parler de couplage téléphonie-informatique (CTI). Il s’agit non plus de faire converger les canaux de communication pour mieux les gérer, mais d’optimiser la pertinence et la rentabilité de chaque opérateur en orientant les messages (appels, télécopies, courriers électroniques) selon le client et la disponibilité des opérateurs. Le tout dans un contexte de système unifié, où l’opérateur verra le dossier du client s’afficher à l’écran avant même de prendre l’appel.Une approche qui rencontre une adoption très rapide, si l’on en croit IDC. Selon ce cabinet, 39 000 centres d’appels seront en effet équipés de solutions CTI dès 2004, avec une croissance annuelle moyenne de 59 %.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Marie Varandat et Frédéric Simottel