Qui peut aujourd’hui prévoir l’évolution de la conjoncture économique mondiale des prochains mois ? Après avoir tablé sur une reprise de la croissance aux Etats-Unis dans le courant du quatrième trimestre, les instituts tentent désormais d’évaluer l’impact sur l’économie des attentats contre le World Trade Center de New York et le Pentagone à Washington.Les instituts de conjoncture ont rapidement souligné l’impact négatif important des événements de mardi sur l’activité économique mondiale. Cependant, les cabinets d’études ne s’accordent pas sur l’ampleur et la durée du ralentissement économique.Le plus pessimiste des cabinets d’études interrogés à ce jour est le Bureau d’informations et de prévisions économiques (BIPE).Ce dernier prévoit une croissance américaine négative en 2002 à – 0,5 % (contre + 2,1 % selon ses prévisions initiales). Par effet de domino, la croissance dans la zone euro tomberait dans une fourchette de + 1,3 % à + 1,8 % l’an prochain (contre + 2,3 % initialement).” La consommation des ménages représente 60 % du PIB américain. Dans les circonstances actuelles, ces derniers auront tendance à épargner, estime Cyril Blesson, expert du BIPE. Les diminutions d’impôts, votées par l’administration Bush, risquent par ailleurs de ne pas soutenir la croissance comme l’espéraient les milieux économiques. “Du côté des entreprises, le BIPE souligne que les conditions de financement continueront de se détériorer aux Etats-Unis. ” Les baisses de taux d’intérêts décidées par la Réserve fédérale (FED) ont été en partie inefficaces parce que les banques commerciales et d’affaires ont durci les conditions de distribution du crédit depuis le début de l’année, indique Cyril Blesson. Cela devrait perdurer avec les attentats. “Enfin, le BIPE souligne l’importance de la réaction politique aux attentats de mardi. Comme d’autres analystes, Cyril Blesson évoque un scénario proche de celui de la Guerre du Golfe. A l’époque, l’économie américaine était en phase de ralentissement du fait des excès d’endettement de la fin des années 90. Or, l’intervention américaine au Koweït a précipité les Etats-Unis dans la récession. Ce scénario noir est aussi celui de la Deutsche Bank.
Anticiper la réaction des ménages américains
Plus rassurant, François David, PDG de l’assureur Coface, expliquait vendredi que, sur les trois éléments avancés pour prévoir ” une crise majeure dans le monde ?” prix du pétrole, chute des marchés boursiers et moral des ménages aux Etats-Unis ?”, les deux premiers étaient plutôt rassurants à ce jour. “En ce qui concerne le pétrole, les membres de l’Opep, qui contrôlent 40 % de la production mondiale, ont déclaré qu’ils n’étaient pas de leur intérêt de faire monter les prix.Sur les marchés financiers, le Nikkei, à Tokyo, et les Bourses européennes ont rebondi au cours des séances de mercredi et jeudi. “Mais il faut rester prudent, affirmait François David. La Bourse de New York n’est pas encore réouverte. Ce sera le véritable test.”La Coface se montre très prudente quant au moral des ménages américains. François David retient notamment l’impact positif ” d’une espèce d’unanimité, une espèce d’élan nationaliste qui se produit aux Etats-Unis “.Dans ces conditions, la Coface a décidé de maintenir sa prévision d’une croissance du PIB mondial de 2,5 % pour l’ensemble de l’année 2001, mais fait état d’une augmentation des risques de crédit partout dans le monde depuis quelques mois.Toutefois, l’assureur a placé vendredi l’Allemagne, la Grande-Bretagne et le Portugal sous surveillance négative, comme cela fut déjà le cas des Etats-Unis et du Japon en juin dernier.
L’OCDE attend jusqu’en novembre
L’ Organisation de coopération et développement économiques (OCDE) se veut pour sa part très prudente. Elle s’est donnée jusqu’en novembre avant de publier une évaluation quantitative de l’impact de l’attaque terroriste de mardi sur l’économie mondiale.Les conjoncturistes de l’OCDE ont toutefois identifié cinq conséquences majeures :
- un net fléchissement de l’activité au cours du dernier trimestre 2001, à l’échelle mondiale. Les secteurs liés aux transports, au tourisme et aux loisirs seraient les plus affectés ;
- au niveau de la demande : la confiance des ménages et des entreprises devrait évoluer de manière négative ;
- l’offre : une hausse des matières énergétiques, principalement le pétrole, est prévisible. Ce scénario s’est déjà vérifié lors de tremblements de terre, ou de la Guerre du Golfe, précise l’OCDE ;
- des interventions régulières des banques centrales sont très probables. Elles auront pour mission d’injecter des liquidités dans l’économie ;
- l’OCDE estime par ailleurs que le renforcement des règles de sécurité risque de gêner les flux humains et la circulation des capitaux.
Il appartient désormais aux sociétés de courtage de trancher. La réouverture probable de Wall Street, lundi, donnera une partie de la réponse. Sans attendre, le cabinet d’études KBC Securities a émis vendredi deux avis négatifs sur le secteur des équipementiers et des médias, en particulier sur les sociétés qui sont très présentes aux Etats-Unis.Pour tenter de conjurer l’incertitude actuelle, le ministère des Finances réaffirmait vendredi quil tablait toujours sur un taux de croissance de 2,3 % en France en 2001 et une croissance ” légèrement au-dessus ” de ce taux en 2002.
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