Souvent, le piratage et la lutte contre ce phénomène sont comparés à un jeu de chat et de la souris. Chaque effort et succès du chat amenant la souris à trouver une nouvelle solution pour continuer à pirater.
Il se pourrait bien, toutefois, qu’AT&T, opérateur historique aux Etats-Unis, ait trouvé deux moyens de donner aux chats un moyen imparable de battre les souris. Ce ne sont pas moins de deux brevets qui pourraient changer la donne pour la plupart des internautes.
Surveillance et identification
C’est le site Torrentfreak qui les a repérés. Le premier, déposé en décembre 2009 et publié le 4 juin dernier, permettrait à l’opérateur de surveiller et pister les flux de données liés au trafic sur les réseaux P2P. Un moyen donc de garder un œil et de savoir qui partage quoi quoi sur BitTorrent, qui représente pas moins d’un tiers de la bande passante consommée en téléversement aux Etats-Unis. Ainsi, grâce à cette technologie, AT&T repère les contenus les plus téléchargés, les analyse ensuite pour savoir si le titre correspond à la réalité de ce que contient le fichier et si ce fichier est partagé légalement. Si ce n’est pas le cas, AT&T sera alors en mesure de savoir qui l’a mis en partage. Pour autant, le brevet ne décrit pas les fins éventuelles auxquelles cette technologie pourrait servir dans le détail.
Le Deep Inspection Packaging au service du copyright
Le second brevet, déposé en juin 2010 et publié en mai 2012, va encore plus loin. Son intitulé ne laisse que peu de place au doute : « Real-time content detection in ISP transmissions » (« Détection de contenu en temps réel dans les transmissions des FAI »). D’autant qu’il suffit de lire le descriptif du dépôt de brevet pour prendre toute la mesure des intentions d’AT&T : « Une méthode et un système permettant de détecter la transmission de contenu pré-identifié, comme les éléments copyrightés, sur le réseau d’un FAI. »
Cette technologie fonctionne en établissant des profils de contenus ou de « pirates récidivistes », ensuite les flux de données sont passés au crible de ces tamis. Après comparaison avec une base de données de signatures ou d’empreintes de fichiers, ces flux peuvent être reconnus comme étant porteurs de données partagées illégalement. Afin d’éviter les travers de certains systèmes de filtrage qui ne détectent « pas seulement les copies, mais également les documents qui y ressemblent de manière significative », le procédé d’AT&T repose sur des règles qui s’adaptent et se forgent au fil du temps et s’affine avec le filtrage des flux de données. Evidemment, cette surveillance implique le recours au DIP, Deep Inspection Packaging, qui serait intégré « au sein même du réseau d’un FAI, tel que son cœur ou routeur ».
ATT PRISM Pirate Patent by torrentfreak
Détection, réaction
En sus, là où le premier brevet ne décrivait pas d’action immédiate, celui-ci en indique plusieurs. Ainsi, en cas de transferts de fichiers en violation du copyright, AT&T propose plusieurs solutions. La première peut être l’interruption pure et simple de la transmission. Les données considérées comme en violation du copyright peuvent également être stockées, avec les informations de connexion pour une vérification ultérieure. Enfin, un système d’alerte peut transmettre automatiquement aux autorités compétentes ou intéressées les informations relevées. Il peut s’agir d’autorité de justice ou d’une association représentants les ayants-droits. AT&T indique même qu’il serait possible de supprimer ou suspendre le compte de l’abonné.
En plaçant le moyen de contrôle très en amont, AT&T entend résoudre un problème pour les défenseurs des copyrights : « Poursuivre les distributeurs illégaux des contenus [soumis à copyright, NDLR] est problématique parce que les utilisateurs sont souvent nombreux et épars, et les actions légales contre de nombreux petits utilisateurs est coûteux – et également mauvais du point de vue des relations publiques […] »
A l’heure où des programmes comme PRISM ont largement ébranlé la confiance que les citoyens internautes peuvent avoir vis-à-vis de leur gouvernement respectif, la découverte d’un brevet de ce genre, dont on ne sait pas s’il est appliqué ou le sera prochainement, pose de grosses questions. La défense d’intérêts économiques peut-elle aboutir à la mise à mal de nos libertés en ligne. En effet, on imagine assez bien les dérapages qu’un tel système de surveillance généralisée pourrait rendre possible.
A lire aussi :
Notre dossier PRISM
Sources :
Torrentfreak
Brevet d’AT&T
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