« Aucun drap noir ne va être retiré pour révéler quoi que ce soit dans l’immédiat ». On a connu Phil Schiller plus inspiré. Néanmoins, le message d’un des dirigeants historiques d’Apple était clair en avril 2017, le Mac Pro refondé et en cours de développement n’était pas près de voir le jour.
Un an plus tard, il semblerait que la formule soit toujours d’actualité. Entre temps, les professionnels ont eu droit à un iMac Pro ultra-puissant, mais ils devront encore attendre pour pouvoir renouveler leur Mac Pro.
Retard au reboot
A en croireTechCrunch, qui a été invité à rencontrer quelques responsables d’Apple, la nouvelle « tour » de la société de Cupertino n’arrivera pas avant 2019… et pas forcément en début d’année.
Un léger retard, même si on savait dès avril 2017 qu’il ne fallait pas attendre le Mac Pro dans les premiers mois de 2018. Quoi qu’il en soit, il est rare qu’Apple donne ce genre d’indications. En l’occurrence, cette communication exceptionnelle tient au moins à trois facteurs.
Premier point, Apple sait que beaucoup de professionnels temporisaient l’achat d’un iMac Pro de peur de voir arriver prochainement le Mac Pro.
Deuxième point, la firme de Cupertino s’adresse à une communauté polymorphe extrêmement particulière qui a eu, trop longtemps, l’impression d’être négligée. Il est donc nécessaire pour Apple de retisser un lien.
Enfin, troisième et dernier point, cette phase de communication inhabituelle permet de dévoiler une nouvelle manière de concevoir les Mac, une refonte profonde qui montre toute l’attention apportée aux pro et à leurs avis.
Repenser la façon de concevoir des Mac
L’iMac Pro a prouvé qu’Apple savait encore faire des machines professionnelles. Restait à démontrer que pour y arriver, les équipes de Tim Cook étaient également capables d’écouter les pros pour répondre à leurs besoins… et pas seulement pour leur offrir des configurations puissantes.
Apple a donc changé sa façon de concevoir ses machines, non plus en partant du logiciel ou du matériel, mais en observant à la loupe des workflows, des pratiques quotidiennes. Attachées à de multiples domaines représentatifs, notamment celui de la vidéo, des effets spéciaux ou de l’animation 3D, mais aussi de la production musicale et du développement logiciel, ces observations consistent à suivre et noter les remarques de professionnels au jour le jour. Point important, Apple a précisé à TechCrunch que ce passage à la loupe ne concerne pas seulement ses logiciels.
Pour être sûr de scruter au mieux, Apple est allé jusqu’à recruter, pour certains à temps plein, des monteurs réputés d’Hollywood. Ces personnes travaillent sur de vrais projets, tout près des ingénieurs en charge du développement du matériel et du logiciel.
Quelques mètres qui facilitent les échanges et permettent des itérations plus rapides et des ajustements dans le détail. Là où, c’est bien connu, se cachent le diable et les petits agacements qui font qu’une machine puissante peut paraître insupportablement lente. Un exemple : Apple a indiqué à TechCrunch s’être penché sur le problème d’une petite fenêtre, pas gourmande d’un point de vue des ressources graphiques, qui prenait entre 6 et 10 secondes pour s’ouvrir. Rien de grave a priori, sauf que l’utilisateur pro y accède une centaine de fois par jour. De quoi devenir dingue et maudire un Mac surpuissant.
Les équipes d’Apple ont du coup étudié ce problème et ont trouvé sa source : un petit souci dans le pilote graphique. Une correction mineure « qui a totalement changé la productivité de l’utilisateur », a précisé John Ternus, vice-président de l’ingénierie matérielle.
Une nouvelle orientation
En analysant ainsi les workflows, Apple lève des lièvres que les tests classiques ne peuvent pas mettre en valeur. Cela permet aux ingénieurs (qu’ils travaillent sur le logiciel ou le matériel) de non seulement corriger des problèmes mais également de mieux saisir les besoins de cette grande variété de professionnels pour s’assurer de ne pas manquer le coche.
Ainsi cette « team workflow » dresse la cartographie d’usages actuels et futurs. Une mappemonde plus approfondie et précise de ce dont les pros ont besoin. John Ternus a indiqué que ce processus aide Apple à définir les orientations à suivre. « Cela influence clairement l’architecture future, ce que nous planifions », expliquait-il. « Nous obtenons une bien meilleure compréhension de nos utilisateurs professionnels et de leurs pratiques. Nous comprenons non seulement l’état de l’art actuel, mais là où va l’état de l’art demain ». Tout cela contribue à façonner le futur Mac Pro, qui devrait être accompagné d’un écran repensé.
Sur ce sujet, Apple mesure l’enjeu et les attentes : « nous sommes dans une situation où nous voulons prendre deux précautions plutôt qu’une avant de trancher. Nous voulons être sûrs de construire une plate-forme vraiment bien pensée ».
Une des solutions pour coller à ces multiples besoins sera évidemment la modularité promise pour le Mac Pro. Une modularité qui pourrait s’étendre à d’autres gammes de Mac, puisque l’impact de la réflexion sur le workflow court au-delà de ce futur produit. Les MacBook et iMac Pro sont également concernés. En ce sens, l’eGPU est une promesse de modularité pour les MacBook Pro. Ces boîtiers externes, qui contiennent des cartes graphiques, connectés en Thunderbolt, sont officiellement supportés depuis quelques jours par la version 10.13.4 de macOS. Et ont le potentiel de remodeler la façon dont on pense son utilisation des Mac, et donc leur conception.
Apple prend son temps pour redisposer ses pions sur un échiquier où la partie vaut des dizaines de milliards de dollars. L’enjeu est colossal. Même joueur, joue encore !
Source :
TechCrunch
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