Parler d’anticipation à des informaticiens confrontés au gel de leurs budgets et à la disparition de nombreux fournisseurs peut paraître une gageure. C’est, au contraire, dans ces situations difficiles qu’il devient primordial de savoir anticiper à la fois les évolutions des solutions techniques et celles des attentes des utilisateurs. Car l’important est de suivre ces deux tendances de front.Il est aujourd’hui possible d’anticiper, à un horizon de deux à trois ans, les évolutions des technologies et de la demande. L’infaillibilité n’est pas garantie, mais les risques liés à une erreur de prévision sont moindres que ceux liés à la non-prévision, qui vous condamne à être toujours en retard d’une guerre. Nous devrions tous faire nôtre cette devise d’Einstein : “L’avenir m’intéresse, c’est là que je vais passer le reste de ma vie.” La veille technique est passionnante, facile, aidée par internet et la nécessité, pour les acteurs du marché, d’indiquer leurs axes stratégiques de développement. Il est, hélas, coûteux et dangereux de se laisser entraîner dans le piège de la veille technique “intellectuelle”, de tout savoir sur les tendances sans traduire cette connaissance en décisions opérationnelles. Dans des dizaines de domaines, tels que les services web, l’open source, les réseaux Wi-Fi, les portails d’entreprise, le WAP ou l’i-Mode, chacun doit choisir les solutions, les partenaires et le calendrier d’expérimentation dans son entreprise. La partie difficile et importante de ce processus consiste à traduire cette veille technique en décisions, à ne pas se laisser piéger ou guider par quelques grands fournisseurs et à se construire son écurie de poulains prometteurs.Peut-on aussi anticiper à deux ou trois ans l’évolution des attentes des clients du système d’information, internes à l’entreprise ou externes ? Selon que l’on pose la question à un institut d’études de marché ou au PDG de Sony lors du lancement du premier baladeur, la réponse sera différente ! La dynamique “outils/attentes” complique beaucoup ce processus, car l’essentiel des innovations viendra d’attentes latentes, que seules les technologies innovantes seront capables de faire éclore.Malgré les difficultés et les risques, cette double anticipation est indispensable, car les bénéfices potentiels dépassent largement les risques. Commencer par l’anticipation sur les infrastructures informatiques est le meilleur chemin vers la réussite. Un dirigeant d’une grande entreprise française m’a dit récemment : “Une infrastructure n’est utile que si elle est disponible quand on en a besoin.” Il avait tout compris !Le premier bénéfice réside dans la capacité à créer des avantages concurrentiels en étant prêt quand la demande latente se manifeste. Rien n’interdit de l’aider à se manifester en faisant un marketing intelligent du potentiel des nouveaux outils ! Le deuxième avantage, plus concret, tient à la protection des investissements que permet la prévision des “culs-de-sac” technologiques. Le corollaire de ces anticipations est, bien sûr, le droit à l’erreur. Ce qui nest certainement pas le style de management le plus répandu dans notre pays !Anticiper pour gagner : une belle devise pour informaticien courageux !(*) [email protected]
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