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André Ampelas (RATP) : ” Le passe sans contact est au c?”ur de nos préoccupations “

Se considérant en priorité au service du transport des voyageurs, le DSI de la RATP dévoile sa perception visionnaire du rôle de l’informatique au sein de la régie.

A la tête du département des systèmes d’information et de télécommunications (SIT) de la RATP, mais aussi animateur de la cellule innovation de l’UITP (Union internationale des transports publics), André Ampelas nous fait part du rôle particulier qu’il estime devoir jouer pour favoriser l’essor des transports en commun.Comment définiriez-vous le rôle de SIT au sein de la RATP ?Les directeurs informatiques sont au service d’un métier. Nous sommes une très grosse entreprise de transport. Il faut donc recadrer notre activité dans ce contexte. Au début du siècle, les villes ne concentraient que 20 % de la population, contre 80 % aujourd’hui. De vraies fourmilières ! Je crois en l’importance extrême de la mobilité dans les villes et au rôle prépondérant des transports en commun. SIT est à la croisée de l’explosion de ce mode de transport et des nouvelles technologies de l’information et des télécommunications. Internet n’est que l’un des éléments à prendre en compte. La question est surtout de savoir quels nouveaux services nous pouvons offrir à nos clients. Ceux-ci effectuent près de un milliard et demi de trajets par an dans le seul métro. Quand j’ai commencé à travailler, on nous répétait “métro, boulot, dodo”. Ce schéma a changé. Les motifs de déplacement et leur distribution ont évolué. Par exemple, les gens empruntent de plus en plus les transports en commun pour leurs loisirs. Lorsqu’il s’agit de répondre à ces nouveaux besoins, j’estime être le porteur de technologies, et pas seulement du dernier objet à la mode.Sur quels domaines se portent plus particulièrement vos efforts ?Je crois en l’efficacité de la politique du “T”. Elle consiste à maîtriser l’ensemble des technologies, mais à ne se concentrer que sur celles qui touchent au c?”ur de métier. L’amélioration de la maintenance des équipements, par exemple, constitue pour nous un vrai défi. La main-d’?”uvre y représente 70 % de nos dépenses. Nous sommes un service public. Comme dans les autres secteurs, la tendance mondiale est à la maîtrise des coûts. Il nous faut donc répondre à la demande des clients, à des coûts acceptables. Notre organisation progresse dans ce sens. Les aspects techniques doivent suivre. L’enjeu est de taille. Nos équipements sont nombreux et disséminés. De ce fait, les risques de défaillance existent un peu partout. Le télédiagnostic, la télémaintenance et la télédistribution constituent une réponse à ce problème. Nous devons donc continuer à investir dans les domaines de l’informatique et des télécoms, et en transposer les technologies dans notre métier. Nous sommes déjà en mesure de téléconfigurer les péages. Nous avons de l’avance en la matière. Mais nos réseaux télécoms doivent encore se développer. Et c’est ce sur quoi portent nos efforts.Comment vos efforts se concrétisent-ils ?Nous nous sommes récemment lancés dans le déploiement d’un réseau ATM avec quatre cents points d’éclatement. Notre objectif : constituer un backbone filaire pour répondre à tous nos besoins. La maintenance ou la vidéo, par exemple, nécessitent de gros tuyaux. Nous jetons donc actuellement les fondations de la maison que nous allons bâtir demain. Avant, les applications étaient développées de façon verticale. L’avènement du réseau, au sens filaire, nous permet désormais de les fédérer et nous ouvre des voies d’exploitation fabuleuses et inconnues. Car la valeur ajoutée, ce n’est pas tant la technologie que le liant. Pour faire émerger cela, nous avons d’ailleurs modifié notre organisation, en créant une unité spécialisée pour tout ce qui touche aux communications.Les réseaux, n’est-ce pas aussi internet ?Internet n’est que la partie visible de l’iceberg. Ce qui est intéressant, c’est les bases de données et les moteurs que l’on met dessus. Déployer des bornes internet dans le métro à un moment où la mobilité s’accroît n’est pas fondamental. Ce que veulent nos clients, c’est être transportés. Le service doit intervenir pendant ce transport. Le taux de pénétration d’internet dans les foyers n’est que de 30 %. Nous devons toucher un public plus large. C’est mon obsession. Un serveur à reconnaissance vocale efficace pour trouver son itinéraire juste avant le transport : voilà qui présente un intérêt certain. N’importe qui peut y accéder. Nous devons développer la facilité d’usage. En la matière, internet, c’est encore l’horreur. Et le WAP, c’est pire encore. Quant à l’UMTS, on va l’attendre quelque temps. Dans les transports, les nouvelles technologies englobent beaucoup plus de choses.Quoi, par exemple ?La carte à puce. On l’oublie très souvent. C’est pourtant le plus petit ordinateur qui existe actuellement. L’exploitation de cette technologie en tant que support concret dans notre relation avec les clients, par la généralisation du “passe sans contact”, est au c?”ur de nos préoccupations. Peu d’entreprises ont la chance d’être quotidiennement en contact avec leurs clients. La RATP effectue chaque année trois milliards de transactions avec les siens. C’est, sur ce support, autant que toutes les banques, et trois fois plus que France Télécom. Notre objectif est de transformer nos cinq millions de clients inconnus en cinq millions de clients connus. Pour y arriver, nous comptons nous appuyer sur la puce sans contact à microprocesseur ?” la seule à pouvoir être téléchargée. Elle nous permettra aussi de réduire les coûts liés à la distribution. La vente à distance est un axe stratégique. Nous ne pouvons nous y engager qu’en disposant d’un support qui s’y prête et qui réponde à nos vraies préoccupations métier.Comment abordez-vous les projets d’une telle envergure ?Une bonne informatique, c’est aussi, paradoxalement, une informatique de verrues successives. L’intérêt est d’additionner de nouvelles fonctions à un coût marginal. Notre démarche est la même pour tous nos développements originaux. D’abord, nous vérifions la faisabilité du projet et sa non-existence sur étagère. Ensuite, nous concevons le produit et réalisons des tests en situation réelle. Enfin, nous généralisons, comme c’est le cas actuellement pour le “passe sans contact”, aussi connu sous le nom de Calypso (projet européen qui lui a donné naissance). Nous sommes la première entreprise à avoir réalisé son couplage avec le porte-monnaie électronique. Vingt et une villes françaises ont d’ores et déjà adopté Calypso, de même que l’Italie, le Portugal et la Belgique. Il est en test aux Etats-Unis. Notre approche est fédératrice et originale. Nous développons avec des partenaires internationaux des techniques non propriétaires, que nous cédons pour montrer le caractère général de nos applications. Pour le “passe sans contact”, nous avons créé un club d’utilisateurs. Il compte, à ce jour, quarante membres, quatre cents observateurs et déjà trente distributeurs. Il n’existe pas de technologie pérenne qui ne soit une technologie partagée. Nos technologies rayonnent. Cela fait partie de notre métier.Vous jouez la carte de l’innovation. Comment vous êtes-vous organisé pour faire germer de nouveaux projets ?En matière d’innovation, je n’ai jamais vu sortir quoi que ce soit d’une organisation répartie entre maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’?”uvre, même si elle demeure nécessaire pour la plupart de nos activités. L’innovation rationnelle n’existe pas. La plupart des vraies innovations émanent de “techniciens éclairés”. Notre démarche consiste, lorsqu’une une idée ou un besoin apparaît, à mettre une équipe sous globe et à foncer. Nous sommes arrivés à des résultats fabuleux avec trois fois rien. L’innovation entraîne l’innovation. Mon poste est passionnant parce que je peux pousser, avec mes collaborateurs, dans tel ou tel domaine. Par exemple, les premières radiolocalisations par GPS en zone urbaine ou les cartes vectorisées, dès le début des années quatre-vingt-dix.Quelles seront donc les prochaines grandes innovations ?Dans le domaine du transport physique des personnes, d’énormes évolutions technologiques se profilent. Les pilotes automatiques existent depuis plus de trente ans. Déjà, avec Météor, nous sommes passés à l’automatisme intégral. Mais chacun rêve d’une voiture individuelle. L’idéal serait, par exemple, de disposer d’un véhicule libre-service, qui s’arrêterait à la demande du client. S’il ne peut exister de libre-service intégral, il faut néanmoins personnaliser les transports en commun. Pour y arriver, nous nous appuierons sur le “passe sans contact”. Mais, pour savoir ce que les voyageurs demandent, il va nous falloir aussi constituer des bases de données. L’information personnalisée dans les transports en commun, c’est pour bientôt.

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Jean-Marie Portal