Repéré par la rédaction de 01 Informatique et élu par ses pairs, le DSI de la RATP est à l’origine de projets aussi ambitieux que le métro automatique, le passe-sans-contact, la recherche d’itinéraire, le Wi-Fi dans les
bus.
Directeur des systèmes d’information ou chef d’entreprise ? Ne cherchez plus ! André Ampelas est les deux à la fois. DSI de la RATP, c’est en véritable patron qu’il dirige son département. Un service taillé comme une PME, avec sa force de frappe de plus de huit cents collaborateurs. Avec eux, ‘ André Ampelas se bat au quotidien pour ses idées, confie Michel Raison, chargé de mission coordination opérationnelle, et bras droit du DSI. Pour les imposer, il n’hésite pas à s’engager régulièrement dans des luttes de pouvoir. ‘ La recherche d’itinéraires d’adresse à adresse (Pivi), c’est lui. Le système de contrôle de la conduite des trains (projet Sacem), c’est aussi lui. Le métro sans conducteur (projet Météor), c’est encore lui. La radiolocalisation des bus, le passe-sans-contact Navigo, le mobile dans le métro, le Wi-Fi dans les bus parisiens, c’est toujours lui. A chaque fois, de grandes avancées, mais au prix, souvent, de luttes acharnées au sein même de la régie. ‘ André Ampelas ne s’est pas fait que des amis, dit Alain Caire, directeur du département sécurité. Car il défend ses idées sans employer la langue de bois. Pour imposer en France le passe-sans-contact, par exemple, il a fallu mettre beaucoup de gens d’accord. La RATP ne voulait pas y aller seule, comme ce fut le cas avec le péage magnétique dans les années soixante. ‘ Long combat : se battre pour un produit imaginé en 1988 et seulement en cours de déploiement sur le territoire national ! Bref, André Ampelas est l’emblème de la capacité d’innovation du premier transporteur d’Ile-de-France.
Personne n’y est indifférent
Trente quatre années de bons et loyaux services au sein de la RATP ! Et aucune infidélité… ‘ C’est étonnant, se dit Alain Caire. Il a toujours refusé les ponts d’or qu’on lui offrait à l’extérieur. ‘Même le départ de Christian Blanc, appelé en 1992 à la tête d’Air France, ne l’incite pas à jeter l’éponge. Et pourtant, c’est ce PDG qui l’a mis aux commandes de l’informatique. ‘ André Ampelas n’est pas un homme intéressé ‘, confie Alain Caire. Homme de caractère, sa personnalité ne laisse jamais indifférent. ‘ Un tourbillon, une énergie, une passion, s’enthousiasme ainsi Michel Raison. Son énergie est fédératrice. André Ampelas est un homme qui sait communiquer ses passions. ‘ Et la première d’entre elles demeure son entreprise. Amoureux des transports en communs et de la RATP, le DSI de l’année 2003 ‘ a de grandes ambitions pour elle ‘, résume Michel Raison. Et cette ambition couvre les trois grands domaines d’applications de son département : la micro-informatique, les télécommunications et le traitement du voyageur.
Son véritable challenge : la mobilité
‘ Nous travaillons par cycles de trois ans ‘, décortique André Ampelas. Sur la période de 2002 à 2004, la répartition des investissements par le département des systèmes d’information et de télécommunication (SIT) de la RATP reflète ses priorités. On dirait une comptine : 100 millions d’euros pour la micro-informatique, 200 millions pour les télécoms, 300 millions pour le traitement du voyageur. ‘ En matière de bureautique fixe, nous ne cherchons pas à être les premiers de la classe ‘, admet-il. Ce qui n’empêche pas la Régie de rester au goût du jour. La migration des postes de travail vers Windows XP est lancée, et l’intégration d’Oracle Financial terminée. Commentaire sobre du DSI : ‘ L’opération s’est bien déroulée, mais nous n’avons pas fait la révolution. ‘ Son véritable challenge, c’est la mobilité : ‘ L’élément fort pour les années à venir ‘, s’enflamme- t-il. Ne perdant pas de vue le c?”ur de métier de son entreprise, il en définit les priorités. Proches des clients, les agents d’exploitation seront les premiers à être dotés de terminaux mobiles. Suivra le personnel de maintenance. Et, comme pour justifier, au passage, le deuxième budget de son département, les télécoms, il explique : ‘ C’est la fédération de nos réseaux de communication qui nous permet d’envisager aujourd’hui une diffusion de l’information contenue en station vers tous types de médias. ‘
À fond dans les réseaux
Car la RATP c’est aussi, et cela se sait moins, un fabuleux réseau ATM avec quatre cents points d’éclatement. C’est avec ce backbone filaire fraîchement constitué qu’André Ampelas compte répondre à tous les besoins de l’entreprise en termes de transport d’information. Des gros tuyaux qui seront capables de faire transiter de la vidéo. Cette vision à quinze ou vingt ans lui a permis d’anticiper des choix importants pour la RATP. Comme, par exemple, profiter de l’étendue et du maillage du réseau métropolitain pour y déployer de la fibre optique. Et créer deux filiales télécoms dès la fin des années 90 : Telcité, exploitant du réseau optique, et Naxos, fournisseur d’accès. André Ampelas s’est battu à l’époque : ‘ Il a fallu aller voir la direction générale. Mais aujourd’hui, cette opération nous rapporte sept fois la mise de départ ! ‘ Et c’est ainsi que la Régie est devenue un opérateur de télécommunications à part entière. Fournisseur officiel de Bouygues Télécom et de SFR, elle écoule l’essentiel de leur trafic télécom de Paris !Une aventure qui ne s’arrête pas là. Car l’émergence des réseaux sans fil lui a donné de nouvelles idées. André Ampelas s’attaque désormais au Wi-Fi. Pas tout seul cependant. Tel un chef d’entreprise, avec des partenaires industriels. En l’occurrence, Cap Gemini Ernst & Young et Cisco Systems. Avec eux et via Naxos, la RATP s’est lancée, en avril dernier, dans l’expérimentation d’une plate-forme mutualisée d’échange de données sans fil à haut débit et d’accès à internet (Wixos). Une douzaine de sites ont été déployés aux abords de la ligne de bus numéro 38, ainsi que dans la gare RER de La Défense. ‘ Face à la montée en puissance du Wi-Fi, soit je reste passif, soit je suis actif ‘, soupèse André Ampelas, pour qui, la première solution n’est même pas envisageable. Son idée est simple : ‘ Je mets des antennes sur tout le réseau de bus de la RATP, et je propose de mutualiser ‘, avec comme ambition la couverture complète de Paris !
Des projets comme s’il en pleuvait
Visionnaire, André Ampelas projette la RATP dans le futur. Sans pour autant perdre de vue les réalités du terrain et le c?”ur de métier de son entreprise, qui occupe d’ailleurs le plus gros budget du département : le service au voyageur. Son projet fétiche ? Au sein de l’entreprise, personne ne peut plus l’ignorer : il s’agit du ‘ passe-sans-contact ‘, une expression qui rentrera bientôt dans le langage courant ! La technologie devenue un standard européen de télébilletique repose sur une idée et des brevets de la RATP.En fait, le passe-sans-contact, les clients des transports en commun le connaissent maintenant bien. Commercialisé sous le nom de Navigo, il est en train d’envoyer au musée le ticket des cartes d’abonnement annuel des transporteurs d’Ile-de-France. La première phase du déploiement de Navigo touche à sa fin. Désormais, 1,5 million de clients l’utilisent chaque jour. Prochaine étape dans les deux ans qui viennent : les abonnés mensuels. D’ici fin 2006, le bon vieux ticket magnétique aura totalement disparu. Une vraie révolution ! Mais le succès ne s’improvise pas. Pour arriver à un tel résultat, ici encore André Ampelas a dû se battre dès le milieu des années 90.
Un sésame urbain offrant une palette de services
‘ Tous les fabricants de carte à puce rejetaient mon projet. Mais j’ai convaincu Christian Blanc ?” P-DG de l’époque. C’est lui qui a décidé de se lancer. ‘ Pour la fabrication, le DSI s’adresse à Roland Moreno, le père de la carte à puce. En 1998, le projet Icare cède la place au projet Calypso, mais l’acharnement du DSI reste intact. Il finit par payer. Désormais, Calypso sera également porté par cinq autres transporteurs européens : l’italien ACTV, l’allemand LKRKN, le portugais OTLIS, le belge STIB, et, pour la France, la SNCF. Le passe-sans-contact est devenu une réalité. Demain, il pourrait être un véritable sésame urbain, offrant toute une palette de services associés à l’identification du porteur. ‘ Nous allons transformer nos cinq millions d’usagers inconnus en cinq millions de clients connus ‘, s’enthousiasme André Ampelas. Pour la RATP, c’est la cerise sur le gâteau ! Cerise… Un mot qui sonne doux aux oreilles du DSI. Car c’est le nom de l’un de ses derniers projets. Il s’agit d’un service accessible par téléphone de recherche d’itinéraires et d’informations horaires sur les transports parisiens utilisant les technologies de reconnaissance vocale les plus avancées. Infatigable André Ampelas ! S’arrêtera-t-il un jour ? Rien n’est moins sûr… Car le DSI de l’année 2003 en est convaincu : ‘ L’innovation entraîne l’innovation. ‘ Et, en la matière, ‘ sa réactivité est instantanée, confirme Michel Raison. Il voit la route. Et il sait prendre les virages. ‘