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Alcatel en passe de racheter Lucent ?

L’équipementier français négocierait le rachat de son concurrent américain pour 40 milliards de dollars. Une acquisition stratégiquement crédible, mais peu adaptée à la situation actuelle des deux entreprises.

De rumeurs en démentis, de fuites en spéculations, le possible rachat de Lucent par Alcatel n’en finit plus de faire l’actualité. Fin avril, le
Wall Street Journal
évoquait déjà une acquisition. Vendredi 18 mai, le
New York Times
reprend l’information, citant, sans révéler de noms, des personnalités proches des discussions en cours, qui estiment à 50 % les chances de réussite de l’acquisition. Alcatel se refuse pour sa part à tout commentaire, se bornant à parler de spéculations, sans démentir formellement.La transaction devrait s’effectuer essentiellement par échanges d’actions, pour un montant total de l’ordre de 40 milliards de dollars, soit 20 % de plus environ que les 33,5 milliards de dollars de capitalisation de Lucent. En cas d’échec, il est probable qu’Alcatel s’emparerait tout de même, pour 5 à 6 milliards de dollars, des activités fibres optiques de Lucent, qui font l’objet de négociations officielles entre les deux entreprises.

En cas de réussite, Alcatel se renforcerait outre-Atlantique

L’opération donnerait naissance à un poids lourd dans le monde des équipementiers, pourtant déjà aux mains de quelques géants. Le nouvel Alcatel, avec 70 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel, se poserait en numéro un incontesté de l’industrie des réseaux. Et, surtout, l’acteur français réaliserait enfin sur le marché américain la percée décisive à laquelle il aspire depuis 1999.En effet, malgré différents rachats (DSC Communications, Xylan, Packet Engines, Assured Acces, Internet Devices, Newbridge Networks), Alacatel plafonne en réalisant 22 % de son chiffre d’affaires 2000 aux Etats-Unis. Ses concurrents se nomment Cisco, Nortel et… Lucent.La fusion entre les deux entreprises créerait également le premier équipementier européen face à Nokia, Ericsson et Siemens.La nouvelle entité bénéficierait de l’expertise d’Alcatel sur les technologies optiques et ADSL, et du poids de Lucent sur les équipements pour Internet haut débit, et particulièrement les interfaces optoélectroniques SDH/SONET 10 Gbps, segment sur lequel les deux entreprises collaborent déjà.

De nombreux obstacles persistent

Cela étant, de sérieux arguments mettent en doute le succès de cette acquisition. D’une part, les deux entreprises possèdent plusieurs gammes directement concurrentes entre lesquelles il faudrait choisir, ce qui signifierait des milliards de gâchis en recherche, développement et production. D’autre part, Lucent est un groupe malade, en pleine restructuration, et qui vient de provisionner plusieurs milliards de pertes, tandis qu’Alcatel n’en a pas encore fini avec la réorganisation que Serge Tchuruk y conduit depuis six ans.Ensuite, le marché des opérateurs télécoms est en pleine crise, les investissements sont au plus bas. Du fait de ce contexte, les bénéfices d’une fusion pourraient tarder à se faire sentir.Enfin, et ce n’est pas le moindre problème, les autorités américaines risquent d’être réticentes devant la fuite à l’étranger d’un des fleurons de l’industrie des hautes technologies.

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Renaud Bonnet