Linux est déjà l’un des principaux systèmes d’exploitation pour serveurs. Que lui manque-t-il pour conquérir les postes de travail ?Stephen Tweedie : Très peu de choses sur le plan technique. Nous travaillons en permanence sur sa compatibilité avec les derniers standards matériels. Mais le plus gros du travail est fait. Seules les applications manquent pour que Linux devienne une référence pour les utilisateurs.Pourtant, la plupart des applications de bureautique sont disponibles sous Linux ?Stephen Tweedie : En effet. Les entreprises attendent d’un système d’exploitation de bureau qu’il donne suffisamment de contrôle à l’utilisateur, tout en l’empêchant de menacer le fonctionnement des applications. Unix est la référence en matière de systèmes d’exploitation multi-utilisateurs. La distinction y est claire entre ce que l’utilisateur peut faire et ce à quoi il n’a pas accès. Les entreprises veulent des services d’annuaires pour gérer les droits d’accès, une gestion centralisée des applications, un réseau totalement transparent. Linux a des années d’avance sur Windows dans ces domaines et jouit d’un environnement graphique optimisé pour le réseau.Alan Cox : Linux propose un accès à distance complet à partir d’une interface sécurisée. Vous pouvez installer à distance des logiciels sur les machines de votre réseau, en automatisant au besoin cette tâche. C’est le manque d’applications spécialisées qui pose problème. Star Office est un bon produit de remplacement pour Office. Mais quand vous cherchez des gestionnaires de projets ou des outils de suivi de clientèle, l’offre est insuffisante.Linux supporte-t-il les grands standards du monde mobile, comme 802.11b ou Bluetooth ?Alan Cox : Il peut utiliser presque tous les matériels au standard 802.11b. Des problèmes existent avec quelques composants utilisés par des fabricants tels que Compaq, mais ils devraient être rapidement résolus. Nous faisons déjà fonctionner des périphériques Bluetooth sur USB sans difficultés. Le véritable problème est la standardisation, qui n’est pas entièrement finalisée. Et des questions restent en suspens ?” par exemple, le saut de fréquence.Stephen Tweedie : La volonté d’utiliser Bluetooth sous Linux ne vient pas de l’informatique traditionnelle, mais du monde de l’embarqué. Cela permettrait d’abaisser les coûts de nombreux appareils grand public. Les logiciels ainsi développés fonctionneront sur un ordinateur, mais répondront d’abord aux besoins de l’embarqué.Linux est un système unique, fonctionnant aussi bien sur les serveurs que sur les PC, les assistants et l’embarqué. Cela va-t-il durer ?Alan Cox : Il devrait rester aussi uni qu’à l’heure actuelle, même s’il y a déjà une division dans les faits. Deux types de Linux coexistent. Le premier ?” le Linux standard ?” nécessite une gestion matérielle de la mémoire. Il tourne sur des PC ou des serveurs. Le second ?” ou micronoyau Linux ?” fonctionne sur des systèmes beaucoup plus enfouis, comme des Palm Pilot. C’est celui que vous pourriez un jour retrouver dans votre machine à laver. Mais fondamentalement, c’est toujours le même code.Le noyau 2.4 a été lancé en janvier. Avez-vous déjà des réactions de la part des utilisateurs ?Stephen Tweedie : La version 2.4 du noyau comporte de nombreuses nouveautés. Nous avons recréé à partir de zéro certains composants principaux, tels que la gestion des réseaux. Pour ces raisons, elle est à la fois plus simple et plus robuste que l’ancien noyau. Malgré tout, certains pilotes récents n’ont pas encore été mis à jour pour cette version. La plupart des problèmes que nous avons rencontrés ne tenaient pas à l’organisation même de Linux, mais à certaines particularités de composants matériels. Pour éviter certaines pannes, nous avons dû freiner la vitesse à laquelle le système envoie des instructions aux composants (carte mère, port SCSI).Quelles seront les prochaines améliorations pour Linux ?Alan Cox : La gestion des architectures Numa. Un domaine que nous n’avons pas encore exploré avec Linux, même si certains chez Intel et IBM y travaillent. Tous les constructeurs constatent que, à partir de huit processeurs, des goulets d’étranglement apparaissent. Intel explique que, pour utiliser des machines à seize processeurs, il faudra utiliser Numa.Stephen Tweedie : Nous devons toujours surveiller les nouvelles technologies matérielles au fil de leur apparition. Numa en fait partie, de même qu’Infiniband. Ce ne sont pas des éléments qui lui sont essentiels. Il reste néanmoins quelques problèmes d’échelle à résoudre, comme la gestion de la mémoire, dont la limite sous Linux est de 2 To. Cela suffisait encore il y a peu, mais désormais, certains ont besoin de plus. Pour autant, les principaux défis que Linux devra affronter ne se situent pas au niveau du noyau, mais dans les applications, les protocoles réseaux et le partage de données.
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