En 1998, la hausse des salaires proposée aux nouveaux embauchés avait été modérée : de l’ordre de 2 à 3 % “, se souvient Françoise Mataillet. Mais, en 1999, changement de rythme. Avec une progression reconduite cette année. “Sur les deux ans, les salaires ont progressé de 5 à 8 % pour les jeunes diplômés, dont 5 % de plus entre 1999 et 2000.” La cause, bien sûr : “La tension sur le marché de l’emploi, qui a entraîné une revalorisation des salaires proposés dans l’entreprise.” Cette tension est plus forte sur certains profils particulièrement prisés dans le secteur. “Les miagistes, entre autres, sont très sollicités par les SSII. Mais aussi les ingénieurs télécoms issus de Grandes écoles, très courtisés par les opérateurs.”Les cadres et informaticiens expérimentés constituent la deuxième catégorie locomotive de la hausse des salaires. “La hausse se chiffre à 12 % pour les seniors sur les deux dernières années. Elle est de 6 % par rapport à l’an passé.” La nature technologique des projets et leur degré d’expertise entrent cette fois en ligne de compte : “ERP, décisionnel, Internet, architecture technique et gestion de projet classique sont les domaines touchés.” Au sein de la direction informatique d’Air France, on affronte cette pression salariale avec philosophie. “Nous nous attendions un peu à cette hausse. Jusqu’à présent, nous nous situions plutôt dans la fourchette basse. Nous nous rapprochons désormais du milieu.”
Les jeunes diplômés ont appris à négocier
Plus difficiles à gérer, semble-t-il, sont les comportements. Françoise Mataillet en a fait le constat. “Il y a encore trois ans, les jeunes diplômés ne négociaient pas. Depuis un an, ils connaissent la valeur de leur diplôme sur le marché, sont exigeants en matière de salaire, et ont même parfois tendance à exagérer. L’explication se trouve, bien sûr, au niveau du phénomène Internet et de la médiatisation des start up. Les seniors savent se positionner de façon plus réaliste.” A l’heure des discussions cruciales, les questions des jeunes portent aussi sur la façon dont sont appliquées les 35 heures. “Négociées il y a un an, elles se sont traduites par onze jours de congés supplémentaires et un décompte des jours travaillés pour 25 % des cadres informatiques. Certes, l’accord pèse sur la masse salariale. Mais il est difficile de faire la part entre le facteur croissance et le facteur 35 heures.” Pour les nouveaux arrivants, l’intérêt porte sur “l’arbitrage entre travail et vie privée. Ils considèrent la pratique mise en place comme appartenant au ” package ” proposé par l’entreprise”. Autre atout : “Les billets d’avion à tarif réduit dont les jeunes diplômés savent profiter rapidement. Nous ne valorisons pas ce type de mesure en milliers de francs dans les négociations. Mais les jeunes diplômés savent prendre en compte ce package, même s’il n’en a pas le nom. Tout comme ils apprécient notre pratique d’indemnisation du trajet domicile-travail, comprise entre 500 et 1 500 francs par mois.”
Les primes d’objectif en cours de réflexion
D’autres revendications voient le jour par ailleurs. Elles émanent des plus anciens et portent sur les primes sur objectifs. “Venus de l’extérieur, les seniors, déjà habitués à la combinaison fixe/variable, aimeraient retrouver la formule. De plus, cette attente est aussi partagée en interne par les directeurs de projet et les informaticiens expérimentés. Et, de fait, nous avons entamé une réflexion globale au sein de l’entreprise pour y répondre.” Pour l’heure, le variable se pratique peu à Air France, “en dehors des primes annuelles venant en complément des augmentations individuelles. Elles sont comprises entre 3 000 et 10 000 francs pour les cadres. Il est vrai que c’est un dispositif que l’informatique a beaucoup pratiqué…” Sur le plan du variable collectif, un accord d’intéressement a été mis en place l’an passé.
Mais profils pointus et nouvelles exigences ne génèrent-ils pas de différences ? “Les chefs de projet ne sont pas rémunérés en fonction du projet dont ils ont la charge, même si nous confions les projets les plus complexes aux plus expérimentés. Nous sommes très attentifs aux différences de salaires que peut entraîner l’arrivée de nouveaux collaborateurs. Nous avons d’ailleurs procédé cette année à quelques recalages en interne pour tenir compte de ces données.” Quoi qu’il en soit, les différences sont inhérentes au service informatique d’un grand compte. “Notre effectif est tout de même de mille cinq cents personnes et la moyenne d’age de 41 ans. Contrairement à une start up, où la population est homogène, chez nous, les trajectoires sont multiples. Certains ont plus de vingt ans de carrière. La relation salariale se gère sur la durée. Les différences, elles, se gèrent par rapport au parcours professionnel.” L’une de celles sur lesquelles s’est d’ailleurs penché Air France touche traditionnellement les filières management et expertise. “Certes, le différentiel reste en faveur du management. Toutefois, nous avons pris soin de valoriser aussi l’expertise.” Une solution à un problème de fond du secteur : les erreurs de trajectoire dues à la survalorisation de la filière management.
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