Cinq mois après l’acquisition de l’éditeur américain Houghton Mifflin, Agnès Touraine, PDG de Vivendi Universal Publishing (propriétaire du Groupe Tests qui éditeLe Nouvel Hebdo ) revient sur la logique de marque éditoriale de son groupe. Au-delà d’internet, la numérisation des contenus constitue, pour elle, la pierre angulaire de sa stratégie dans l’édition. Dans l’édition, la communication de VUP semble davantage axée autour des marques traditionnelles. Ainsi, la dernière version de votre encyclopédie électronique n’est plus vendue sous la marque Kléio mais sous la marque Larousse. Internet a-t-il encore un sens chez VUP ? Ce qui est clair, c’est que nous renforçons énormément les marques des éditeurs qui, notamment sur l’éducation et la littérature de référence, étaient ces dernières années ?” pour cause de fusion juridique ?” un peu délaissées. On s’attache à ce que chaque maison récupère son autonomie managériale ainsi que sa politique éditoriale. Le métier de l’édition s’incarne au travers d’une marque et d’un management, je ne crois pas aux fusions de marques. On peut rationaliser le back-office, mais c’est la limite de l’exercice. On ne peut pas rapprocher Bordas, Larousse, Nathan. Tout ce qui relève de la fabrication, de la comptabilité et de l’administration permet des économies. Les économies de taille ne se font pas sur la création. La force des marques est très importante pour nos auteurs et notre public. Quant au repositionnement de notre encyclopédie, c’est une décision de la direction de Larousse. Nous pensions, il y a deux ans, que Larousse n’était pas assez en vogue pour le public, et on lui a préféré Kléio. Je pense aujourd’hui que c’était une erreur. Il y a deux ans, le ” mortar ” culpabilisait devant le ” click “, ce n’est plus le cas aujourd’hui.Concernant vos actifs internet, Kleio.net pour l’encyclopédie et Education.com pour l’éducation, êtes-vous satisfaite des résultats ? En février dernier, vous aviez fixé un objectif d’1,8 million de visiteurs uniques pour 38 millions de pages vues par mois et 280 000 clients… à la fin 2002. La rentrée s’est plutôt bien passée, mais nous ne sommes pas exactement aux objectifs fixés. Si le trafic est satisfaisant, les recettes publicitaires sont décevantes. Sur Education.com, nous avons les abonnements des classes virtuelles d’Adi, et sur Kléio, nous n’en avons pas réellement. Mais ma politique reste la même. Nous ne mettrons jamais de contenu gratuit sur Kleio.com. Enfin, jamais… Disons pas pour l’année qui vient. Ce que l’on constate, c’est que les gens ne sont pas prêts à payer pour lire des contenus en ligne, alors qu’ils sont prêts à dépenser des sommes conséquentes pour le papier. Regardez le Grand Robert : six volumes commercialisés 457,35 euros (soit près de 3 000 francs). En trois mois, nous en avons vendu une trentaine de milliers d’exemplaires. L’enjeu n’est pas dans internet mais dans la numérisation des contenus. Elle permet de porter nos contenus sur tous les supports avec un coût minimum. Justement, où en êtes-vous dans la numérisation de vos fonds éditoriaux ? Sur Larousse, nous avons investi entre 1,5 et 2,3 millions d’euros. Dans ce chantier, toute la base éditoriale est maintenant numérisée. La différence avec les pratiques passées, c’est que le papier est produit à partir du numérique. Cela permet d’améliorer considérablement les marges. Il y a trois ou quatre ans, Larousse enregistrait une rentabilité inférieure à 5 %, aujourd’hui cette rentabilité se rapproche des 20 % au niveau mondial. La numérisation des fonds, que nous opérons dans toutes nos branches, porte ses fruits. Le chiffre d’affaires de l’activité référence au niveau mondial (Larousse, Harrap’s, Robert) atteint quelque 218 millions d’euros avec une marge de 20 %. Où en est VUP quant à l’intégration de l’éditeur américain Houghton Mifflin ? Nous partageons les mêmes problématiques de numérisation des fonds. Pour eux, c’est primordial mais en même temps très complexe à cause de la spécificité du marché nord-américain. Aux États-Unis, il y a des manuels scolaires différents pour chaque État. Il faut tout recommencer à chaque fois. Pour le moment, les synergies s’opèrent sur la logistique principalement (achat de papier, impression, etc.) qui autorise des économies de plusieurs millions de dollars. Tous les patrons de VUP et de Houghton Mifflin vont se réunir à Boston le 10 décembre prochain pour évaluer les synergies éditoriales. Certaines sont tout à fait évidentes. Aux États-Unis, le marché hispanophone est considérable. Dès lors, nos produits d’édition espagnols, avec Anaya en Espagne notamment, sont directement exploitables outre-Atlantique. Houghton Mifflin en France intéresse le marché universitaire. Il arrive souvent qu’il y ait de grands livres américains qui soient demandés. Là nous pourrons les vendre directement grâce à nos réseaux de distribution français.
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