À l’heure du tout dématérialisé, le Cloud est la nouvelle formule magique. Tout le monde s’y met ! Après les espaces de stockage, le streaming vidéo, on parle de plus en plus de cloud gaming. Même l’État français veut son cloud souverain. Or, c’est encore un pan entier du numérique, où les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) sont rois…
Après leur opération « Dégooglisons Internet » lancée en 2014, l’association libriste Framasoft ne se limite plus à promouvoir, diffuser et développer des outils numériques alternatifs, elle tente désormais de faire des petits… Chatons. Loin des petits félins domestiques stars des Internet, les Chatons libristes sont littéralement le « Collectif d’Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires ». Un réseau d’initiatives pour un stockage et un traitement des données éthique, local et responsable. Un cloud libre et protecteur de vos données. En d’autres termes, des « mini-Framasoft » partout en France.
Comment ça marche ? Boîte mail, stockage de données, partage de fichiers… Chaque Chatons propose à ses adhérents une palette des services numériques plus au moins exhaustive.
Une carte interactive… d’AMAP numériques
« Si Google c’est McDonald’s, les Chatons sont des Amap [Association pour le maintien d’une agriculture paysanne, ndlr] », nous explique Genma, un des 35 bénévoles actifs de Framasoft, « il n’y a plus d’intermédiaire. On sait ce que l’on consomme, d’où cela vient et qui le produit ». Filant la métaphore alimentaire, le militant libriste poursuit: « Nous sommes comme de petits artisans bio au milieu des industriels ».
L’objectif : pouvoir choisir localement son fournisseur de services numériques et savoir où sont stockées les données, qui les gère et comment on les traite. Et ainsi « éviter la collecte et la centralisation des données personnelles au sein de silos numériques du type de ceux proposés par les Gafam », selon le site Chatons.org.
A Marseille, Marsnet.org a développé ses propres outils collaboratifs (sondage, envoi de fichiers, Cloud, notes collectives, etc.). Autre exemple, à Strasbourg, l’association Sans Nuage met à disposition un courriel indépendant : « @sans-nuage.fr ». A Paris, le Colibris Outils Libres fait également sa part. Le collectif parisien propose entre autres un service visioconférence local, une alternative à Skype.
Et on pourrait multiplier les exemples puisque, après seulement deux ans d’existence, il existe désormais 58 hébergeurs indépendants sur le territoire. Pour trouver celui qui opère au plus près de chez vous, vous pouvez consulter la carte interactive qui répertorie ces Chatons.
Un « Chatons » doit montrer patte blanche
Pour devenir un Chatons, il faut respecter des conditions strictes établies dans la charte de traitement des données. Une des exigences de ce texte est de n’utiliser que des logiciels libres, que ce soit ceux de Framasoft ou d’autres. À cette condition près, toute structure – personne physique, morale, association ou collectivité – peut demander à obtenir cet agrément « Chatons ». L’adhésion peut être payante ou gratuite, ouverte à tous ou limitée à un cercle restreint, selon les structures.
Il s’engage alors à ne déporter aucun traitement ou même stockage des données. Ce doit être un circuit totalement contrôlé par la structure elle-même. Donc, si le prestataire utilise des logiciels open source mais stocke par exemple une partie des informations dans les Web Services d’Amazon, la condition n’est pas remplie. Un moyen de limiter le ciblage publicitaire des internautes. Enfin, toutes les conditions doivent être claires et lisibles, et le consentement de l’utilisateur total. À peu près tout ce que reproche aujourd’hui la Cnil à Google…
Un effort pédagogique pour libérer
Dans la lignée de leurs actions précédentes, l’objectif de la maison mère est de faire de la pédagogie numérique, de faire comprendre le fonctionnement de l’informatique, et de redonner de la place à l’humain dans le cyberespace. Mais, les activistes sont lucides, comme le confiait le délégué général de Framasoft, Pierre-Yves Gosset à NextINpact :
« Nous ne voulons pas remplacer Google [qui] touche des milliards de personnes. Il serait illusoire de croire qu’on peut atteindre la même proportion du public. Ce serait même contre-productif. On veut avant tout toucher un public qui nous connaît, qui est sensibilisé à ces questions, ces problématiques de respect. »
Multiplier les Chatons est une manière « d’assurer la résilience de [leur] démarche, mais aussi de laisser de l’espace aux expérimentations, aux bricolages, à l’inventivité, à l’enthousiasme, aux avis divergents du nôtre », assurent-ils sur leur interface. Armer les citoyens du Web avec des outils libres, une jolie manière de donner corps à leur devise, « changer le monde, un octet à la fois ».
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