Fort de ses 32 000 collaborateurs, Rhodia pourrait sans mal repeupler l’île antillaise de Saint-Martin. Reste que la structure du chimiste s’apparente davantage à celle d’un archipel : le groupe est composé de quelque 250 implantations, dont 150 rassemblent plus de 50 personnes. Un cas de figure qui ne favorise pas une unité de groupe. Ainsi, certaines filiales, qui réalisent chacune de 150 à 300 millions d’euros (1 à 2 milliards de francs) de chiffre d’affaires, ont lancé leurs activités en ligne dès 1998-1999, de manière autonome. Résultat : 25 à 30 sites internet ?” présentant pour la plupart l’activité de la maison ?” ont été créés, en plus des intranets. Pour en finir avec cette disparité, en juillet 2000, le comité exécutif a mis en place le portail Rhodia.com. Animé par une équipe de treize personnes, il a pour mission d’inciter l’ensemble des 150 unités de plus de cinquante salariés à ” aller vers l’e-business “.Rhodia.com couve en son sein deux projets principaux. Le premier consiste à refondre dans une même charte graphique et un même système de navigation l’ensemble de sites. Outil de communication pour le groupe, ce portail proposera également un service de transactions avec un espace réservé à certains clients. Ces derniers pourront partager des documents avec Rhodia ou suivre le processus de leurs commandes en ligne. À terme, un travail mené avec les clients donnera lieu à un espace nommé e-Room, destiné aux équipes de recherche et développement. Deuxième chantier : l’e-procurement, c’est-à-dire l’approvisionnement en ligne, avec un catalogue prévu pour tous les achats hors matières premières (matériel de laboratoire, gommes et crayons).Avant d’en arriver là, les hommes doivent être formés. C’est pourquoi l’opération Dialog a été mise en place. C’est le comité exécutif qui s’est plié le premier à l’exercice d’apprentissage, réalisé en ligne. “ L’e-learning est piloté par l’e-business, résume Fabrice Fourcot, responsable des projets e-business et chargé de Dialog en Europe. Décentralisée, cette formation apporte une vue globale à l’ensemble de l’entreprise. ” Dialog vise en effet à informer chaque salarié des projets internet de l’entreprise et de l’impact des nouvelles technologies sur son métier. Les modules abordent les pratiques du web comme des formations spécifiques sur les projets et les outils internes du groupe (sécurité, intranet, projets de production, nouveaux processus budgétaires). Les sessions d’apprentissage de la bureautique, de langues étrangères ou de gestion de projets sont encore en phase pilote.
En six langues
D’ici à la fin de l’année 2001, les 17 000 collaborateurs qui disposent d’un ordinateur dans le cadre de leur travail auront suivi cette formation qui, à terme, sera dispensée à l’ensemble des 32 000 salariés. Les cours, localisés en six langues, sont aussi adaptés en fonction des différences culturelles. “Les exemples doivent parler aux personnes tout en délivrant des messages identiques“, explique Fabrice Fourcot. Si le cours porte sur l’achat d’un livre sur internet, référence sera faite à la Fnac en France et à Amazon aux États-Unis. En dépit d’une volonté d’unifier les activités, Rhodia veille à ne pas créer un déploiement à marche forcée : “Chaque entreprise reste libre de procéder comme elle le veut “, assure Fabrice Fourcot. Ou comme elle le peut, le niveau des bandes passantes variant d’un pays à l’autre. Autre exemple : la barrière linguistique ne se lève pas toujours aisément. En Asie, les cours, qui ne seront pas dispensés avant le deuxième semestre, seront donnés en anglais. Pour les non-anglophones, Fabrice Fourcot reste évasif : “ On verra plus tard.“
Collègue et tuteur
Reste que l’e-learning sans présence de tuteur a déjà montré ses limites. Aussi Rhodia.com a décidé de créer une communauté d’animateurs, les coaches, choisis parmi les salariés par la direction de la filiale. Ces profs en herbe doivent disposer de deux qualités principales : motivation et e-maturité. “Ce qui ne veut pas dire formation d’informaticien, précise le responsable du projet. Ces ambassadeurs de l’e-learning et de l’e-business jouent un rôle d’animation pour les premiers modules de sensibilisation à internet.” Fabrice Fourcot relève l’exemple d’un ouvrier de production devenu coach parce qu’il surfait à son domicile. Nicolas Wintergerst a, quant à lui, été choisi par la direction générale en raison des fonctions qu’il occupe. Responsable World Class Manufacturing (WCM), il participe au programme d’amélioration de la performance industrielle sur le site du Roussillon. “Je revenais des États-Unis et j’avais déjà initié des personnes à Outlook de manière informelle“, raconte-t-il. C’est tout naturellement qu’il a animé les premières sessions. Pierre Saury, agent de maîtrise, a participé à l’une d’elles. Et déjà, il affiche une certaine satisfaction : “ En un quart d’heure, on peut trouver sur internet des pièces détachées ou des documents spécifiques. Alors qu’avant, il fallait compter 14 heures de travail étalées sur quinze jours.” Un gain de temps qui ne peut que satisfaire le comité exécutif.
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