La pratique des due diligence, permettant à un investisseur de réaliser un audit de la cible, est devenue monnaie courante avant toute acquisition. Les documents sont généralement mis à la disposition de l’acquéreur dans une salle dédiée, la data room. Dans toute data room, la nature sensible de certaines données conduit les sociétés à prendre quelques précautions. Parmi celles-ci, la signature d’un accord de confidentialité et la réglementation des conditions d’accès et de consultation des documents.Lorsque la cible est une société cotée, ces précautions sont parfois insuffisantes. En effet, communiquer des informations privilégiées à des tiers, en dehors du cadre normal des relations professionnelles, ou intervenir sur un titre coté alors même que l’on dispose de telles informations, est pénalement répréhensible : c’est le fameux délit d’initié. Or, lorsqu’une société cotée organise une data room, elle ne fait rien moins que de communiquer à des tiers des informations non publiques, en vue de permettre à ces tiers d’intervenir sur son titre ! La COB (Commission des opérations de Bourse) s’est saisie de la question en novembre 2001 en consultant les principaux acteurs de la place sur un projet de recommandation. La synthèse des observations recueillies, qui vient d’être publiée, montre que si les praticiens approuvent la démarche, en ce qu’elle consacre la pratique des data rooms, le contenu du projet appelle des réserves, qui sont loin d’être négligeables.
La difficulté des contre-offres
D’abord, la COB suggère de réserver ces data rooms aux cessions portant sur 10 % du capital au moins. Ce seuil a fait l’objet de critiques divergentes : alors que certains souhaitent le limiter aux cessions faisant franchir le seuil de 33 % et aux blocs de contrôle, d’autres préfèrent une approche plus flexible, au cas par cas.La COB préconise également, en cas de bataille boursière, de donner un accès à la data room à tous les compétiteurs. Mais on peut certainement s’interroger sur l’utilité d’un tel accès pour l’auteur d’une contre-offre, laquelle est, par principe, irrévocable. En outre, il semble peu réaliste de contraindre une société à donner des informations stratégiques à l’initiateur d’une offre concurrente qui peut être inamicale.Encore plus controversée est l’exigence d’une lettre “témoignant de l’intérêt sérieux” de l’investisseur. Selon la COB, les due diligence doivent permettre de valider l’opportunité d’un projet et/ou d’ajuster les conditions de l’offre, mais pas d’arrêter le principe même de l’opération. Est-ce à dire qu’il faut un engagement ferme de la part de l’investisseur dès avant l’accès à la data room ?Ce serait refuser la pratique des lettres d’intention qui, certes, témoignent d’un intérêt sérieux (ne serait-ce qu’en raison des coûts à engager), mais prévoient de manière générale la faculté de renoncer au projet en fonction des conclusions de l’audit. Au vu de ces observations, la Commission des opérations de Bourse devra sans doute repenser son projet, à moins qu’elle ne décide d’ignorer purement et simplement les avis exprimés… comme elle l’avait fait lors de la précédente consultation de place relative aux opérations avant introduction en Bourse.Gardons à l’esprit que, de toute manière, il ne s’agira que d’une simple recommandation : organiser une data room conforme à cette recommandation nécartera pas tout risque pénal*Avocat associé, Andersen Legal
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