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Action de groupe contre les DVD protégés

Le site d’avocats classaction.fr a lancé une assignation en justice contre six grands éditeurs vidéo. Il propose aux consommateurs le système de la class action, pas encore encadré en droit français.

Coup de tonnerre le 22 avril dernier pour l’édition vidéo en France. La justice
condamnait Les Films Alain Sarde et Studio Canal à retirer le dispositif anticopie du DVD du film Mulholland Drive, suite à une plainte de
l’UFC-Que Choisir, au motif de l’exercice de la copie privée. Et cela ne fait que commencer. Le 18 mai, un groupe d’avocats a lancé une assignation devant le Tribunal de commerce de Paris pour les mêmes faits et avec les mêmes arguments
contre Warner Bros France, Gaumont Columbia Tristar Home Video, TF1 Video, Buena Vista Home Entertainment et Universal Pictures France. Soit les six plus gros acteurs du marché.L’assignation reprend les préjudices dénoncés par l’UFC-Que Choisir : ‘ privation de la faculté de copie privée consacrée par la loi ‘, ‘ mention inexacte et
trompeuse apposée sur les DVD de l’interdiction de copie ‘,
et manque d’information claire sur l’existence d’un système anticopie. Mais il y une nouveauté dans la procédure. Il s’agit d’une ‘ class
action ‘, ou tout au moins d’une variante.Le principe, très prisé aux Etats-Unis : une action unique engagée par des avocats pour le compte d’un groupe de personnes ayant en commun d’avoir subi le même préjudice du fait des mêmes professionnels (ici, l’industrie de la
vidéo). Les avocats des plaignants ont, pour ce faire, monté un site Internet, Classaction.fr. Si une personne se sent concernée par l’assignation, elle peut s’inscrire en ligne et être intégrée au groupe de plaignants à partir du moment où son cas
correspond à l’affaire. La démarche lui coûtera douze euros. ‘ Les gens se voient attribuer un code secret, explique Jean-Marc Goldnadel, avocat et responsable du développement de classaction.fr, et
peuvent être informés de toutes les étapes de la procédure. Tout se passe comme s’ils étaient en contact avec leurs avocats, mais par mail. ‘
Les ‘ class actions ‘ sont courantes dans les pays anglo-saxons. ‘ En France, rien ne s’oppose, techniquement parlant, au lancement d’actions de ce type, affirme Jean-Marc
Goldnadel. La seule différence avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, c’est que ces actions peuvent être engagées sans désigner les personnes nommément. ‘ Aux Etats-Unis, on peut en effet lancer la procédure sans
demander leur avis à des personnes que l’on estime a priori lésées. En France, les avocats ont besoin d’un mandat des plaignants.Quoi qu’il en soit, une telle action a plusieurs intérêts. D’abord, demander la réparation d’un préjudice trop faible pour donner lieu à une action individuelle (les frais de procédure coûteraient plus que l’indemnisation). Ensuite,
rétablir un certain équilibre. Par plaignant, le préjudice peut être minime, mais ‘ multiplié à l’infini, rappelle Jean-Marc Goldnadel, il constitue de gros bénéfices pour ceux qui en
profitent. ‘
Les avocats de Classaction.fr demandent aux éditeurs vidéo mille euros par personne.A l’UFC-Que Choisir, l’initiative laisse cependant perplexe. ‘ Le moment est peu opportun car un groupe de travail étudie en ce moment la question [des class actions, NDLR] avec le ministère
de la Justice et celui de la Consommation, suite à la déclaration de Jacques Chirac lors de ses v?”ux ‘
commente Isabelle Faujour, directrice juridique adjointe de l’association de défense des consommateurs.Le président de la République avait en effet
promis, début janvier, une modification de la loi pour permettre d’intenter des actions collectives. Ce groupe de travail doit rendre ses conclusions le
1er octobre prochain. L’idée est d’étudier les expériences anglo-saxonnes en la matière pour éviter les mêmes erreurs. ‘ Notamment le démarchage fait par les avocats… ‘
ajoute Isabelle Faujour. Même commentaire à l’association Consommation Logement et Cadre de Vie (CLCV). ‘ Ce n’est pas à des avocats de se lancer dans ce genre de procédure ‘, ajoute sa présidente
Reine-Claude Mader.La juriste de l’UFC-Que Choisir mentionne un autre problème, peut-être plus ennnuyeux : si Classaction.fr échoue, cela peut servir aux entreprises hostiles, à l’instar du Medef, au mécanisme de ce type de démarche judiciaire, qui
ont beaucoup à perdre avec les class actions.

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Arnaud Devillard