Une histoire sans fin ? Dans un jugement du Tribunal de commerce de Paris du 8 juillet dernier repéré par L’Informé ce mardi 20 août, et consulté par 01net.com, le comparateur de prix français Twenga a remporté une petite manche face à Google et sa maison mère, Alphabet : un énième épisode dans l’affaire Google Shopping commencée en 2010 et toujours en cours aujourd’hui, soit quatorze ans après le début de la procédure.
Tout avait commencé en 2010. Cette année-là, la Commission européenne décidait d’enquêter sur des accusations de pratiques anticoncurrentielles visant le géant Google et son comparateur de produits, Google Shopping. La société américaine était accusée d’avoir abusé de sa position dominante en présentant avantageusement les résultats de son « Google Shopping » dans ses pages de résultats de recherche (de Google Search), au détriment des comparateurs de prix concurrents. L’enquête, initiée en 2010, avait abouti à une amende salée de 2,42 milliards d’euros en 2017. Google avait bien été reconnu coupable d’avoir abusé de « sa position dominante sur le marché des moteurs de recherche ». Le géant a « conféré un avantage illégal à son service de comparaison de prix par rapport à ceux de ses concurrents, sur treize marchés nationaux des moteurs de recherche », dont la France, ont rappelé les juges français.
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Mais depuis, Google a fait appel de la décision, et la procédure est allée de recours en recours. Quatorze ans après, elle n’est toujours pas terminée. C’est dans ce contexte que Twenga, une entreprise française qui proposait aussi un comparateur de prix, intervient. La société faisait partie du groupe d’entreprises qui s’estimait lésé par ces pratiques anti-concurrentielles. Après la condamnation de Google à son amende monstre en 2017 par l’Union européenne, Twenga avait attaqué le géant du numérique devant le tribunal de commerce de Paris, cette fois pour obtenir une indemnisation de son préjudice.
La guerre des chiffres
S’en était suivie une guerre de chiffres, un conflit sur l’indemnisation en question. Twenga avait d’abord réclamé la réparation d’un préjudice évalué par un cabinet d’analystes à hauteur d’une fourchette allant « de 960 et 1 351 millions d’euros ». Google avait, quant à lui, contesté cette évaluation, rapport d’un autre cabinet à l’appui. L’entreprise française avait alors demandé des explications sur les montants avancés par Google. Face au refus du mastodonte de communiquer des données, Twenga avait saisi le tribunal du commerce de Paris pour obtenir ces informations.
La société cherchait concrètement à obtenir le nombre de clics effectués sur Shopping Unit et Product Universal de janvier 2008 à septembre 2017, un chiffre sur lequel le cabinet de Google se baserait pour évaluer le préjudice de l’entreprise française. Elle demandait aussi d’autres données non communiquées. Google estimait de son côté qu’il s’agissait d’informations confidentielles, relevant du secret des affaires.
C’est sur ce point que le tribunal du commerce de Paris, le 8 juillet dernier, a tranché – en faveur de la société française : Google doit fournir les informations demandées dans un délai de trois mois, mais ces données, dont celles qui ont trait aux sociétés concurrentes de Google, ne devront être communiquées qu’aux « conseils et experts économiques de Twenga (…) après signature d’engagements de confidentialité appropriés ».
L’attente d’un dernier arrêt de la Cour de justice de l’UE
Contacté par 01net.com, Twenga n’avait pas répondu à notre demande de commentaires à l’heure de la publication de cet article. Un porte-parole de Google nous a précisé ce mardi « être prêts à défendre la position (de Google) devant les tribunaux », ajoutant que le géant prendrait « le temps d’examiner la décision avant d’envisager les prochaines étapes ». Il estime que « les modifications apportées aux annonces Shopping en 2017 fonctionnent avec succès, générant de la croissance et créant des emplois pour des centaines de services de comparaison de prix (...) ».
L’entreprise américaine a toutefois noté qu’elle « aurait pu raisonnablement s’attendre à ce que cette procédure soit suspendue le temps qu’un arrêt définitif ait été rendu par la Cour de justice de l’Union européenne, (…) l’argument principal de cette action en justice se référant à un dossier porté au niveau de l’Union européenne qui n’est pas encore terminé ».
Toute l’affaire dépend en effet de l’issue finale du cas « Google Shopping » jugé devant la Cour de justice de l’UE. En 2021, le Tribunal de l’Union européenne avait rejeté l’appel de Google, qui a à nouveau contesté cette décision. Cette fois, c’est la Cour de justice de l’UE qui doit trancher. Mais son arrêt n’est pas prévu avant plusieurs mois.
Note de la rédaction : cet article a été mis à jour ce mardi avec l’ajout de la déclaration d’un porte-parole de Google.
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