Passer au contenu

Les courants transhumanistes veulent s’unir, pour enfin régner ?

Est-il possible de fédérer les différents courants de pensée transhumanistes qui coexistent dans le monde ? Un colloque tente notamment de répondre à cette question ce week-end à Bruxelles.

« Il y a autant de transhumanismes que de transhumanistes », c’est ainsi que les membres de ce mouvement ont l’habitude de se moquer d’eux-mêmes. Ce courant de pensée, apparu dans les années soixante en Californie, prône l’amélioration de l’humain par les nouvelles technologies. Mais c’est bien là le seul point commun incontestable que l’on peut trouver à tous ses adeptes. Car les divergences restent fortes entre eux. Le colloque européen TransVision 2017, qui se tient jusqu’au 11 novembre à Bruxelles, tente justement de faire un point sur les derniers débats qui animent sa communauté. Avec l’espoir de dégager des points d’entente.

Des techno-progressistes aux libertariens

Parmi les transhumanistes, il y a les techno-progressistes qui se soucient des conséquences sociales collectives des progrès technologiques, les immortalistes qui veulent devenir immortels, les libertariens focalisés sur l’individu ou encore les singularitariens, comme l’informaticien Ray Kurzweil, qui pensent que la technologie atteindra un jour un niveau que l’homme ne sera plus capable d’appréhender.
Certains sont sceptiques sur la question de la cryogénisation, d’autres y adhèrent. Sans compter ceux qui espèrent la concrétisation de l’uploading, soit la possibilité de télécharger un jour leur cerveau sur un support informatique. Certains veulent poser des limites aux progrès de l’intelligence artificielle, d’autres pas. Et beaucoup penchent en faveur d’un système de revenu universel pour compenser la disparition des emplois due à l’automatisation.

Il existe cependant plusieurs pistes pour fédérer un tant soit peu les transhumanistes. Et cela passe d’abord par la structuration du mouvement.

Ray Kurzweil en 2016 lors d'une conférence.
STEPHEN JAFFE / INTERNATIONAL MONETARY FUND / AFP – Ray Kurzweil en 2016 lors d’une conférence.

Le mouvement se structure en Europe

S’il existe bien une organisation phare, humanity +, qui exerce une forme d’autorité morale, elle ne structure pas pour autant le mouvement au niveau mondial qui est éclaté en une multitude d’associations. On en a vu émerger récemment en Allemagne, en Espagne et en Pologne, tandis que le courant connaît un bel essor depuis plusieurs années en Russie.
La forte pratique religieuse, qu’elle soit orthodoxe ou catholique, ne s’avère pas du tout un obstacle à son développement en Europe. Un projet de société de cryogénisation est ainsi en cours de développement dans la péninsule ibérique, tandis que la société KrioRus existe déjà à Moscou.

En France, le transhumanisme est en voie de dédiabolisation. Marginal mais très décrié depuis son émergence dans notre pays il y a une dizaine d’années, il se normalise.
Depuis la tenue d’un premier colloque international à Paris en 2014, les effectifs de l’Association Française Transhumaniste ont augmenté régulièrement et les sollicitations académiques et médiatiques ne tarissent pas.
« Nous dépassons aujourd’hui les 120 membres et répondons à plus de 150 sollicitations par an pour être auditionnés ou débattre aussi bien à l’Assemblée nationale, que dans un lycée ou auprès d’une société médicale », nous indique Marc Roux, le président de l’Association Française Transhumaniste. Ce dernier  compte proposer à ses homologues européens la tenue d’un colloque annuel, voire la mise en place d’un festival qui changerait de pays à chaque édition.

Et pourquoi pas politiser le mouvement ?

La politisation du mouvement est une autre tendance émergente. Zoltan Istvan a créé le parti transhumaniste américain en 2014 pour se porter candidat à la présidence américaine lors des dernières élections. Depuis, il s’est mis en retrait de son organisation pour se lancer à la conquête de l’Etat de Californie dont il veut devenir gouverneur.
Citons aussi le parti transhumaniste britannique, créé en 2015 à l’initiative notamment de l’informaticien David Wood, ou encore les partis australien, polonais et allemand. Il y a bien un projet embryonnaire en France mais il ne semble pas décoller.

Zoltan Istvan, le fondateur du parti transhumaniste américain.
DR – Zoltan Istvan, le fondateur du parti transhumaniste américain.

« C’est encore un peu tôt pour notre pays. Les anglo-saxons mènent depuis longtemps une réflexion sur le transhumanisme. Ils ont fait tout un travail de pédagogie et de structuration du mouvement ce qui leur permet de réunir aujourd’hui beaucoup plus de membres », fait observer Marc Roux.

Un peu tôt pour créer un parti français mais pourquoi pas fédérer une liste transhumaniste pour les prochaines élections européennes de 2019 ? La question est en tous cas sérieusement posée.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Amélie Charnay