La voiture, vous l’utilisez tous les jours pour parcourir quelques dizaines ou centaines de kilomètres, mais saviez-vous qu’elle est une source intarissable d’informations ? HERE, un des spécialistes mondiaux de la cartographie l’a bien compris. Et le trio BMW, Mercedes et Audi aussi.
En effet, rappelons que ces géants allemands se sont alliés pour racheter Here l’année dernière, conscients de l’importance de la cartographie dans les années à venir – et sans doute aussi pour se libérer de tout emprise ou dépendance de Google avec Maps.
Comme dans bien des domaines, maîtriser sa donnée, c’est maîtriser les usages qui en découlent. Et lorsqu’on entend utiliser des milliards de voitures pour créer la cartographie parfaite, qui servira les générations de voitures à venir, on comprend l’importance de l’investissement.
Une plate-forme collaborative….
C’est donc à l’occasion du Mondial de l’Automobile de Paris, que HERE annonce une nouvelle génération de services qui va véritablement changer le paysage de la cartographie pour les décennies à venir. Cette plate-forme du futur, elle s’appelle Open Location Platform.
L’idée est de proposer, dès 2017, à tous ses partenaires (les constructeurs autos qui ont des cartes HERE dans leurs systèmes de navigation, les éditeurs d’applications mobiles, mais aussi les vendeurs de produits tels que Garmin), une cartographie enrichie des données collectées par les voitures en circulation.
Le but est évident : alimenter les voitures d’un flux de données mise à jour en permanence pour les aider à comprendre leur environnement. Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, nul besoin que celle-ci soit connectée via un réseau 3G ou 4G. HERE visant le plus grand nombre de véhicules, les informations sont transmises (dans le sens descendant) par les moyens d’ores et déjà existants, à savoir les messages TMC/RDS transitant par les ondes radio ou, lorsque celle-ci est disponible, par la radio numérique.
… avec quatre grands niveaux d’informations…
Pour comprendre au mieux cette nouvelle plate-forme, nous nous sommes entretenus avec Bruno Bourguet. Ce responsable des ventes pour HERE ose le dire : “cette plate-forme mise à disposition de la même manière pour tout le monde et utilisant les données de tout le monde est une première”. De “tout le monde”, ou presque, car dans un premier temps, ce sont les données des voitures connectées de BMW, Mercedes et Audi qui sont utilisées.
HERE Open Location Platform traitera les données suivantes générées par les véhicules :
– HERE Real-Time Traffic délivre des informations sur le trafic en temps réel, améliorées grâce aux nouveaux flux de données, le tout avec une faible latence.
– HERE Hazard Warnings fournit des informations sur des dangers potentiels, notamment les accidents et les risques liés à des conditions météorologiques extrêmes.
– HERE Road Signs délivre des informations sur les panneaux de signalisation quasiment en temps réel, notamment sur les limitations de vitesse temporaires dans une zone de travaux.
– HERE On-Street Parking indique aux conducteurs les rues dans lesquelles le stationnement est autorisé, en précisant de quel côté. Un algorithme, mixant des données statistiques et historiques, se charge même de conseiller une rue plutôt qu’une autre pour trouver une place.
Un premier niveau d’information qui ne s’arrêtera pas là, surtout si les voitures sont technologiquement bien équipées.
…mais au potentiel quasi infini
Au-delà de la quantité de données que HERE mettra à disposition de ses partenaires historiques en 2017, imaginez un peu le potentiel que cela représenterait si toutes les constructeurs automobiles acceptaient de partager leurs données. C’est d’ailleurs le vœu pieu de HERE… en partie déjà exaucé.
Souvenez-vous, il y a quelques semaines, nous étions à Munich pour un Tech-Day Audi, au cours duquel nous vous avions parlé de réalité virtuelle et des autres chantiers du constructeur.
La collecte de données en fait déjà partie puisque la marque aux anneaux collecte et traite déjà les informations remontées par 70 voitures appartenant aux collaborateurs Audi. Celles-ci sont transmises aux serveurs de HERE, mais aussi analysées par les équipes d’Audi.
Les démonstrations qu’Audi nous a fait du potentiel de l’Open Location Platform nous ont laissés rêveur. Et pour cause, le constructeur dispose d’une gamme de véhicules technologiquement très évolués. On ne parle pas spécialement de modèles hors de prix, comme une Audi A8 ou d’un luxueux Q7. Non, l’Audi A4 est bardée de capteurs qui peuvent analyser tout l’environnement de la voiture.
Les caméras peuvent scruter l’état de la voie, la qualité du marquage au sol, la présence d’un accident ou d’une zone de travaux, lire les panneaux pour détecter, par exemple, un changement de limitation de vitesse, etc.
De leur côté, les capteurs dans les suspensions peuvent étudier la qualité du revêtement, détecter la présence d’un nid de poule ou encore un danger temporaire tel qu’une flaque d’huile.
Et dans ce cas précis, c’est la capacité des différents capteurs à communiquer entre eux – via le calculateur de la voiture – qui permet d’étudier des scénarios. Dans le cas d’une perte d’adhérence, que nous évoquions à l’instant, l’ESP (par exemple), en communiquant avec les autres capteurs, pourrait être capable de dire si le fait qu’une roue (ou plusieurs) décroche est dû à une vitesse excessive, un angle de braquage trop important du volant ou, si la sonde de température affiche des températures négatives, considérer qu’il y a une plaque de verglas à cet endroit de la route.
Selon HERE, l’utilisation rapide des essuies glace permettrait également de diffuser un message d’alerte sur les conditions météos, ou encore un risque d’aquaplanage – là encore en analysant le retour des capteurs d’adhérence. L’utilisation des feux antibrouillard pourrait donner lieu au même genre d’alerte météo. Quant à l’activation des feux de détresse, elle peut être traduit par une message de type accident, voiture en panne ou, plus largement une alerte de danger.
Enfin un freinage important permettrait d’identifier “les queues de bouchons”, qui sont aussi un risque d’accident. Tandis que le relevé de la vitesse permet lui aussi de comprendre l’état de la circulation (fluide, ralentie, etc.).
Dans cette logique collaborative, l’information serait immédiatement transmise par la connexion Internet de la voiture aux serveurs Here, qui pourraient ensuite la redistribuer à tous les véhicules circulant sur la zone. Avouez que ça fait rêver ?
Évidemment, pour ces derniers usages, il faudra que les voitures soient connectées pour être en mesure de faire transiter les paquets de données en temps réel. C’est notamment pour cela que le monde de l’automobile mise beaucoup sur la 4G et la 5G.
Carto dans le Cloud pour la voiture autonome
Et la 5G, elle sera aussi là pour absorber cet énorme volume de données – imaginez la masse d’informations que génèreront toutes ces voitures “intelligentes” – qui profitera évidemment à la voiture autonome. Car pour HERE, le déploiement de la voiture autonome passera par une cartographique haute définition aux données mises à jour et enrichie en permanence.
Le cartographe dispose d’ailleurs de HD Live Map, une cartographie à l’échelle mondiale, réalisée avec des caméras, GPS et Lidar, qui combine déjà les données de cartographie et des données issues du “big data”.
C’est un autre projet sur lequel HERE travaille qui s’appelle Sensoris, pour Sensor Ingestion. Comprenez qu’il s’agit des données ingérées par les capteurs de la voiture, qui sont ensuite collectées, analysées et injectées dans la cartographique.
HERE utiliserait notamment cette carte enrichie pour créer et affiner l’intelligence de la voiture autonome et s’assurer qu’elles ne conduiront pas comme des robots, mais au maximum comme des humains… les accidents en moins.
Enfin, s’il ne fallait parler que de cartographie, selon Bruno Bourguet de HERE, la voiture autonome pour 2020/2021 (comme l’indiquaient Ford, BMW ou encore Volvo), c’est tout à fait possible. Vous voilà prévenu.
Retrouvez notre dossier spécial sur le Mondial de l’auto 2016.
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